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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 8.1892

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Nr. 2
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Leprieur, Paul: Correspondance d'Angleterre
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https://doi.org/10.11588/diglit.24661#0189
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CORRESPONDANCE D’ANGLETERRE.

173

Petrus Cristus en revanche, le rare et curieux élève de Van Eyck, a deux
intéressants portraits d’homme. L’un au moins (à lord Northbrook), quoique non
signé, est absolument sûr, exécuté tout à fait dans la manière des panneaux de
Berlin et de Francfort, brillant dans les étoffes et le paysage, sec et inexpressif
dans les chairs. Celui de lord Verulam, le Portrait d’Edward Grimston, envoyé
d’Henri VI à la cour de Bourgogne, nous étonne davantage. 11 faut avouer d’ailleurs
qu’il est tout amolli, empâté de repeints ; ce n’est plus qu’une ruine. Un portrait
de femme du Musée de Berlin, la prétendue lady Talbot, qu’on en a rapprochée
en ces derniers temps et qui pourrait bien en être en effet le pendant, la taille
étant la même, la boiserie et le mur identiques, le personnage en regard, permet
de se faire à la rigueur une idée de la facture primitive, limpide et ferme dans
les clairs. Or, le tableau de lord Verulam étant signé et daté au revers 4446, il
faudrait y voir une des premières œuvres connues de Cristus, et comment admettre
que la manière claire, la plus originale et personnelle, la plus moderne, ait précédé
la manière chaude imitée de Van Eyck? On croirait volontiers à une erreur dans
la date de l’inscription, transcrite peut-être d’un ancien cadre disparu.

Un pur et authentique panneau de Bouts, Moïse et le buisson ardent (à M. Henry
Willett), est curieux à comparer à une réplique du même sujet en pendant à
Gédéon et la toison, deux volets d’un même rétable bizarrement collés et unis
l’un à l’autre (à M. Crews), qui paraissent être du médiocre élève et imitateur de
Bouts, auteur de Y Assomption de la Vierge, au Musée de Bruxelles. Deux charmantes
petites Vierges (à M1'9 Stephenson Clarke), toutes deux assises sur un banc de
gazon, cueillant une fleur à l’Enfant, et très semblables malgré les différences de
l’arrangement ou des types, décèlent également l’influence de Bouts, sans qu’on
ose toutefois lui attribuer nettement l’une ou l’autre. Un grand triptyque tout
délavé et pâli, de l’école ou de l’atelier de Memling encore plutôt que de sa main
(au duc de Devonshire), nous offre les dispositions ordinaires qu’il a répétées à
satiété : la Vierge assise au centre, entre deux anges musiciens, dont l’un tend
souriant une pomme à l’Enfant; sainte Catherine et sainte Barbe de chaque côté,
présentant le donateur et la donatrice; les deux saint Jean sur les volets; saint
Antoine et saint Christophe en grisaille, dans des niches, au revers. Si l’on en croit
les recherches faites par M. Weale sur les personnages représentés, dont les écus
se voient aux chapiteaux des colonnes, l’œuvre aurait été peinte pour un seigneur
anglais, sir John Donne, et sa femme, entre 1461 et 1467, et serait par conséquent
de la jeunesse de Memling. Mais alors, comment la figure d’homme qui se montre
à gauche, par une ouverture, et paraît bien être le portrait du peintre, a-t-elle
l’air déjà si âgé? Tout est mystérieux en cette œuvre de fabrique banale. Encore
moins bonne, si c’est possible, et plus sûrement d’école est une Vierge assise avec
l’Enfant entre deux anges, à M^9 Stephenson Clarke.

Mais deux maîtres inconnus, tout à fait supérieurs, nous attirent, et vont nous
faire oublier les médiocrités qui les entourent. Ils sont le grand attrait de l'exposi-
tion; leurs tableaux sont de ceux auxquels on revient toujours. C’est d’abord
l’auteur d’un volet de triptyque ou plutôt de diptyque, représentant un prêtre ou
chanoine à mi-corps, sur un fond merveilleux de paysage, présenté par saint Victor
cuirassé, et bannière en main, à un" personnage sacré, sans doute une Vierge, qui
devait se trouver sur le volet disparu. La beauté énergique et mâle des figures, la
largeur vigoureuse de l’exécution, l’accent de puissant réalisme des détails autant
 
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