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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 5. Pér. 1.1920

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Nr. 6
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Bricon, Étienne: Les Salons de 1920, 2, La Société des Artistes Français
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https://doi.org/10.11588/diglit.24918#0431
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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

président de la Société, M. Laloux, sans réserves, et, avec lui, M. Gormon
et M. Gardet, qui ont assujetti leur maîtrise à placer en bel ordre de bataille
tant de choses peintes ou sculptées. Mais quel qu’ait été leur effort et quel que
soit leur succès, il n’en reste pas moins que ce magasin bien rangé est un
bazar, et ce par l’unique présence d’œuvres de pure niaiserie, inutiles et
vides, qu'il est nécessaire d’écarter, non seulement pour leur inexistence,
mais pour le tort surtout qu elles font aux autres en lassant les yeux et en
dégoûtant l’esprit, —j ’entends en lui faisant perdre le goût des peintres et des
sculpteurs.

L’œuvre d’art ne se façonne point avec des habitudes d’écolier non plus
qu’avec des recettes de ménagère. Il lui faut un souffle, qu’il soit de fantaisie
ou de passion, et sans lui elle n’existe point. Elle ne craint les maladresses
ni les défaillances, qui sont phénomènes courants d’humanité, mais unique-
ment l’absence de vie. Vous pourrez compter au Salon de peinture cinq cents
tableaux — les peintres en comptent même davantage — frappés de ce
non-être. Exécutés adroitement ou maladroitement, ce qui n’importe guère,
ils n’expriment rien, ils n’inspirent rien ; ils sont un poids mort qui pèse
sur les autres et, loin de les faire valoir, les déconsidère. La beauté majore
la beauté. L’exemple en éclate à la Tribune des Offices comme au
Salon carré du Louvre : ce n’est qu’entre médiocres que l’on redoute les voi-
sinages.

Est-il très difficile d’éliminer ces non-valeurs? Oui, très difficile; mais il
le faut: cherchez-en les moyens. Je frappe à la porte en ami: au nom des
grands principes de Louis XIV et de la Révolution, ne laissez pas le Salon
mourir. Vous suivez des errements séculaires et vous êtes à la fois nourris de
préjugés démocratiques ; elles uns et les autres font que le nombre vous tente
et vous domine. Car vous avez pour origine l’Académie : qui dit académie
dit école, qui dit école dit élèves, et, comme les mauvais tiennent autant de
place que les bons, les maîtres n ont pas toujours la sagesse de ne les point
multiplier, et tout finit par des suffrages. Et vous êtes rongés par vos « hors
concours » et vos « exempts », qui viennent à l’heure habituelle s’accrocher
au mur sans inquiétude, ainsi que Ton se rend à son bureau.

L’heure ne sonne-t-elle pas de l’abolition d’aussi malsains privilèges? Faites
la nuit du 4 août à votre tour. Ne quitterez-vous pas volontiers ces pauvres
titres de carton qui vous font ressembler à des enfants, et auxquels ne
peuvent tenir que ceux d’entre vous qui, vivant de médiocrité, n’ont pas
confiance en leur force? Personne devant le jury — ou tout le monde: un
jury ouvert portes et fenêtres à toutes les tendances, composé d’éléments
multiples, devant qui passeront des œuvres sans signature dans la probité de
leur anonymat. Ce que deviendront les refusés? Si c’est le jury qui se trompe,
 
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