MOYEN AGE. — VIIE ET IX? SIÈCLES. — CLOTURES EN FONTE DE BRONZE.
situation et une pratique usitée ailleurs, dut, sans aucun doute, faire une certaine impression
sur Charles, et c'est, assez vraisemblablement, sous l'influence de telles idées qu'il retourna
en son pays. On comprend que, frappé du grand caractère des monuments romains et surtout
de leur décoration relativement à celle des édifices de sa patrie, ce prince conçut le projet
d'embellir la ville d'Aix et d'autres lieux de constructions ornées à l'antique, c'est-à-dire de
constructions dont les éléments et les matériaux de décor fussent tirés des édifices anciens ou
imités de ceux-ci par ses artistes; on comprend aussi qu'autorisé, qu'encouragé par ce qu'il
avait vu faire à Rome, il lui soit venu à l'esprit de vouloir l'appliquer aux œuvres dont il mé-
ditait la construction, et tout prouve qu'il en agit de la sorte; car, à peine avait-il com-
mencé sa chapelle, qu'il s'empressa d'adresser au pape Adrien une lettre dans laquelle il lui
demandait la permission d'enlever des édifices de Ravenne tous les débris qui seraient de
cette nature. Très-vraisemblablement, cette spoliation ne dut point se borner à la seule
ville de Ravenne, mais elle s'étendit à plusieurs autres cités dont les ruines pouvaient offrir
quelques éléments décoratifs, et, dès ce moment, certaines constructions antiques devinrent
comme autant de carrières, d'où l'on tira, suivant les besoins, tous les riches matériaux.
Après les dévastations des Barbares et en attendant celles non moins funestes du IXe siècle,
ces actes de vandalisme doivent être considérés comme les premières autorisations qui
continuèrent leur ruine et servirent même de prétexte à des mutilations plus grandes encore.
Mais, s'il paraît évident que Charles en agit de cette manière pour la décoration ou les
revêtements des parois et du sol de sa chapelle, peut-on admettre qu'il en fut de même à
l'éçard des vantaux et des clôtures? Sur ce point, les historiens se taisent, et leur silence
nous jette dans une complète incertitude. Or, cette incertitude devient bientôt des plus embar-
rassantes par la présence des éléments qu'on y remarque. Pour qui connaît l'art romain
à l'époque dont nous parlons et parvenu à ce point de transformation qu'il avait dû subir,
évidemment le faire ou la condition de ces monuments dénoterait une œuvre italique, je
veux dire un travail romain ou autre du temps de la décadence. Ce sont, en effet, la même
physionomie, le même caractère ou les mêmes motifs de décoration; car, que ces vantaux
et ces clôtures aient été coulés en Italie ou à Constantinople, qu'ils aient été enlevés à des
édifices antérieurs, toujours est-il qu'ils offrent une grande analogie et une très-forte res-
semblance avec les travaux ultramoutains de l'époque. Cependant, de ce qu'ils présentent une
telle similitude, devons-nous en conclure à une origine étrangère ou à un travail exclusi-
vement italien? Évidemment, non. Il nous suffit d'en émettre ici l'opinion et de provoquer,
sur ce point, des recherches nouvelles, nous bornant à en avoir produit la bien faible
hypothèse; mais, question capitale, selon nous, par les conséquences qu'elle implique; car,
s'il faut adopter la croyance d'une exécution germanique sous l'influence des idées italiennes,
on pressent où cette adoption doit conduire. Quoi qu'il en soit, nous ne pourrons étudier sérieu-
sement cette question que lorsque nous aurons publié, avec la monographie de la chapelle de
Charles, toutes celles des autres œuvres d'architecture, de sculpture, de peinture, etc., exécu-
tées en France ou à l'étranger pendant le cours des périodes mérovingienne et carolingienne :
nous comparerons alors quelques-uns des éléments introduits dans la décoration des \ani;m\
et des clôtures, et cette comparaison fournira de très-précieux indices.
