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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2.Pér. 21.1880

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Nr. 2
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Claretie, Jules: L' exposition des oeuvres de M. Basile Vereschagin
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https://doi.org/10.11588/diglit.22841#0175
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L’EXPOSITION DES OEUVRES DE M. VERESCHAGIN. 165

A Paris, M. Vereschagin nous a montré la collection de ses Impres-
sions de voyage aux Indes, cent cinquante tableaux environ, d’une
dimension généralement petite, panneaux exécutés pour la plupart aux
Indes mêmes, devant ces lacs sacrés ou ces temples hindous que l’artiste
reproduit avec une fidélité scrupuleuse. Rien de plus attirant au double
point de vue ethnographique et architectural que ces palais et ces quais
de marbre, ces constructions bizarres où le difforme arrive au sublime,
et ces types de lamas, de derviches et de fakirs. M. Paul Mantz émettait
naguère le vœu que la collection de ces admirables mosquées nous fût
conservée comme modèles à offrir à nos architectes. Il y avait, en vérité,
pour les artistes, une étude à faire de ces colonnades étranges, de ces
silhouettes de villes reflétées avec leurs dentelures exquisses par l’eau
endormie des lacs bleus, de ces salles d’audience des grands Mogols, à
Delhi, de cette Perle-Mosquée d’Agra. Le peintre, avec sa couleur vigou-
reuse ne reculant point devant la crudité pour arriver au vrai, à l’impres-
sion ressentie, nous montrait là des vues de l’Inde plus exactes que des
photographies. Pour la première fois, la peinture arrivait à rendre, avec
une précision singulière, les fantaisies, les caprices séduisants et bar-
bares de l’architecture de ces teanples et de ces palais quasi fantastiques,
aux blancheurs de marbre et de neige, aux couleurs rosées ou bleuâtres.
A côté des Indes légèrement fantaisistes et improbables de Tournemine,
nous avions ici l’Inde véritable rapportée dans de petits cadres par un
voyageur qui avait exécuté sur place ces études si nettes et si volontai-
rement poussées.

C’est surtout dans la traduction littérale de ces paysages et de ces
monuments d’Asie, dans l’exécution serrée de ces types d’Hindous que le
rare talent de M. Vereschagin nous a frappé. On sent qu’il a passé par
l’atelier de M. Gérôme et que la science de dessin de M. Iîida l’a préoc-
cupé; mais il n’imite personne. C’est, avant tout, un indépendant qui
tient à peindre ce qu’il a vu comme il l’a vu. II enlèvera, par exemple, sur
un ciel d’un bleu intense, un perroquet d’un vert d’émeraude perché sur
un toit rose et la vision de ces colorations asiatiques, parfois brutales,
passée sur la toile avec toutes ses oppositions et ses heurts de tonalités.

Dans XEntrée du prince de Galles à Jeypur comme dans la Mosquée
du grand Mogol à Delhi, M. Vereschagin agrandit son cadre et change
sa manière. Le sentiment décoratif de ces deux tableaux est frappant.
Les harmonies marmoréennes de la Mosquée remplissent une vaste toile
blanche pleine de silence. Quelques vêtements de gens agenouillés,
quelques babouches de cuir vert ou jaune déposées au bas des marches
rompent seuls cette espèce de symphonie en blanc. Il y a là une vérité par-
 
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