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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 12.1894

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Nr. 3
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Lostalot, Alfred de: Le Musée du Prado, [9], L'école espagnole, 1: les musées de Madrid
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https://doi.org/10.11588/diglit.24665#0259

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24C

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

Fray Juan Rizi(1595-1675), l’aîné des fils d’Antonio Ricci, àquisa
réputation de peintre valut une mitre d’évêque, était, parait-il, mieux
outillé : on vante son naturalisme de bon aloi et la correction de
son dessin, mais il est difficile d’en juger par le Saint François d'Assise
qu’on voit de lui au Prado, et qui, d’ailleurs, n'est peut-être pas de sa
main. Fray Juan, lui aussi, écrivit un livre sur la peinture; c’est la
manie de l’époque en Espagne, et les meilleurs peintres n’y sont pas
ceux qui écrivent.

Eugenio Caxes (1577-1642), fils du Florentin Patrizio Cajesi qui
entra au service de Philippe II vers 1567, a passé toute sa vie en
Espagne; il appartient en propre à l’Ecole de Madrid, et c’est d’elle
qu’il tient l’énergie un peu sauvage dont est imprégnée sa grande
composition du Prado : Tentative de débarquement des Anglais en 1625.
Il a fait plusieurs fois le portrait de Philippe IV : il ne fallut rien
moins que la venue de Velâzquez, pour lui enlever la faveur royale :
les étoiles rentrent dans l’ombre aux premiers rayons du soleil.

Parmi les peintres étrangers que les grands travaux décoratifs
entrepris à l’Escurial, au Pardo et à l’Alcazar de Madrid, firent venir
en Espagne, il en est un qui se distingue par une originalité bien
tranchée, c’est le Crétois Domenico Theocopuli (1548-1625), plus connu
sous le sobriquet familier de El Greco que les Italiens lui ont donné
et qu’il a conservé. Le Gx’eco venait en effet d'Italie, comme les autres,
et c’est à Venise qu’il fit son éducation dans les trois arts de la pein-
ture, de la sculpture et de l’architecture. On a beaucoup écrit, à
propos de cet artiste singulier, et l’accord est loin d’être fait sur la
portée de son talent et sur les raisons qui l’ont amené, sur le tard, à
brûler les dieux qu’il avait encensés et dont il avait obtenu toutes les
faveurs. C’est en effet, après avoir pratiqué avec talent et avec succès
la manière vénitienne, au point qu’on l’a comparé, en Espagne, à
Titien lui-même, que tout à coup il change de système; sa pein-
ture grasse, haut montée en couleurs généreuses, s’amaigrit subi-
tement et revêt des.teintes presque cadavériques; il souligne d’un
dessin dur et sommaire de tristes figures au teint blême à peine
rehaussé de quelques filets d’ocre et de vermillon. Les historiens de
l’art ont voulu voir dans cette étrange évolution de l’artiste, une
marque de folie; aujourd’hui nous sommes tentés de chercher une
autre explication, et ce fou nous apparaît un être profondément
raisonnable qui n’avait peut-être pas toute l’éloquence qu’il eût fallu
pour faire accepter des idées hardies et nouvelles germées dans son
■cerveau. Le Greco nous offre le premier exemple d’un artiste très
 
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