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Froehner, Wilhelm
La collection Tyszkiewicz: choix de monuments antiques avec texte explicatif — Munich, 1892

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https://doi.org/10.11588/diglit.31513#0047
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l’Attique, à la Crète et à la Béotie. L’alphabet aussi est sûrement béotien. II n’est donc pas possible de chercher
l’origine du bronze ailleurs qu’en Béotie.

Les deux vers sont très beaux, et cela ne surprend pas, car le dialecte a une énergie qui plaît, et la
moitié des mots est empruntée à Homère. Déjà au premier chant de l’Iliade, on rencontre êz't]/3o/Mç et âçyvQo-
toÇoç; l’Odyssée a fourni cette gracieuse fin d’hexamètre (y, 58): ôiôov yaQieooav â/iiot,/3ï]v, qui se lit pareillement
sur les briques peintes de Corinthe : xv ôè ôôfç ya]QÎeo(o)av â/uoifâv (1). Dans l’inscription de Nikandra on emploie,
comme ici, deux épithètes sans le nom de la divinité qu’elles désignent : NtxâvÔQ?] fi âvêd'i/nev hew](èôlcoL loyeaiQf]L,
et une figurine de bronze du Musée de Berlin porte, sur ses cuisses, la légende : [A[eLvayô[Q]t]ç ]i âvé'&rjxev
èxr/j36/M)L AjzôVmvl.

Ces citations, qu’on pourrait multiplier, ne sont pas indispensables, mais il y a profit à comparer les
nouveaux venus avec leurs aînés.

Rien d’inattendu dans les formes dialectales de l’inscription. Le digamma de fexafJoXoL a son précédent
dans fhetcdôajLLOç (à Tanagra) et dans fexéôa/ioç (à Larisa); celui de yaQLfexxav confirme la forme pamphylienne xiudfeoa
et la forme corcyréenne oxovôfeooav. Aux datifs béotiens j’ai laissé la terminaison du locatif. A'lôol est l’impératif
employé par Pindare et se retrouve probablement aussi sur un pinax de Corinthe (Collitz, n° 3119, C 62).

La première impression qu’011 reçoit en voyant la figurine de la collection Tyszkiewicz, est une sorte
de stupeur produite par la haute antiquité du bronze. Une tête franchement triangulaire surmonte un col d’une
longueur énorme. De chaque côté, le col se trouve pris entre deux tresses de cheveux, en spirale, pareilles à
des colonnes torses, et qui s’arrêtent aux épaules; par derrière, cinq autres tresses perpendiculaires couvrent la
nuque. Les yeux sont deux trous ronds, évidés comme pour recevoir des prunelles en pâte de verre ou en

ivoire. II y a une fossette au menton. Du menton à la ceinture, une ligne verticale, gravée, divise le buste en

deux moitiés. Le buste lui-même s’amincit lentement vers la taille, serrée en dehors de toute vraisemblance et
posée sur des cuisses d’oiseau. On a simplement supprimé le ventre, et les côtes ne sont pas marquées davantage;
mais le gonflement des seins est assez sensible et leurs contours inférieurs ont été tracés au ciselet. Toute
cette construction rappelle un peu la plus ancienne stèle de Tanagra, celle qui porte les noms de Dermys et

Ivitylos. Au revers, une ligne droite marque l’épine dorsale ; les nvyal sont petites et de forte saillie.

De tous les ouvrages archaïques que nous possédons, et leur nombre est grand, aucun ne répond
exactement au type que je viens de décrire. Cela tient, en partie, à ce que la plupart des figures de même
style se présentent de profil, sur des vases peints ou des bagues d’or. Néanmoins, on reconnaît leur parenté avec le
bronze de Thèbes, et d’autres monuments, aussi anciens peut-être, viennent se grouper autour. La tendance à
exagérer, dans la figure humaine, la longueur du col, est une des caractéristiques de l’art primitif. Une idole
de plomb, trouvée dans les fouilles de Troie, a un véritable col de girafe (2); les statuettes préhistoriques en
calcaire, qui viennent des Cyclades, ont le col plus étiré encore (3); il est hors de proportion sur une très

ancienne terre cuite peinte de Tanagra (4), et sur une autre, de Mycènes, dont la tête ressemble à celle d’un

oiseau (5). Art hétéen, phénicien, sarde, pierres des îles, vases peints de Mÿcènes et de Chypre, vases du Dipylon
et jusqu’à ceux de Mélos : on voit partout les mêmes cols démesurés, et parfois la même disposition des cheveux,
qui s’arrêtent net aux épaules, encadrant de leurs spirales raides et tombantes la tête et l’encolure. Sur quelques
bronzes sardes (6), on retrouve aussi la forme triangulaire du crâne, mais la physionomie n’est plus la même.

Les yeux du bronze Tyszkiewicz rappellent les yeux de chouette des poteries de Troie et donnent à
toute la figurine un aspect étrange. Au siècle d’où il date, le visage n’a pas dû être le miroir de l’âme. Ouant

au corps de la statuette, à ce buste en cône renversé, à cet étranglement de taille et à cette suppression du

ventre, ils nous sont connus par l’art mycénien. Les bagues d’or, les intailles, ies poignards de Mycènes ne
représentent pas la figure humaine autrement qu’avec un long col et une taille de guêpe. On rencontre les

(1) Roehl, Inscript. gr. ant., n° 63. lo8 a (p. 10 et 171).

(2) Perrot et Chipiez, Histoire de l’art, t. VI, 653.

(3) Athen. Mitteil. 1884, pl. 6. — Perrot, t. VI, 739. 741.

(4) Ileuzey, Figurines antiques, pl. 17, 2.

(5) Perrot, t. VI, 745.

(6) Perrot, t. IV, 66.

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