OEUVRES D’ART CONSERVÉES EN ESPAGNE.
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d’Autriche, le neveu de Philippe II, alors cardinal de Tolède, et la date 1592 avec
les mots : Johannes à Dotecum una cutn filio Baptista a Dotecum fecenmt.
Ce bel ensemble, malheureusement mal conservé, se complète par un encadre-
ment délicieux, dans le genre mauresque, auquel on recourait d’ordinaire pour
orner les clavecins de Ruchers. Il n’est point mentionné dans le grand ouvrage
de M. Nordenskiôld.
L’intervention des Flamands dans les choses de l’art et de l'industrie se
constate presque à chaque pas que l'on fait en Espagne. Si, d’une part, les archi-
tectes et les sculpteurs néerlandais concourent à l’édification et à l’embellissement
des cathédrales, de l’autre les orfèvres, les ciseleurs, les fondeurs, les incrusteurs,
sont mis en constante réquisition par les monarques espagnols.
La plus belle des pièces d’artillerie exposées à Madrid par le Ministère de la
Guerre, portait les mots : Hans Poppenrieder had michgossen. Ano Dni M. D.XYL.
Ce Poppenruyter, un Malinois, dont probablement Albert Durer a figuré l'atelier
dans sa fameuse estampe, n’était pas seulement un fondeur habile, il était aussi
un homme de grand goût si l’on en juge par cette pièce. De son vrai nom, il
s’appelait Neumerckt. Le lieutenant général Henrard, dans ses Fondeurs d'Artillerie,
le désigne comme ayant été au service de l’empereur de 1490 à 1534 et comme le
principal représentant de son art en Europe.
Sur un astrolabe de cuivre, superbement travaillé, nous relevons l’inscription
Philippo Rege — Gualterius Arsenius Gemmœ Frisa nepos, Lovanii 1566.
M. Van Even, le savant archiviste, a fait pour nous d’infructueuses recherches
à Louvain, touchant ce neveu de Gemma Frisius, un des plus grands astronomes
de son temps.
Sur le pied du magnifique lutrin de cuivre du chœur supérieur de l’Escurial,
pièce déjà fameuse au xvie siècle, nous retrouvons l’adresse d’un Anversois : Hedio
en Anveres por Juan Simons Flandrero, aho 1571. Ce Simons fit partie de la Gilde
de Saint-Luc, à Anvers, dès l’année 1547, en qualité de sculpteur et de fondeur en
cuivre. On doit connaître d’autres travaux de sa main.
L’Escurial a conservé un vaste ensemble de peintures de toutes les écoles, et
sa bibliothèque, qui fut originairement celle de Philippe II, est riche en estampes.
Personne n’ignore que c’est à l’Escurial que se rencontrent les principales
productions de Jerome Bosch, notamment le Portement de la Croix, à juste titre
envisagé comme son chef-d’œuvre, et, dans la salle dite des ambassadeurs de
Philippe II, — cabinet d’une simplicité presque monacale, — ce curieux tableau
rond, dit des Péchés capitaux, déjà signalé par Van Mander comme une des pages
capitales du maître et dès lors occupant son emplacement actuel.
Mentionner La Robe de Joseph apportée ci Jacob, c’est citer une des principales
créations de Velasquez, peinture datant, comme le Vulcain, du Prado, du premier
séjour de son auteur à Rome.
De même qu’à Munich on délaisse la Galerie de Schleissheim pour la Pinaco-
thèque, de même, en Espagne, l'Escurial n’est visité que très accessoirement pour
ses peintures, dont plusieurs, cependant, restent importantes en dépit des splen-
deurs du Prado. On a pu lire ailleurs la méprise de quelques critiques, touchant
la Descente de Croix, de Roger Vander Weyden. L’Escurial, en somme, contient un
millier de peintures, dont plusieurs suffiraient à motiver le voyage, assez court
d’ailleurs, qui sépare la capitale de l’austère mais grandiose résidence de Philippe IL
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d’Autriche, le neveu de Philippe II, alors cardinal de Tolède, et la date 1592 avec
les mots : Johannes à Dotecum una cutn filio Baptista a Dotecum fecenmt.
