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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 9.1893

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Meissner, Franz Hermann: Arnold Boecklin, [1]: artistes contemporains
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312

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

incolores, ils ne pouvaient que déplaire à un jeune homme dont
l’œil recherchait d’instinct les effets les plus rares de la nature et
les revêtait des couleurs les plus fantastiques.

Aussi ne resta-t-il pas longtemps à Dusseldorf. Schirmer avait
éveillé en lui une vive curiosité pour l’œuvre des coloristes français
contemporains : il n’eut plus de pensée que de la connaître, et, dans
ce but, d’aller à Paris. Après un séjour à Bruxelles, où il copia
soigneusement les ouvrages des vieux maîtres, il vint à Paris en
1848, et fut témoin de la révolution de Février.

Il acquit, au spectacle de cette révolution, une expérience du
sang et de la mort qui devait être d’une importance considérable
pour le développement de son génie. Il y trouva en effet un puis-
sant aliment à son goût naturel de l’étrange, voire du tragique
et de l’horrible, goût dont il ne devait jamais cesser de donner la
preuve. Mais comme il était contraint à vivre du produit de son art,
et que personne, à Paris, dans ces temps troublés, ne se souciait
d’acheter de la peinture, il revint dans sa patrie. Et quand il s’y
fut acquitté de ses devoirs militaires, en 1850, il partit pour Rome;
ce fut la première fois qu’il visita cette Italie qui devait être désor-
mais la vraie patrie de son âme et où il devait passer une grande
partie de sa vie.

La mélancolique poésie de la Campagne romaine produisit tout de
suite sur lui une impression profonde et ineffaçable. A Rome, il se
trouva en relation avec un groupe d’artistes allemands devenus
fameux depuis, Dreher, Feuerbach, Reinhold Begas : il y rencontra
aussi des poètes et des littérateurs éminents, notamment Scheffel et
Heyse. C’est à ce dernier qu’il dut de faire la connaissance du comte
Paul Schack, ce généreux mécène des peintres allemands qui long-
temps le fit vivre en lui achetant et en lui commandant des tableaux
pour sa célèbre galerie de Munich.

Dans le même temps, Bœcklin accomplit un acte qui eut pour sa
carrière plus d’importance encore et qui donne bien la marque de sa
force de volonté, si l’on songe aux circonstances où il se trouvait.
Pauvre, sans espoir de rencontrer un amateur qui consentit à lui
acheter son étrange et déconcertante peinture, il épousa une jeune
fille aussi pauvre que lui, mais parfaitement belle, une Romaine,
dont on revoit souvent le portrait dans ses œuvres. Le mariage
de Bœcklin peut être considéré comme le symbole de son art, où
s’unissent d’un lien indissoluble et pour le plus grand charme des
yeux, la rêverie romantique allemande et la pure beauté antique.
 
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