( Hl
rincendie de V Hotel - Dieu , par M. de
Marmöntel, Historiographe de France,
Tun des quaränte de 1’Academie. Fram-oife.
A. Paris 1773 , cbez Valade , Librairc,
rue S. Jaques , vis-a-vis celle des Ma-
thurins, in eile se vend au probt des
pauvres.
Le vcen du public est qu’on transporte
l’Hotcl-Dicu dans un autre quartier que
celui qu’il oc-cupoit avant le desastre qu’il
vient d’essuyerj ce desastre dont tous les
papiers publics ont rendu compte avec
plus ou moins de details , & dont les
cficts ont cte sans doute plus affreux en-
core qu’on ne l’a dir , fournit l’occasipn
de bätir l’asyle des pauvres dans un lieu
ou ils puisient respirer un air pur , boire
unc eau salubre , & trouver dans ces bicn-
faits que la nature accorde ä tous un
soulagement ccrtain ä leurs maux que
Ic defauc de ces comarodites ne fait
qu’augmenter j l’inccndie qur consuma cct
erablisscment utile en 1757 fit rcssechir
sür la fatite qu’on avoic faite de le
placer au ceatrc dc Paris , dans l’un des
quartiers ou les rucs Font le plus etoites,
les ediffices plus presies , plus hauts , plus
charges dc bois dans leur constrmftion, &
par consequent plus combuftiblcs 5 mais
011 n’y ressechit qu’un moment 5 on le
fit rebätir dans le meme emplacemcnt ,
& M. de Marmontel qui eil: bien instruit
obse.rye que cette seconde faute a coüte
ia vie a plus de 80000 citoyens qu’on au-
roit sauves en changeant la place de, leur
sisyle. Tous les ans il raeurt 8000 mala-
des ä l’Hptel-Dieil, & il seroit possiblc
d’en conscrver le tiers 5 il n’en meur: ä la
charite qui est mieux placee qu’enviren
un neuvieme ; a 1 Hopital de Versaillcs
on n’sn perd pas davantage dans la salle
des pauvres, & il ne perit que le tren-
tieme des malades dans la salle de la
livree; w il n’cst personne , die l’Ecrivain,
scnsible & philosophe, qui plaide ici avcc
tant d’eloqucnce & de chalcur la cause
des pauvres , il n’eft personne qui ne
fremdle d’horreur & de pitie en voyant
au milieu d’une ville opulente , un Hö-
* Souvent six & quelquefois huit; quelquefois mei
«tablk uns seconde tauche de malades. iiFroyable 1
pital ou les malades sont quatre dans Ic
meme lit. * La seule idcc que 1‘in-
commodite , les angoisses , les cris , les
plaintes de ces malheureux , leur causent
reciproqwement 5 de l’imposlibilitc de re-
poser un seul instant l’un a cötc de l’au-
tre , du tourment de cette insomnie dans
un etat ou la natüre accablee & souftrante
appclle le sommeil ; cette seule idee est
epouvantable. L’hommc robuste & sain
ne, resisteroit pas a une epreuve si vio-
lente ; aulsi voit-on les semraes qui en
pleinc sante , vent faire leur couches a
j’Hötel Dieu , par la seule incommodite
d’etre six dans un lit , y tomber dans
une langueur souvent mortelle pour dies
meines , plus souvent encore pour leur
fruit. Mais cbmbicn plus effrayant doit
etre le tableau de ce mclange d’insirmiuss
& de souftrances ou se rasieinbient la
frayeur, le degout, la compaslion mu-
tuelle & l’irnage toujours presente de l’a-
gonic & de la mort ? les pauvres de Faris
sout tous persuades qu’on ne les porte a
l’Hötel-Dieu que pour söusfrir & pour
mburir : aussi les a-t on vus c-ent fois
prives de tout secours dans leur mise-
rable denseure, frerhir au nom de ce
resuge , & conjurer ceux qui le leur
proposoient de les laisscr expirer en paix.
Mais Ic-rsque la necessite force le malade
ä s’y rendre , sa ftmma, ses enfants jet-
tent les meines cris que si on le portoit
au tcmbcau.
Quel spedtacle en efret que celui dc
ces malades entasics dans le meine lit!
l’un recoit un remede , & ,scs yeax treu«
bles appercoivent ä sa droite un inforru-
tune ä qui l’cn donne les secours spiri-
tucls , ä sa gauche un autre qui se de-
bat entre ia vie & 1a .mort , & aupres
duqucl on prie pour le disposer a cc
palsage terrible, tandis qu’on en enleve
ä ses pieds un autre qui vient d’expirejr,
&. dont ia place est bientot prise par un
nouveau dont la vie ne sera sans doure
pas plus longuc. Quel esset doit produirc
le remede qu’on lui presente ? il n’a au-
tour dc lui que 1c tableau dc l’agonic &
ne les lits sost a d:UX ctages } & _s«B simyerial 5 c»
eccsilw.
rincendie de V Hotel - Dieu , par M. de
Marmöntel, Historiographe de France,
Tun des quaränte de 1’Academie. Fram-oife.
