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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 31.1904

DOI issue:
Nr. 5
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Mâle, Emile: Le renouvellement de l'art par les "mystères"à la fin du Moyen Âge, 4
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https://doi.org/10.11588/diglit.24813#0433
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380

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

toire pour prier Dieu ». Et Gréban, plus explicite encore, fait (lire à
la Vierge avant l’Annonciation :

Voicy chambrette belle et gente
Pour Dieu mon créateur servir,

Et pour sa grâce desservir.

Je voudray lire mon psaultier,

Psaume après autre tout entier1.

Voilà pourquoi les maîtres du xve siècle placent l’Annonciation
dans le décor d’une petite cellule de béguine, où le vieux buffet
brille doucement, où reluit le lustre de cuivre. Parfois la petite
chambre se transforme en chapelle. Fouquet, convaincu que l'ora-
toire de la Vierge avait dû égaler en beauté celui de nos rois, donne
à l’Annonciation le cadre charmant de la Sainte-Chapelle du Palais2.

Dans la scène de la Nativité, nous avons déjà signalé la clôture
tressée qui protège la crèche. Mais, en outre, il me paraît évident que
le toit léger porté par quatre poteaux, qui dès le xive siècle abrite
la Sainte Famille, est un décor de théâtre.

Un autre détail mérite encore d’attirer l’attention. Dès les pre-
mières années du xve siècle, il est rare que saint Joseph, au moment
où il s’agenouille devant le nouveau-né, ne tienne à la main une chan-
delle. Presque toujours il fait le geste de protéger la flamme contre le
vent, à moins qu’il n’ait pris la précaution d’enfermer la chandelle
dans une lanterne. Rien n’est plus étonnant, une fois qu’on a remar-
qué ce détail, de le rencontrer toujours le même, dans un vitrail
normand de Verneuil, dans un triptyque flamand de Rogier van der
Weyden, dans un tableau allemand de Herlin, dans mille autres
œuvres dispersées à travers toute l’Europe. Au temps où je n’avais
pas encore songé à expliquer l’iconographie du xv° siècle par les
Mystères, j’étais fort surpris d’une telle unanimité, dont je ne
savais comment rendre raison. Au fond, rien n’est plus simple. Il
était certainement de tradition, au théâtre, de représenter saint
Joseph une chandelle à la main, au moment de la Nativité3.
C’était une façon naïve de faire entendre que la scène se passait la

1. Gréban, v. 3431 et suiv,

2. Heures d’Étienne Chevalier. La Sainte-Chapelle n’est pas reproduite avec une
exactitude parfaite. — La Vierge apparaît assise dans une chambre et lisant
devant un pupitre dès 1360 ou 1365 dans le Bréviaire de Charles V, f° 352. Au
commencement du xve siècle, on la voit dans une église, B. N.,ms. lat. 9473, f°17
et lat. 13264 f° 50 v°.

3. Les textes que nous connaissons sont muets; mais les textes ne disent pas
tout.
 
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