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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
cule, ne donneront jamais l’expression véritable que l’on voit à l'écran. Une
photographie est un cadavre sous le scalpel, tandis que le film est l’être
vivant et pensant. Nous devons, à ce propos, nous excuser de ne pouvoir
reproduire ici, pour servir d’illustration à cet exposé rapide, qu’une série
de photographies belles et curieuses, mais inanimées : si l’on pouvait les
confondre avec les tableaux mouvants auxquels elles sont empruntées, nous
aboutirions à la négation absolue de l’art cinégraphique et notre dessein
serait bien mal réalisé.
Le mouvement, au cinéma, résulte non seulement de la modification des
Film Gaumont.
SCÈNE DE « L’HOMME DU LARGE », DE M. MARCEL L’HERBIER
(M. ROGER KARL ET M . JAQUE-CATELAIN)
images dans chacun des tableaux, mais encore delà succession des tableaux
eux-mêmes, qui est soumise, elle aussi, à la volonté de l’auteur du film. En
réglant l’ordre des vues et leur durée relative, par l’opération appelée
« découpage », le cinégraphiste agit directement sur l’esprit et la sensibilité
du spectateur. C’est un autre grand secret de l’art muet. Pour obtenir
l’effet cherché, le cinégraphiste compose son poème avec des images animées,
comme le poète bâtit son œuvre avec des mots, le musicien avec des sons,
le peintre avec des couleurs ; et les mêmes lois universelles de mouvement,
d’équilibre et de sacrifice qui régissent tous les arts s’imposent au laiseur de
GAZETTE DES BEAUX-ARTS
cule, ne donneront jamais l’expression véritable que l’on voit à l'écran. Une
photographie est un cadavre sous le scalpel, tandis que le film est l’être
vivant et pensant. Nous devons, à ce propos, nous excuser de ne pouvoir
reproduire ici, pour servir d’illustration à cet exposé rapide, qu’une série
de photographies belles et curieuses, mais inanimées : si l’on pouvait les
confondre avec les tableaux mouvants auxquels elles sont empruntées, nous
aboutirions à la négation absolue de l’art cinégraphique et notre dessein
serait bien mal réalisé.
Le mouvement, au cinéma, résulte non seulement de la modification des
Film Gaumont.
SCÈNE DE « L’HOMME DU LARGE », DE M. MARCEL L’HERBIER
(M. ROGER KARL ET M . JAQUE-CATELAIN)
images dans chacun des tableaux, mais encore delà succession des tableaux
eux-mêmes, qui est soumise, elle aussi, à la volonté de l’auteur du film. En
réglant l’ordre des vues et leur durée relative, par l’opération appelée
« découpage », le cinégraphiste agit directement sur l’esprit et la sensibilité
du spectateur. C’est un autre grand secret de l’art muet. Pour obtenir
l’effet cherché, le cinégraphiste compose son poème avec des images animées,
comme le poète bâtit son œuvre avec des mots, le musicien avec des sons,
le peintre avec des couleurs ; et les mêmes lois universelles de mouvement,
d’équilibre et de sacrifice qui régissent tous les arts s’imposent au laiseur de