A. Paris 1773 , cbez Valade , Librairc,
rue S. Jaques , vis-a-vis celle des Ma-
thurins, in eile se vend au probt des
pauvres.
Le vcen du public est qu’on transporte
l’Hotcl-Dicu dans un autre quartier que
celui qu’il oc-cupoit avant le desastre qu’il
vient d’essuyerj ce desastre dont tous les
papiers publics ont rendu compte avec
plus ou moins de details , & dont les
cficts ont cte sans doute plus affreux en-
core qu’on ne l’a dir , fournit l’occasipn
de bätir l’asyle des pauvres dans un lieu
ou ils puisient respirer un air pur , boire
unc eau salubre , & trouver dans ces bicn-
faits que la nature accorde ä tous un
soulagement ccrtain ä leurs maux que
Ic defauc de ces comarodites ne fait
qu’augmenter j l’inccndie qur consuma cct
erablisscment utile en 1757 fit rcssechir
sür la fatite qu’on avoic faite de le
placer au ceatrc dc Paris , dans l’un des
quartiers ou les rucs Font le plus etoites,
les ediffices plus presies , plus hauts , plus
charges dc bois dans leur constrmftion, &
par consequent plus combuftiblcs 5 mais
011 n’y ressechit qu’un moment 5 on le
fit rebätir dans le meme emplacemcnt ,
& M. de Marmontel qui eil: bien instruit
obse.rye que cette seconde faute a coüte
ia vie a plus de 80000 citoyens qu’on au-
roit sauves en changeant la place de, leur
sisyle. Tous les ans il raeurt 8000 mala-
des ä l’Hptel-Dieil, & il seroit possiblc
d’en conscrver le tiers 5 il n’en meur: ä la
charite qui est mieux placee qu’enviren
un neuvieme ; a 1 Hopital de Versaillcs
on n’sn perd pas davantage dans la salle
des pauvres, & il ne perit que le tren-
tieme des malades dans la salle de la
livree; w il n’cst personne , die l’Ecrivain,
scnsible & philosophe, qui plaide ici avcc
tant d’eloqucnce & de chalcur la cause
des pauvres , il n’eft personne qui ne
fremdle d’horreur & de pitie en voyant
au milieu d’une ville opulente , un Hö-
* Souvent six & quelquefois huit; quelquefois mei
«tablk uns seconde tauche de malades. iiFroyable 1
pital ou les malades sont quatre dans Ic
meme lit. * La seule idcc que 1‘in-
commodite , les angoisses , les cris , les
plaintes de ces malheureux , leur causent
reciproqwement 5 de l’imposlibilitc de re-
poser un seul instant l’un a cötc de l’au-
tre , du tourment de cette insomnie dans
un etat ou la natüre accablee & souftrante
appclle le sommeil ; cette seule idee est
epouvantable. L’hommc robuste & sain
ne, resisteroit pas a une epreuve si vio-
lente ; aulsi voit-on les semraes qui en
pleinc sante , vent faire leur couches a
j’Hötel Dieu , par la seule incommodite
d’etre six dans un lit , y tomber dans
une langueur souvent mortelle pour dies
meines , plus souvent encore pour leur
fruit. Mais cbmbicn plus effrayant doit
etre le tableau de ce mclange d’insirmiuss
& de souftrances ou se rasieinbient la
frayeur, le degout, la compaslion mu-
tuelle & l’irnage toujours presente de l’a-
gonic & de la mort ? les pauvres de Faris
sout tous persuades qu’on ne les porte a
l’Hötel-Dieu que pour söusfrir & pour
mburir : aussi les a-t on vus c-ent fois
prives de tout secours dans leur mise-
rable denseure, frerhir au nom de ce
resuge , & conjurer ceux qui le leur
proposoient de les laisscr expirer en paix.
Mais Ic-rsque la necessite force le malade
ä s’y rendre , sa ftmma, ses enfants jet-
tent les meines cris que si on le portoit
au tcmbcau.
Quel spedtacle en efret que celui dc
ces malades entasics dans le meine lit!
l’un recoit un remede , & ,scs yeax treu«
bles appercoivent ä sa droite un inforru-
tune ä qui l’cn donne les secours spiri-
tucls , ä sa gauche un autre qui se de-
bat entre ia vie & 1a .mort , & aupres
duqucl on prie pour le disposer a cc
palsage terrible, tandis qu’on en enleve
ä ses pieds un autre qui vient d’expirejr,
&. dont ia place est bientot prise par un
nouveau dont la vie ne sera sans doure
pas plus longuc. Quel esset doit produirc
le remede qu’on lui presente ? il n’a au-
tour dc lui que 1c tableau dc l’agonic &
ne les lits sost a d:UX ctages } & _s«B simyerial 5 c»
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