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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 10.1893

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Lechat, Henri: Tanagra, [1]
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https://doi.org/10.11588/diglit.24663#0016
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10

GAZETTE UES BEAUX-AllTS.

de l’art tanagréen, qui, si nous les considérons du point de vue scien-
tifique, nous jettent dans le pire embarras. Au lieu de jouir bonne-
ment de leur charme, nous sommes obligés d’accumuler les explica-
tions, les théories; et nous ne sommes même pas assurés, à ce prix,
d’aboutir à des conclusions vraies. — Je tenais à en faire d’avance
l’aveu, afin qu’on ne s’imagine pas que les raisonnements qui vont
suivre causent à l’auteur une satisfaction sans mélange.

Il est à peu près certain, autant qu’on en peut juger aujourd’hui
en l’absence de tout renseignement des auteurs anciens, que les
Tanagréens du ive et du me siècle, lorsqu’ils déposaient dans la tombe
encore ouverte d’un mort ou sur cette tombe quelques figurines de
terre cuite, ne comprenaient pas bien le sens du rite qu’ils accom-
plissaient, et j’ajoute : ne se souciaient pas de le comprendre. Une
coutume, qui venait de loin dans le passé, leur avait été transmise;
ils la continuaient sans y réfléchir, sans lui demander sa raison
d’être; et ils devaient, à leur tour, la transmettre h La science
archéologique d’à présent est plus capable qu’ils ne l’étaient de dire
la cause foncière de leur acte; car elle peut remonter le cours de la
tradition quasi jusqu’à ses origines, et elle prouve que ces jolies
statuettes souriantes, d’une élégance si purement humaine et mon-
daine, ont remplacé les petites idoles des siècles antérieurs, images
de divinités que l’on enfouissait aux tombeaux pour que les pauvres
morts 11e fussent pas seuls dans la nuit souterraine, que la protection
divine demeurât sur eux, qu’ils eussent des guides, des appuis pen-
dant leur long voyage, plein d’horreur et de frissons, au royaume
infernal. Mais cette filiation, qu’il me parait nécessaire d’admettre,
explique seulement la présence des figurines dans la tombe; elle ne
résout pas, elle ne fait même que rendre plus délicate à résoudre la
difficulté principale, laquelle porte sur la nature de ces figurines.

1. Dans la Grèce d’aujourd’hui, quand on demande la raison de tel ou tel
usage populaire, on n’oblient souvent d’autre réponse que celle-ci : « ’Excrt exajxav o\
narépeç [xàç (nos pères faisaient comme cela) ». Cette réponse, qui n’apprencl rien,
est pourtant très caractéristique; c’est l'équivalent, en grec moderne, de la formule
si fréquente dans les décrets religieux des cités antiques : xaxà %'u Tràxpia (confor-
mément à la coutume des (ancêtres). Les exemples ne manquent pas de la persis-
tance de certains rites, funéraires ou autres, malgré que le sens exact en soit
oublié de ceux-là mêmes qui en conservent soigneusement la tradition. Ou peut
bien croire qu’il en était ainsi à Tanagre, au ive siècle, pour les figurines de terre
cuite offertes aux morts. Un curieux de ce temps-là, qui se fût enquis de la raison
de celte offrande, aurait dû se contenter, sans doute, de la réponse que j’ai dite
plus haut : « Ainsi faisaient nos pères. »
 
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