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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 2.1889

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Nr. 2
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Chennevières-Pointel, Charles Philippe de: Exposition rétrospective des dessins 1789 - 1889, 2
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https://doi.org/10.11588/diglit.24446#0141

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EXPOSITION RÉTROSPECTIVE DES DESSINS.

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Je me souviens que quand, vers 1845, nous rencontrions aux
Salons les paysages de celui que nous appelions le père Bidault, avec
leurs feuillés menus et pâlots, leurs troncs bien polis, leurs horizons
gris vert d’eau, nous nous attroupions pour pâmer de rire, et quand
l’un de nous observait que c’était là l’homme qui, chaque an, faisait
repousser d’enthousiasme par le jury les paysages de Th. Rousseau,
alors c’étaient des hurlements d’indignation et de malédiction. Eh
bien! quand mourut ce père Bidault, l’on vit passer à sa vente des
études peintes par lui au temps de sa jeunesse et qui étaient aussi
sincères, aussi naïves, aussi légères de touche et plus aptes à pré-
parer de sérieuses compositions que les études de ceux qui les
bafouaient de mon temps. Vous en pouvez juger par les échantillons
du Louvre. De même pour Demarne, quel paysagiste à petites figures
fut plus populaire que Demarne, de 1783 à 1827? C’était, semblait-il,
le dernier des héritiers de Téniers et de Berghem, et des plus
charmants Hollando-Flamands qui avaient rempli le xvne et le
xviii0 siècle, et ce qu’on voit de lui en certains bons endroits, au
Musée de Cherbourg, par exemple, ne dément point ce renom; il
apportait au milieu de ces immenses toiles aux ambitions classiques
et empesées, une douce et riante impression de nature, où le soleil
ne manquait pas, ni les épisodes égayants, avec un certain arrange-
ment de la vie mi-rustique, mi-citadine de son époque, et pour les
apprêts de ses tableaux, on peut dire que ses études de paysagiste,
croquis à la plume et lavis, coins de buissons, groupes d’arbres avec
éclaircies, ont été innombrables. Impossible d’ailleurs d’y mécon-
naître le goût traditionnel, le procédé séculaire de son pays d’ori-
gine; c’est un Flamand ou plutôt un Hollandais naturalisé Français,
par l’esprit de composition et l’ingéniosité de mode et de mœurs de
sa seconde patrie.

Nos plus vieux amateurs se souviennent seuls de Demarne; ce fut
cependant un autre naturaliste que les Valenciennes et les Michalon
de son temps. Taunay avait autant d’agrément que lui, mais combien
moins vrai et plus factice dans son expression de la nature vivante
et verdoyante! Voyez cette étude à l’aquarelle d’une allée de bou-
leaux. Lequel de nos peintres d’aujourd’hui, j’entends ceux qui ont
fait l’honneur de notre étonnante génération de paysagistes, aurait
pris plus de plaisir amoureux à pénétrer jusqu’au vif dans la grâce
et la sève de ces arbres élégants, à traduire si juste le ton particulier
de ces troncs blancs à reflets bleuâtres, à modeler leurs formes
élancées et leurs rameaux balancés?
 
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