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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
le chirurgien Depage, peinture habile, dont le seid défaut est une certaine
absence de profondeur et qui ordonne les personnages à la manière d’un
haut-relief.
Trois cent quatre-vingts tableaux seulement nous sollicitent à la Société
nationale. Depuis le malheureux schisme de 1923, elle se meurt de
consomption et les quelques artistes qui lui demeurent fidèles apparaissent
pour la plupart aussi académiques que leurs confrères du Salon voisin. Les
étrangers encore assez nombreux en constituent le principal attrait.
Le grand tableau de Guinery, Avenue du Bois, de même que la petite scène
de Pinchon, Le Goûter, où s'aligne devant un beau décor de théâtre une
société distinguée et bien vêtue que rejoignent quelques cavaliers, sont des
oeuvres très proches l’une de l'autre par leur préoccupation dominante de
peinture élégante. Dans Le Balcon, Desurmont reprend avec une certaine
vigueur un sujet bien des tois traité depuis Manet jusqu’à Yves Alix. Des
figures endormies dans les entrailles de la terre se préparent à sortir de leur
sommeil hivernal et à suivre le Printemps qui, déjà, cueille les premières
fleurs, accompagné d'un personnage énigmatique : c'est Le Réveil de la Terre,
de Mlle Chaplin et c’est de la mauvaise peinture littéraire. Antoni évoque en
un style d’affiche Calypso seule en face de la mer. Maternité, du même
artiste, traduit mieux, semble-t-il, avec une plus grande liberté, un tempé-
rament porté vers des accords très haussés. Raphaël Delorme étale des
couleurs fades et minces pour représenter un sujet fort abstrait : Synchro-
nisme, dont je ne me risque pas à donner le commentaire. Enfin dans
Amphitrite, Paul Bret déploie sans mesure toute une figuration mytho-
logique.
Les paysages et les portraits valent mieux que ces compositions plus ou
moins décoratives, symboliques ou réalistes. Claude Rameau nous donne de
la Loire une interprétation parfaite de justesse, de grandeur et de calme,
dans une excellente tradition classique rajeunie. Son art vise à une généra-
lisation n’excluant ni la sensibilité ni l’émotion. (Soir d’Octobre ; Le Hameau
des Girarmes.) Inguimberty évoque avec une largeur de fresque la sortie
d’un paquebot du port de Marseille et peint à une échelle trop réduite une
vue d’Athènes dont l’intérêt s’éparpille. De Castro affirme chaque année
davantage sa maîtrise. Son Port d’Anvers, solidement composé, joue dans
de fines harmonies. L’àpreté de David-Nillet, sa sincérité dépouillée de toute
rhétorique se retrouvent aussi bien dans sa Cour de ferme, que dans son
Jardin du Couvent, d’une poésie discrète et qui se dissimule. Dans son grand
GAZETTE DES BEAUX-ARTS
le chirurgien Depage, peinture habile, dont le seid défaut est une certaine
absence de profondeur et qui ordonne les personnages à la manière d’un
haut-relief.
Trois cent quatre-vingts tableaux seulement nous sollicitent à la Société
nationale. Depuis le malheureux schisme de 1923, elle se meurt de
consomption et les quelques artistes qui lui demeurent fidèles apparaissent
pour la plupart aussi académiques que leurs confrères du Salon voisin. Les
étrangers encore assez nombreux en constituent le principal attrait.
Le grand tableau de Guinery, Avenue du Bois, de même que la petite scène
de Pinchon, Le Goûter, où s'aligne devant un beau décor de théâtre une
société distinguée et bien vêtue que rejoignent quelques cavaliers, sont des
oeuvres très proches l’une de l'autre par leur préoccupation dominante de
peinture élégante. Dans Le Balcon, Desurmont reprend avec une certaine
vigueur un sujet bien des tois traité depuis Manet jusqu’à Yves Alix. Des
figures endormies dans les entrailles de la terre se préparent à sortir de leur
sommeil hivernal et à suivre le Printemps qui, déjà, cueille les premières
fleurs, accompagné d'un personnage énigmatique : c'est Le Réveil de la Terre,
de Mlle Chaplin et c’est de la mauvaise peinture littéraire. Antoni évoque en
un style d’affiche Calypso seule en face de la mer. Maternité, du même
artiste, traduit mieux, semble-t-il, avec une plus grande liberté, un tempé-
rament porté vers des accords très haussés. Raphaël Delorme étale des
couleurs fades et minces pour représenter un sujet fort abstrait : Synchro-
nisme, dont je ne me risque pas à donner le commentaire. Enfin dans
Amphitrite, Paul Bret déploie sans mesure toute une figuration mytho-
logique.
Les paysages et les portraits valent mieux que ces compositions plus ou
moins décoratives, symboliques ou réalistes. Claude Rameau nous donne de
la Loire une interprétation parfaite de justesse, de grandeur et de calme,
dans une excellente tradition classique rajeunie. Son art vise à une généra-
lisation n’excluant ni la sensibilité ni l’émotion. (Soir d’Octobre ; Le Hameau
des Girarmes.) Inguimberty évoque avec une largeur de fresque la sortie
d’un paquebot du port de Marseille et peint à une échelle trop réduite une
vue d’Athènes dont l’intérêt s’éparpille. De Castro affirme chaque année
davantage sa maîtrise. Son Port d’Anvers, solidement composé, joue dans
de fines harmonies. L’àpreté de David-Nillet, sa sincérité dépouillée de toute
rhétorique se retrouvent aussi bien dans sa Cour de ferme, que dans son
Jardin du Couvent, d’une poésie discrète et qui se dissimule. Dans son grand