GAZETTE DES BEAUX-ARTS.
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acceptées comme étant dues à Jean Cousin, les paysages au milieu des-
quels agissent les figures ont tous un aspect analogue; les branches des
arbres qui s’y trouvent penchent vers le sol et sont à peu près dépour-
vues de feuilles; des monuments circulaires se terminant au sommet en
gradins, des pyramides coniqües, des arcades interrompues sur lesquelles
s’est fixée une végétation rare et pleureuse, ont été symétriquement
disposés dans la campagne et distribués d’une façon à peu près égale.
Procédant du connu à l’inconnu, mettant à profit cette observation qui
lui est personnelle, M. Didot conclut qu’il faut grouper autour du nom
de Jean Cousin un certain nombre d’ouvrages dans lesquels se remar-
quent ces accidents particuliers, ouvrages classés jusque-là dans la caté-
gorie bien vaste des estampes anonymes.
Ces rapprochements ingénieux, ces observations fondées sur une
hypothèse admissible, amènent l’auteur de l’étude qui nous occupe
à attribuer à Jean Cousin les dessins qui accompagnent la traduction
française du Songe de Poliphile. Comme pièce à l’appui de cette opinion,
il cite le paysage qui se voit au quatrième feuillet de la première édi-
tion (1546). « Poliphile racompte comme il luy fut aduis en songe qu’il
dormoit, et en dormant se trouuoit en une vallée fermée d’une grand
closture en forme de pyramide, sur laquelle estoit assis un obélisque de
merveilleuse haulteur, qu’il regarda songneusement et par grande admi-
ration. » Cette planche vient, sans aucun doute, confirmer la thèse que
soutient M. Didot : les fragments d’architecture qui se voient à la droite
de l’estampe, l’obélisque qui y apparaît, les mousses pendantes qui sont
accrochées au terrain, rappellent assurément les ouvrages attribués
avec certitude au maître en question ; mais le texte exigeait ici que l’ar-
tiste se renfermât dans des données fixes, le programme était formel;
cette planche sulfirait-elle d’ailleurs à prouver que toutes les gravures
qui ornent le Songe de Poliphile aient été dessinées par Jean Cousin?
Pour cette seule raison que, parmi une centaine de planches gravées sur
bois, il s’en trouve une qui porte le caractère commun à des œuvres
attribuées sûrement au maître sénonais, il ne laisse pas que d’être un
peu téméraire de conclure que les quatre-vingt-dix-neuf autres soient
nécessairement dues au crayon du même artiste. 11 faut y prendre
garde. Les adversaires de cette opinion pourraient se faire une arme
de l’argument mis en avant par M. Didot et pourraient être amenés à
dire, en retournant cet argument, que ce volume ne contenant qu’une
seule planche qui rappelle les ouvrages reconnus authentiques de Jean
Cousin, il est au moins probable que cet artiste n’en est pas fauteur;
se serait-il contenté en effet, ne manqueront-ils pas de dire, de signer
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acceptées comme étant dues à Jean Cousin, les paysages au milieu des-
quels agissent les figures ont tous un aspect analogue; les branches des
arbres qui s’y trouvent penchent vers le sol et sont à peu près dépour-
vues de feuilles; des monuments circulaires se terminant au sommet en
gradins, des pyramides coniqües, des arcades interrompues sur lesquelles
s’est fixée une végétation rare et pleureuse, ont été symétriquement
disposés dans la campagne et distribués d’une façon à peu près égale.
Procédant du connu à l’inconnu, mettant à profit cette observation qui
lui est personnelle, M. Didot conclut qu’il faut grouper autour du nom
de Jean Cousin un certain nombre d’ouvrages dans lesquels se remar-
quent ces accidents particuliers, ouvrages classés jusque-là dans la caté-
gorie bien vaste des estampes anonymes.
Ces rapprochements ingénieux, ces observations fondées sur une
hypothèse admissible, amènent l’auteur de l’étude qui nous occupe
à attribuer à Jean Cousin les dessins qui accompagnent la traduction
française du Songe de Poliphile. Comme pièce à l’appui de cette opinion,
il cite le paysage qui se voit au quatrième feuillet de la première édi-
tion (1546). « Poliphile racompte comme il luy fut aduis en songe qu’il
dormoit, et en dormant se trouuoit en une vallée fermée d’une grand
closture en forme de pyramide, sur laquelle estoit assis un obélisque de
merveilleuse haulteur, qu’il regarda songneusement et par grande admi-
ration. » Cette planche vient, sans aucun doute, confirmer la thèse que
soutient M. Didot : les fragments d’architecture qui se voient à la droite
de l’estampe, l’obélisque qui y apparaît, les mousses pendantes qui sont
accrochées au terrain, rappellent assurément les ouvrages attribués
avec certitude au maître en question ; mais le texte exigeait ici que l’ar-
tiste se renfermât dans des données fixes, le programme était formel;
cette planche sulfirait-elle d’ailleurs à prouver que toutes les gravures
qui ornent le Songe de Poliphile aient été dessinées par Jean Cousin?
Pour cette seule raison que, parmi une centaine de planches gravées sur
bois, il s’en trouve une qui porte le caractère commun à des œuvres
attribuées sûrement au maître sénonais, il ne laisse pas que d’être un
peu téméraire de conclure que les quatre-vingt-dix-neuf autres soient
nécessairement dues au crayon du même artiste. 11 faut y prendre
garde. Les adversaires de cette opinion pourraient se faire une arme
de l’argument mis en avant par M. Didot et pourraient être amenés à
dire, en retournant cet argument, que ce volume ne contenant qu’une
seule planche qui rappelle les ouvrages reconnus authentiques de Jean
Cousin, il est au moins probable que cet artiste n’en est pas fauteur;
se serait-il contenté en effet, ne manqueront-ils pas de dire, de signer