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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 35.1906

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Nr. 5
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Jamot, Paul: Les salons de 1906, 1, La peinture à la Société nationale des Beaux-Arts
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https://doi.org/10.11588/diglit.24817#0396

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GAZETTE DES BEAUX-AIITS

s’amuse à des exercices inaccoutumés pour faire montre de sa faci-
lité ou qui, sans trop savoir où il veut aller, se livre aux caprices
d’une humeur fantasque. Je crois que M. Gottet sait très bien ce
qu’il veut et qu’il a parfaitement raison de le vouloir.

Ses trois figures ne sont imitées de personne : ce n’est ni du
Blanche, comme certains affectaient de le craindre, ni du Zuloaga,
comme d’autres le diront peut-être. S’il y a dans cette peinture quel-
que affinité espagnole, elle est infiniment plus lointaine et, par suite,
plus honorable; et, si l’artiste a subi une influence, ce n’est pas à
Paris, chez un de ses confrères, mais quand il voyageait naguère
à travers l’Espagne et qu’il visitait le musée du Prado.

La meilleure peut-être et, certainement, la plus séduisante des
trois est la femme en rohe et gants marron, au visage clair et animé,
qui sourit, abritée sous un amusant chapeau cabossé qu’éclaire, dans
les cheveux bruns, une fleur d’un rose vif. L’arrangement très simple
esl d’un goût parfait, de même que l’harmonie brillante en noir, brun
et rose. L’une des deux autres me paraît un peu « enterrée », le visage
étant d’une tonalité grisâtre trop pareille, peut-être, à celle du fond.
Mais même ici, le grand chapeau de paille à ruban noir, tenu par la
main abaissée, fait dans l’ombre, avec la jupe noire rayée de blanc, une
bien jolie « nature morte ». La troisième, la figure de profil, coiffée
d’un grand chapeau de paille jaune, est une excellente peinture, pleine
de force et de distinction, où le blanc atténué du corsage de mousseline,
le gris beige de la jupe et la grisaille noire et blanche du châle que
la jeune femme a laissé glisser de ses épaules, composent avec les gris
verdâtres du fond une harmonie line, discrète et cependant colorée.
M. Gottet n’a pas changé son esprit ni sa manière; il a seulement
appliqué à un autre objet son goût, sa vision personnelle, ses qualités
de coloriste et d’harmoniste dans la gamme sombre. Je suis persuadé
que cette nouvelle ambition convient aussi bien à son talent que
le paysage ou les êtres primitifs dont la vie n’est pas très supé-
rieure à celle des pierres de leur pays. 11 nous montre qu’il peut, lui
aussi, comprendre et rendre à sa façon la femme moderne, sans
mièvrerie, avec une certaine âpreté qui ne manque pas de saveur
et qui le gardera des fades virtuosités où sont conduits, pour satis-
faire l’esthétique de leurs modèles, tant de peintres de la femme.
Cette recherche et cette intelligence du caractère, qui se marquaient
dans ses paysages et que nous notions particulièrement dans ses
«portraits» de villes ou de vieilles masures, lui servira grandement
dans la voie nouvelle où il entre.
 
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