Ces considérations établies, il faut maintenant aborder l'étude des clôtures, et tirer, de
leur examen, les notions quelles peuvent fournir. —Ces clôtures, avons-nous dit, se trouvent
situation et une pratique usitée ailleurs, dut, sans aucun doute, faire une certaine impression
sur Charles, et c'est, assez vraisemblablement, sous l'influence de telles idées qu'il retourna
en son pays. On comprend que, frappé du grand caractère des monuments romains et surtout
de leur décoration relativement à celle des édifices de sa patrie, ce prince conçut le projet
d'embellir la ville d'Aix et d'autres lieux de constructions ornées à l'antique, c'est-à-dire de
constructions dont les éléments et les matériaux de décor fussent tirés des édifices anciens ou
imités de ceux-ci par ses artistes; on comprend aussi qu'autorisé, qu'encouragé par ce qu'il
avait vu faire à Rome, il lui soit venu à l'esprit de vouloir l'appliquer aux œuvres dont il mé-
ditait la construction, et tout prouve qu'il en agit de la sorte; car, à peine avait-il com-
mencé sa chapelle, qu'il s'empressa d'adresser au pape Adrien une lettre dans laquelle il lui
demandait la permission d'enlever des édifices de Ravenne tous les débris qui seraient de
cette nature. Très-vraisemblablement, cette spoliation ne dut point se borner à la seule
ville de Ravenne, mais elle s'étendit à plusieurs autres cités dont les ruines pouvaient offrir
quelques éléments décoratifs, et, dès ce moment, certaines constructions antiques devinrent
comme autant de carrières, d'où l'on tira, suivant les besoins, tous les riches matériaux.
Après les dévastations des Barbares et en attendant celles non moins funestes du IXe siècle,
ces actes de vandalisme doivent être considérés comme les premières autorisations qui
continuèrent leur ruine et servirent même de prétexte à des mutilations plus grandes encore.
Mais, s'il paraît évident que Charles en agit de cette manière pour la décoration ou les
revêtements des parois et du sol de sa chapelle, peut-on admettre qu'il en fut de même à
l'éçard des vantaux et des clôtures? Sur ce point, les historiens se taisent, et leur silence
nous jette dans une complète incertitude. Or, cette incertitude devient bientôt des plus embar-
rassantes par la présence des éléments qu'on y remarque. Pour qui connaît l'art romain
à l'époque dont nous parlons et parvenu à ce point de transformation qu'il avait dû subir,
évidemment le faire ou la condition de ces monuments dénoterait une œuvre italique, je
veux dire un travail romain ou autre du temps de la décadence. Ce sont, en effet, la même
physionomie, le même caractère ou les mêmes motifs de décoration; car, que ces vantaux
et ces clôtures aient été coulés en Italie ou à Constantinople, qu'ils aient été enlevés à des
édifices antérieurs, toujours est-il qu'ils offrent une grande analogie et une très-forte res-
semblance avec les travaux ultramoutains de l'époque. Cependant, de ce qu'ils présentent une
telle similitude, devons-nous en conclure à une origine étrangère ou à un travail exclusi-
vement italien? Évidemment, non. Il nous suffit d'en émettre ici l'opinion et de provoquer,
sur ce point, des recherches nouvelles, nous bornant à en avoir produit la bien faible
hypothèse; mais, question capitale, selon nous, par les conséquences qu'elle implique; car,
s'il faut adopter la croyance d'une exécution germanique sous l'influence des idées italiennes,
on pressent où cette adoption doit conduire. Quoi qu'il en soit, nous ne pourrons étudier sérieu-
sement cette question que lorsque nous aurons publié, avec la monographie de la chapelle de
Charles, toutes celles des autres œuvres d'architecture, de sculpture, de peinture, etc., exécu-
tées en France ou à l'étranger pendant le cours des périodes mérovingienne et carolingienne :
nous comparerons alors quelques-uns des éléments introduits dans la décoration des \ani;m\
et des clôtures, et cette comparaison fournira de très-précieux indices.
Ces considérations établies, il faut maintenant aborder l'étude des clôtures, et tirer, de
leur examen, les notions quelles peuvent fournir. —Ces clôtures, avons-nous dit, se trouvent