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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
Il entrevoit des monts difformes,
Des Ossas et des Pélions,
A travers les songes énormes
Que peuvent faire les lions.
Voici de Gautier un couple de l'iottom et Titania qui appartient
à M. Paul Meurice, de même que ce Phare du xvire siècle, croulant
sur ses assises, et cet amas de burgs baignant dans un fleuve inconnu,
dont la bordure tailladée et peinte d’arabesques par le maître porte
une dédicace commémorative de l’hospitalité que Victor Hugo reçut
avenue Frochot au retour de l’exil.
D'ici à quelques mois, tous ces cadres seront décrochés et ren-
voyés à leurs possesseurs officiels ou particuliers. Leur réunion
éphémère ne suggérera-t-elle pas à un éditeur intelligent l’idée de
faire dans nos musées de province un choix de leurs plus beaux
dessins, reproduits par des procédés sûrs et commentés d’un texte
précis et bref? Ne se trouvera-t-il pas surtout une salle au Louvre
pour tous les maîtres qui n’y ont pas encore accès? Achille Devéria,
Daumier, Henry Monnier, Alfred et Tony Johannot, François Bon-
hommé, François Bonvin, Adolphe Hervier, Alfred Dehodencq,
Charles Méryon, Octave Tassaert, Guillaume Bégamey ont accompli
— presque tous depuis longtemps, hélas ! — le stage imposé par
une réglementation prudente, et il n’y a plus à leur marchander
une place que la plupart d’entre eux ont conquise au prix du plus
acharné labeur et des plus cruelles angoisses.
Si, à l’aurore du siècle naissant, notre premier musée n’a pas un
pan de mur pour tous ces artistes qui ont porté au loin le renom de
la France moderne, nous pourrons continuer à nous affliger, mais
nous ne devrons pas être surpris de voir leurs chefs-d’œuvre traver-
ser l’Océan, sans espoir de retour, et nous aurons à rougir une fois
de plus de notre traditionnelle indifférence et de notre incurable
ingratitude.
MAURICE TOURKEUX
GAZETTE DES BEAUX-ARTS
Il entrevoit des monts difformes,
Des Ossas et des Pélions,
A travers les songes énormes
Que peuvent faire les lions.
Voici de Gautier un couple de l'iottom et Titania qui appartient
à M. Paul Meurice, de même que ce Phare du xvire siècle, croulant
sur ses assises, et cet amas de burgs baignant dans un fleuve inconnu,
dont la bordure tailladée et peinte d’arabesques par le maître porte
une dédicace commémorative de l’hospitalité que Victor Hugo reçut
avenue Frochot au retour de l’exil.
D'ici à quelques mois, tous ces cadres seront décrochés et ren-
voyés à leurs possesseurs officiels ou particuliers. Leur réunion
éphémère ne suggérera-t-elle pas à un éditeur intelligent l’idée de
faire dans nos musées de province un choix de leurs plus beaux
dessins, reproduits par des procédés sûrs et commentés d’un texte
précis et bref? Ne se trouvera-t-il pas surtout une salle au Louvre
pour tous les maîtres qui n’y ont pas encore accès? Achille Devéria,
Daumier, Henry Monnier, Alfred et Tony Johannot, François Bon-
hommé, François Bonvin, Adolphe Hervier, Alfred Dehodencq,
Charles Méryon, Octave Tassaert, Guillaume Bégamey ont accompli
— presque tous depuis longtemps, hélas ! — le stage imposé par
une réglementation prudente, et il n’y a plus à leur marchander
une place que la plupart d’entre eux ont conquise au prix du plus
acharné labeur et des plus cruelles angoisses.
Si, à l’aurore du siècle naissant, notre premier musée n’a pas un
pan de mur pour tous ces artistes qui ont porté au loin le renom de
la France moderne, nous pourrons continuer à nous affliger, mais
nous ne devrons pas être surpris de voir leurs chefs-d’œuvre traver-
ser l’Océan, sans espoir de retour, et nous aurons à rougir une fois
de plus de notre traditionnelle indifférence et de notre incurable
ingratitude.
MAURICE TOURKEUX