Ce bel ensemble, malheureusement mal conservé, se complète par un encadre-
ment délicieux, dans le genre mauresque, auquel on recourait d’ordinaire pour
orner les clavecins de Ruchers. Il n’est point mentionné dans le grand ouvrage
de M. Nordenskiôld.
L’intervention des Flamands dans les choses de l’art et de l'industrie se
constate presque à chaque pas que l'on fait en Espagne. Si, d’une part, les archi-
tectes et les sculpteurs néerlandais concourent à l’édification et à l’embellissement
des cathédrales, de l’autre les orfèvres, les ciseleurs, les fondeurs, les incrusteurs,
sont mis en constante réquisition par les monarques espagnols.
La plus belle des pièces d’artillerie exposées à Madrid par le Ministère de la
Guerre, portait les mots : Hans Poppenrieder had michgossen. Ano Dni M. D.XYL.
Ce Poppenruyter, un Malinois, dont probablement Albert Durer a figuré l'atelier
dans sa fameuse estampe, n’était pas seulement un fondeur habile, il était aussi
un homme de grand goût si l’on en juge par cette pièce. De son vrai nom, il
s’appelait Neumerckt. Le lieutenant général Henrard, dans ses Fondeurs d'Artillerie,
le désigne comme ayant été au service de l’empereur de 1490 à 1534 et comme le
principal représentant de son art en Europe.
Sur un astrolabe de cuivre, superbement travaillé, nous relevons l’inscription
Philippo Rege — Gualterius Arsenius Gemmœ Frisa nepos, Lovanii 1566.
M. Van Even, le savant archiviste, a fait pour nous d’infructueuses recherches
à Louvain, touchant ce neveu de Gemma Frisius, un des plus grands astronomes
de son temps.
Sur le pied du magnifique lutrin de cuivre du chœur supérieur de l’Escurial,
pièce déjà fameuse au xvie siècle, nous retrouvons l’adresse d’un Anversois : Hedio
en Anveres por Juan Simons Flandrero, aho 1571. Ce Simons fit partie de la Gilde
de Saint-Luc, à Anvers, dès l’année 1547, en qualité de sculpteur et de fondeur en
cuivre. On doit connaître d’autres travaux de sa main.
L’Escurial a conservé un vaste ensemble de peintures de toutes les écoles, et
sa bibliothèque, qui fut originairement celle de Philippe II, est riche en estampes.
Personne n’ignore que c’est à l’Escurial que se rencontrent les principales
productions de Jerome Bosch, notamment le Portement de la Croix, à juste titre
envisagé comme son chef-d’œuvre, et, dans la salle dite des ambassadeurs de
Philippe II, — cabinet d’une simplicité presque monacale, — ce curieux tableau
rond, dit des Péchés capitaux, déjà signalé par Van Mander comme une des pages
capitales du maître et dès lors occupant son emplacement actuel.
Mentionner La Robe de Joseph apportée ci Jacob, c’est citer une des principales
créations de Velasquez, peinture datant, comme le Vulcain, du Prado, du premier
séjour de son auteur à Rome.
De même qu’à Munich on délaisse la Galerie de Schleissheim pour la Pinaco-
thèque, de même, en Espagne, l'Escurial n’est visité que très accessoirement pour
ses peintures, dont plusieurs, cependant, restent importantes en dépit des splen-
deurs du Prado. On a pu lire ailleurs la méprise de quelques critiques, touchant
la Descente de Croix, de Roger Vander Weyden. L’Escurial, en somme, contient un
millier de peintures, dont plusieurs suffiraient à motiver le voyage, assez court
d’ailleurs, qui sépare la capitale de l’austère mais grandiose résidence de Philippe IL