Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 23.1900

DOI issue:
Nr. 1
DOI article:
Gauthiez, Pierre: Notes sur Bernardino Luini, [3]
DOI Page / Citation link:
https://doi.org/10.11588/diglit.24720#0043
Overview
Facsimile
0.5
1 cm
facsimile
Scroll
OCR fulltext
34

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

Catherine décapitée ; mais la lumière qui les baigne montre assez
les mêmes moyens, si simples dans leur certitude; jamais pâte plus
ferme et plus suave ne servit à modeler images plus délicates. Et
comme si toutes les créations laissées par Luini dans ce monastère
devaient former un chœur de beautés égales, dans ce même ora-
toire, une sainte à demi nue offrant sa gorge adorable, deux autres
saintes en habits ondoyants, sous les scènes d’histoire contempo-
raine, et, derrière le mur qui ferme cette partie de l’église, des
femmes encore, à la fois diverses et pareilles par l’attitude et par le
charme, font une couronne céleste. On quitte, on revient, on s’ap-
proche longuement, pour mieux admirer les détails, après s’être
longtemps placé à l’écart, devant les ensembles. Longtemps? le
temps ne compte pas, l’heure s’en va sans qu’on le sache. Il faut la
mort de la lumière pour avertir, dans cette église où l’on est tou-
jours seul. On surprend de près, peu à peu, le secret de ce maître.
La manière se révèle, sa technique apparaît; morceaux joyeux,
brossés de verve en une journée, ou bien patientes reprises du bon
ouvrier qui retrouvera toutes les libertés, demain, pour un torse,
une draperie, une épaule, mais qui s’attache, s’il le faut, dans un
visage, dans un habit, aux plus minutieux détails. On croit, tant sa
touche est vivante et franche, avoir vu comment il peignait.

Il semble bien, en somme, que Luini, frescante avant tout, ait
suivi dans ses fresques des procédés faciles à pénétrer. Quand on le
copie, ils apparaissent : d'abord, c’est une touche très forte, à l’aide
d’instruments rigides, de brosses dures, longues, mais étroites ; il
modèle en plein, surtout les chairs, par des empâtements hardis,
menés strictement dans le sens du mouvement et qui donnent tout
l’essentiel ; des lumières prises dans les tons les plus fins et les plus
fluides, les gris argent, les roses pâles, les bleus lilas viennent ensuite
se jouer sur des ombres d’ocre intense et de violâtre foncé. Puis
intervient un travail très fini,qui reprend, repasse, toujours expressif,
parce qu’il va se jouer sur des fonds puissants. Enfin, par la retouche
à sec, avec des brosses très légères, dans une virtuosité prodigieuse
il va répandre une fantaisie d’ornements sur les robes, un friselis de
rayons sur les chevelures, un brillant de traits sur les corps et les
visages; la dernière fleur est mise, qui s’est conservée à miracle en
cette œuvre-ci.

Dernier enseignement donné par le Monastero Maggiore : c’est
ici que se trouvait la fresque à l’huile peinte d’après le procédé pré-
conisé par Léonard el qui ruina le Cenacolo; cette fois, Bernardino
 
Annotationen