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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 21.1880

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Nr. 2
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Lefort, Paul: Velazquez, 4
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https://doi.org/10.11588/diglit.22841#0136
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VELAZQUEZ.

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si sûre d’elle-même, et l’art réfléchi, concis, tranquille, tout en pénétra-
tion et en profondeur, de ce portraitiste génial qui fouille, scrute et
analyse les choses avec un œil d’une sensibilité et d’une justesse extrêmes,
possède et pratique d’instinct la notion et le sentiment des valeurs, note
et fixe les rapports, les écarts, les passages les plus délicats et les plus
rapides d’un ton à un autre, saisit dans une teinte ses plus infinies
nuances, et réduit et diminue la lumière, sans que sa couleur grave et
forte, dédaigneuse de l’éclat, sobre parfois jusqu’à la frugalité, mais
distinguée, hautaine et toujours si fière d’allures, cesse de nous présen-
ter l’exacte relation entre les choses vues et leurs apparences, telles que
le peintre les a rapportées sur sa toile.

Après qu’on a appris de Pacheco quelle mutuelle sympathie se
vouèrent les deux peintres à dater de leur rencontre, qu’il nous a dit
combien Rubens admira franchement les ouvrages de Velâzquez et quels
éloges il en fit en diverses circonstances, avec un tact et une courtoisie
auxquels Pacheco rend hommage, notre curiosité, mise en éveil, ne
demeure encore que très incomplètement satisfaite. C’est Rubens lui-
même qu’on voudrait pouvoir interroger.

Malheureusement, sa correspondance datée d’Espagne — du moins,
ce qui en a été mis au jour — ne s’inquiète guère de peinture : l’art y a
cédé complètement la place aux préoccupations diplomatiques.

En revanche, un curieux témoignage de l’estime de Rubens pour le
talent du jeune maître espagnol nous est fourni par un ami des deux
peintres, don Gaspar de Fuensalida, greffier du roi. Quand en 1658, deux
années après l’achèvement de son célèbre tableau des Meninus, Velâzquez
fut nommé par Philippe IV chevalier de Santiago, une enquête préalable
à son admission dans l’ordre s’ouvrit, selon la coutume, touchant ses
mérites, titres et qualités. Tous les témoins de sa vie furent appelés à y
déposer. Parmi les déclarations contenues dans ces Informaciones de las
calidades de Diego de Silva Velâzquez, aposentador de palacio y ayuda
decamura de S. M. para el habito que pretende de la orden del senor
Santiago, actuellement conservées à Madrid aux Archives historiques
nationales, se trouve celle de don Gaspar. Après avoir dit « qu’il a toujours
connu l’artiste depuis le jour de son entrée au service du roi, service où il
s’est acquis la réputation du plus grand peintre qu’il y ait en Europe »,
don Gaspar s’empresse d’ajouter « que telle était l’opinion publique-
ment professée par Rubens, le grand peintre flamand, à l’époque où il
vintàMadrid ». Toute empreinte de partialité quelle puisse paraître, il
nous semble cependant retrouver dans cette déclaration du bon greffier
quelque chose comme un écho de la loyale parole de Rubens. Nul mieux
 
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