DÉCOUVERTE DES MOMIES ROYALES DE THÈBES.
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Syrie, mais que les botanistes n’ont pas encore rencontrée en Egypte, à
moins qu’elle n’y soit cultivée clans quelques anciens jardins arabes comme
elle l’était aux temps pharaoniques. Viennent enfin le Sesbania cegyp-
tiaca, le Carthamus tinctorius, qui servait à teindre les bandelettes et les
toiles de momies et dont le rose vif ne pâlit pas à côté du carthame mo-
derne.
Sur une autre momie* (celle du prêtre Nibsoni), on a trouvé un
lichen : le Parmelia furfuracea, plante qui provient de l’archipel grec et
se vend au bazar des droguistes du Caire sous le nom de Chéba. Toutes
ces plantes, sauf le Nymphœa., dit le docteur Schweinfurth, n’avaient pas
encore été constatées dans la flore antique des tombeaux. Il pense qu’ayant
été ainsi choisies pour plusieurs sépultures royales, elles ont dû tenir une
place importante dans cette symbolique des fleurs et des fruits qui, de tout
temps, a été comme une sorte d’intermédiaire mystique entre les dieux et
les hommes ; malheureusement, on n’en connaît pas la clef et les natura-
listes antiques ne nous éclairent pas sur ce point1.
Il n’y a que la Thébaïde, avec son atmosphère d’une sécheresse abso-
lue, qui puisse donner de pareilles surprises. Les plus anciens herbiers
ne dataient que de trois siècles à peine, et voici que tout à coup l’Égypte
en fournit un qui compte 3,000 ans de plus et se signale par une variété
perdue de la pastèque ! Ces exemples de conservation indéfinie ne sont
pas rares. Mariette bey racontait que dans la tombe encore intacte et mu-
rée d’un des taureaux Apis où il pénétra le premier en mars 1852, il
reconnut sur le sable du caveau la marque d’un pied nu : c’était la trace
du dernier ouvrier ou prêtre qui, près de 3,500 ans auparavant, avait en-
fermé le dieu dans sa tombe. On sait le parti que Théophile Gautier a tiré
de ce fait dans le beau prologue de son Roman de la momie.
Parmi les fleurs d’Aménophis s’est trouvée une momie de guêpes, une
de ces grandes guêpes dont les descendants redoutables ne font trêve qu’à
la cessation des chaleurs de novembre. L’insecte, qui se laissa enfermer
avec le roi pour avoir fourragé trop longtemps dans son linceul de fleurs
fraîches, est un peu roussi par les émanations des baumes qui l’ont mo-
mifié; mais ses pattes, ses ailes encore diaphanes, semblent prêtes à con-
tinuer leur mouvement.
On a le cercueil du successeur d’Aménophis Ier, Thoutmès Ier, qui com-
mença les grandes conquêtes en Syrie, mais dont le corps ne s’est pas
retrouvé : en son lieu et place était couché ce même roi Pinotem II qui a
I. Le Bulletin de l’Institut égyptien publiera bientôt un long et intéressant
mémoire du Dr Schweinfurth sur ces fleurs antiques.
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Syrie, mais que les botanistes n’ont pas encore rencontrée en Egypte, à
moins qu’elle n’y soit cultivée clans quelques anciens jardins arabes comme
elle l’était aux temps pharaoniques. Viennent enfin le Sesbania cegyp-
tiaca, le Carthamus tinctorius, qui servait à teindre les bandelettes et les
toiles de momies et dont le rose vif ne pâlit pas à côté du carthame mo-
derne.
Sur une autre momie* (celle du prêtre Nibsoni), on a trouvé un
lichen : le Parmelia furfuracea, plante qui provient de l’archipel grec et
se vend au bazar des droguistes du Caire sous le nom de Chéba. Toutes
ces plantes, sauf le Nymphœa., dit le docteur Schweinfurth, n’avaient pas
encore été constatées dans la flore antique des tombeaux. Il pense qu’ayant
été ainsi choisies pour plusieurs sépultures royales, elles ont dû tenir une
place importante dans cette symbolique des fleurs et des fruits qui, de tout
temps, a été comme une sorte d’intermédiaire mystique entre les dieux et
les hommes ; malheureusement, on n’en connaît pas la clef et les natura-
listes antiques ne nous éclairent pas sur ce point1.
Il n’y a que la Thébaïde, avec son atmosphère d’une sécheresse abso-
lue, qui puisse donner de pareilles surprises. Les plus anciens herbiers
ne dataient que de trois siècles à peine, et voici que tout à coup l’Égypte
en fournit un qui compte 3,000 ans de plus et se signale par une variété
perdue de la pastèque ! Ces exemples de conservation indéfinie ne sont
pas rares. Mariette bey racontait que dans la tombe encore intacte et mu-
rée d’un des taureaux Apis où il pénétra le premier en mars 1852, il
reconnut sur le sable du caveau la marque d’un pied nu : c’était la trace
du dernier ouvrier ou prêtre qui, près de 3,500 ans auparavant, avait en-
fermé le dieu dans sa tombe. On sait le parti que Théophile Gautier a tiré
de ce fait dans le beau prologue de son Roman de la momie.
Parmi les fleurs d’Aménophis s’est trouvée une momie de guêpes, une
de ces grandes guêpes dont les descendants redoutables ne font trêve qu’à
la cessation des chaleurs de novembre. L’insecte, qui se laissa enfermer
avec le roi pour avoir fourragé trop longtemps dans son linceul de fleurs
fraîches, est un peu roussi par les émanations des baumes qui l’ont mo-
mifié; mais ses pattes, ses ailes encore diaphanes, semblent prêtes à con-
tinuer leur mouvement.
On a le cercueil du successeur d’Aménophis Ier, Thoutmès Ier, qui com-
mença les grandes conquêtes en Syrie, mais dont le corps ne s’est pas
retrouvé : en son lieu et place était couché ce même roi Pinotem II qui a
I. Le Bulletin de l’Institut égyptien publiera bientôt un long et intéressant
mémoire du Dr Schweinfurth sur ces fleurs antiques.