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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2. Pér. 35.1887

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Nr. 2
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Durand-Gréville, Émile: Les noveaux documents hollandais sur la "Ronde de Nuit" de Rembrandt
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https://doi.org/10.11588/diglit.24189#0198
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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

des incrédules. M. Meyer a bien voulu répondre à nos demandes d’éclaircissements
par une lettre dont voici le passage le plus intéressant :

« ... La tonalité grise de la copie de Lundens n’est pas une preuve suffisante
pour en tirer toutes les conséqences que vous en avez tirées dans la Gazette des
Beaux-Arts. En effet, comment peut-on croire que tout cet effet de lumière, si
mystérieux et si fascinant, ne résulterait que d’une superposition de vernissages 1
Que le génie et la volonté du maître ne sont pour rien dans un effet presque unique
dans l’histoire de l’art! »

L’argument paraît très fort. Il le serait, en effet, si nous avions jamais prétendu
que le clair-obscur de la B.onde de nuit fût l’effet des vernis. Mais telle n’est pas
notre opinion. En réalité, les lois de la lumière, c’est-à-dire de la distribution
naturelle des clairs, des ombres et des reflets, sont les mêmes à toute heure, par
un beau soleil ou par un clair de lune nocturne, dans un appartement ou dans
une cave. Le peintre qui connaît ces lois les applique toujours, et, s’il a du génie,
il les applique en les soumettant à une autre loi plus subjective, celle de l’harmonie
des valeurs de ton. Ensevelissez un Pieter de Iloogh sous de nombreuses couches
de vernis roussis et vieillis, ce sera toujours un Pieter de Hoogli, admirable par la
justesse des valeurs. Il en est de même, a fortiori, de Rembrandt. La profondeur
du clair-obscur, la justesse des valeurs, l’observation bien comprise des reflets, la
poésie de la lumière, toutes ces qualités que l’on admire, — un peu voilées çà et
là, mais enveloppées de plus de mystères, — dans la B.onde de nuit telle qu’elle est
aujourd’hui, existaient déjà incontestablement quand l’œuvre sortit des mains du
plus grand des luministes; elles existaient transposées dans une gamme plus claire,
dans une gamme de plein soleil, qui n’avait rien de commun avec le plein jour
des peintres vulgaires, mais dont toutes les notes chantaient entre elles selon les
lois de la lumière mises au service de l’esprit créateur d’un puissant génie. Voilà
ce qu’on peut répondre à l’objection citée plus haut.

Reprenons l’examen de l’article de la üud-IIoltand; nous allons y trouver d’appa-
rentes objections, — non de M. Meyer, mais de M. de Yries, — qui sont au contraire
de arguments en faveur de notre thèse. M. de Vries avait noté avec soin les
différences qui l’empêchaient de conclure que le tableau de Londres était la copie
exacte de celui d'Amsterdam. Ainsi, dans la copie, l’ombre portée de la pertui-
sane du lieutenant est visible, ainsi que les joints des pierres sur la muraille de
l’édifice et trois barres ou croisillons de la fenêtre; la seconde fillette est plus
nettement visible; enfin, il y a quatre passements au costume de l’homme qui
écarte la carabine avec la main. Selon nous, ces différences prouvent uniquement
que le tableau original était clair en 1660, puisque tous ces détails y étaient
visibles.

Autres différences. Dans la copie de Londres et dans l’aquarelle, les tirants du
tambour sont au nombre de cinq, et il n’y en a que quatre dans l’original. L’ex-
plication du mystère est bien simple : le cinquième tirant se trouvait dans la bande
enlevée au tableau, comme les lecteurs pourront le constater en se reportant à la
gravure publiée dans la Gazette de novembre 1885. M. Meyer fait encore observer
que le nombre des bandes du drapeau est de quatre dans l’original, tandis qu’il est
de cinq dans toutes les copies, et cela l’étonne un peu, bien qu’il soit d’avis que ces
différences secondaires ne peuvent rien prouver contre la réalité de la mutilation.
Mais ici encore le manque de concordance n’est qu’apparent : il provient à la fois
 
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