Bartsch, Adam von [Hrsg.]; Gersaint, Edme François [Hrsg.]: Catalogue raisonné de toutes les estampes qui forment l'oeuvre de Rembrandt et ceux de ses principaux imitateurs (Paris, 1880)

XXII

ESSAI SUR LA VIE

rester. Ces artifices lui réussirent, on s'empres-
soit à acheter ses estampes à quelque prix que
ce fut. Plus il gagnoit, plus la soif de for s'aug-
mentoit en lui. Ce vice qui ne s'affoiblit jamais
avec l'âge, vint au point, qu'il faisoit vendre ses
estampes par son fils, comme si celui-ci les lui
eut dérobées. Quelquefois il les exposoit dans
les ventes publiques, où il alloit lui-même jouer
le rôle d'enchérisseur, pour en faire hausser le
prix. Par un raffinement d'avarice jusqu'alors
inconnu, Rembrandt ht imprimer ses gravures à
moitié terminées, et n'en débita que quelques
épreuves, conservant soigneusement le reste. Il
hnissoit ensuite, et donnoit par ce moyen un plus
haut dégré de rareté aux premières épreuves
tirées des planches avant qu'elles fussent terminées.
De même il y faisoit des changemens à plusieurs
reprises, uniquement dans la vue de faire valoir
les épreuves antérieures un dégré de plus que
les postérieures, et pour forcer les curieux qui
étoient avides de compléter son oeuvre, d'acheter
le plus grand nombre possible de ses estampes.
Tandis qu'il amassoit ainsi des richesses, il
vivoit toujours dans la plus grande œconomie, et
suivant ses repas n'étoient composés
que d'un hareng salé, ou d'un morceau de
fromage.