EXPOSITION RÉTROSPECTIVE DES DESSINS.
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■conscience s’étaient fort escrimées et peut-être refroidies, pour la
perfection de son œuvre, dans des recherches que l’on ne doit point
condamner; on le trouve, à certaines pages, pour le modèle d’un
casque, ou la mode d’une coiffure, ou les lèvres d’un profil, ou la
forme de la louve romaine, copiant minutieusement des médailles
antiques, ou, chose plus bizarre encore, cherchant certaines expres-
sions de douleur maternelle dans le souvenir d’anciennes peintures
italiennes du xve siècle. D’ailleurs, n’avait-il pas noté à la première
page de son calepin la liste effrayante des recueils d’antiquités qu’il
devait « demander à voir à la Bibliothèque : Gemmæ antiquæ cælatæ,
— les Bas-reliefs antiques de Rome, les Marbres d’Oxford, —
Musæum etruscum, — Musæum romanum, — la Galerie Justi-
nienne, — Thésaurus ex thesauro palatino », etc., etc., cinq ou six
autres gros ouvrages de la même autorité.
Un dessin que je regarde comme bien supérieur à celui de l’Her-
silie, est l’étude pour le groupe des Horaces, prêtée par M. Bonnat.
J’y retrouve toute la fierté nerveuse de David en ses meilleurs jours,
la vraie marque du chef d’atelier, digne d’entrainer la jeunesse de son
temps et qui va révolutionner l’école. Encore ne faut-il pas omettre
le cadre de petits croquis à la plume et lavés d’encre des groupes
divers pour le Serment du Jeu de Paume, et qui nous montre cos-
tumées ces figures dont nous connaissons le nu par le vaste carton du
Louvre. Ces groupes, qui mettent en action les principaux personnages
de la grande scène sont fort animés et pleins de la passion de cette
heure solennelle. En cherchant bien, l’on retrouverait encore, ci et
là, d’autres études de David pour le Sacre, etc. Il ne lui manque, pour
prendre ici sa juste importance, que d’être un peu plus rapproché de
lui-même.
Mais du moins, ne le quittons pas sans avoir réuni autour de lui
les quelques élèves qui ont, autant que ses propres œuvres, fait la
gloire de son nom, dont ils sont inséparables.
Les dessins de Gros sont rares; cependant les lithographies qu’on
a de lui montrent qu’il avait au bout des doigts le sentiment du
dessin crayonné. D’ailleurs il avait débuté par des miniatures, et la
miniature exige le serré de la forme et du trait, mais sans doute,
entraîné plus tard par l’ivresse de sa palette dans l’exécution des
grandes machines qui se succédaient dans son atelier, ne prenait-il
plus le temps d’étudier ses contours qu’avec le pinceau sur ses toiles
gigantesques. Toujours est-il que le Louvre lui-même ne possédait de
lui que les deux très libres croquis ayant pour sujet les tableaux de
51
■conscience s’étaient fort escrimées et peut-être refroidies, pour la
perfection de son œuvre, dans des recherches que l’on ne doit point
condamner; on le trouve, à certaines pages, pour le modèle d’un
casque, ou la mode d’une coiffure, ou les lèvres d’un profil, ou la
forme de la louve romaine, copiant minutieusement des médailles
antiques, ou, chose plus bizarre encore, cherchant certaines expres-
sions de douleur maternelle dans le souvenir d’anciennes peintures
italiennes du xve siècle. D’ailleurs, n’avait-il pas noté à la première
page de son calepin la liste effrayante des recueils d’antiquités qu’il
devait « demander à voir à la Bibliothèque : Gemmæ antiquæ cælatæ,
— les Bas-reliefs antiques de Rome, les Marbres d’Oxford, —
Musæum etruscum, — Musæum romanum, — la Galerie Justi-
nienne, — Thésaurus ex thesauro palatino », etc., etc., cinq ou six
autres gros ouvrages de la même autorité.
Un dessin que je regarde comme bien supérieur à celui de l’Her-
silie, est l’étude pour le groupe des Horaces, prêtée par M. Bonnat.
J’y retrouve toute la fierté nerveuse de David en ses meilleurs jours,
la vraie marque du chef d’atelier, digne d’entrainer la jeunesse de son
temps et qui va révolutionner l’école. Encore ne faut-il pas omettre
le cadre de petits croquis à la plume et lavés d’encre des groupes
divers pour le Serment du Jeu de Paume, et qui nous montre cos-
tumées ces figures dont nous connaissons le nu par le vaste carton du
Louvre. Ces groupes, qui mettent en action les principaux personnages
de la grande scène sont fort animés et pleins de la passion de cette
heure solennelle. En cherchant bien, l’on retrouverait encore, ci et
là, d’autres études de David pour le Sacre, etc. Il ne lui manque, pour
prendre ici sa juste importance, que d’être un peu plus rapproché de
lui-même.
Mais du moins, ne le quittons pas sans avoir réuni autour de lui
les quelques élèves qui ont, autant que ses propres œuvres, fait la
gloire de son nom, dont ils sont inséparables.
Les dessins de Gros sont rares; cependant les lithographies qu’on
a de lui montrent qu’il avait au bout des doigts le sentiment du
dessin crayonné. D’ailleurs il avait débuté par des miniatures, et la
miniature exige le serré de la forme et du trait, mais sans doute,
entraîné plus tard par l’ivresse de sa palette dans l’exécution des
grandes machines qui se succédaient dans son atelier, ne prenait-il
plus le temps d’étudier ses contours qu’avec le pinceau sur ses toiles
gigantesques. Toujours est-il que le Louvre lui-même ne possédait de
lui que les deux très libres croquis ayant pour sujet les tableaux de