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Le Grelot: journal illustré, politique et satirique — 1.1871

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https://doi.org/10.11588/diglit.3249#0138
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— En vérité, monseigneur n'igore rien. Loin de Paris vous
files plus. Parisien que moi. (// noie sur son carnet : Mon roi est
étonnant, il sait tout.)

Monseigneur. Combien j'aime toute votre rédaction : le duc
Magnard, le vidame de lilavel, Gaultier d'Aulnay. Ce n'est pas
celui de ta Tour de Nés!??

Villemessant. Ah! un trait, monseigneur.

__Oui, j'en fais maintenant comme cela à la douzaine. C'est

depuis que je m'adonne a la lecture du Figaro. Ah ! vous avez
surtout un rédacteur bien amusant.

_ Villemot, il est mort.

__Non, c'est Xaxier E.yma. Dites donc, il me semble qu'il

était bonapartiste autrefois.

_ Oh! il ne l'est plus.

— Alors, le bonapartiste, c'était V'x-Eyma.

— Encore un mot, monseigneur. (Il prend note.'} Charmant !
Monseigneur. Oui; la faute en est à. votre Figaro. Il va bien

le journal.

Villemessant. Couoi çouça. Monseigneur me permet-il une
figure?

__Deux, si cela peut servir notre cause.

__Eh bien : une lampe baisse quand elle manque d'huile ;

ina lampe à moi a besoin d'huile.

— De l'huile, dites-vous; je croyais qu'on appelait ça de
la braise.

__Ah ! très-joli. (Il note.) ïrès-joh ! On n est pas plus Pari-
sien.

__Je compte sur vous pour me fixer sur une chose qui

me taquine. Vous ne sauriez croire à quel point je suis curieux
de savoir...

— Quoidoncî-

— Ce que pense Prével de mon dernier manifeste.

*— Monseigneur, Prével est comme moi. Il vous admire sans
réflexion. G'est le cas de'toute la France, autant vous le dire,
puisque je suis venu pour cela. Si la France pouvait vous
écrire, elle vous écrirait avec son cœur. Excusez ma rude
franchise.

__Alors",' si je voulais revenir?

— Il faudrait commencer par vous abstenir. Voulez-vous me
permettre une figure?... Quelquefois, dans un repas, c'est du
veau qu'on aimerait prendre, et l'on se sert du bœuf.

—: je ne saisis pas bien.

— Supposez donc, monseigneur, que le veau c'est vous ; le
bœuf, monseigneur le duc d'Aumale. Tout le monde vous
adore, c'est vrai ; mais si ce n'est pas le duc d'Aumale qui
vient à votre place, il y aura une profonde déception.

—' Vous croyez?

__j'en suis sûr. Alors il m'est venu une idée. —; Je suis au

fond plus politique qu'on ne pense. — Il m'est venu une idée,
c'est la fusion.

— Comment ça ?

__ Mon Dieu, c'est tout simple. Vous fusionnez tous les

deux. Autrement dit, vous yous mettez la tête dans le même
bonnet. Comme cela, si on lui pose la couronne dessus, vous
vous trouvez couronné tout naturellement du même coup. Ce
n'est pas plus malin que ça ; seulement il fallait le trouver.

— .Quel homme étonnant vous êtes! Je voudrais justifier
votre sollicitude, mais je crains... Voyons, qu'attendez-vous de
moi?

— Monseigneur, une petite, une toute petite concession sur
la question du drapeau.

Monseigneur, se levant. Le drapeau ?
Villemessant. Aïe! Voilà le chiendent.

Oui, monseigneur. Le duc d'Aumale lui-même ne vous
demande pas autre chose. Je ne parle pas à la légère, car je
sors de chez lui. Je ne vous l'aurais pas avoué sans Poujoulat,
cet excellent Poujoulate, comme ils prononcent dans le Midi.
« Té m'a soufflé Poujoulate, dis-le-lui tout de même ! » (Tirant
un morceau d'étoffe de sa poche.) J'ai obtenu de monseigneur le
duc d'Aumale des concessions qu'il n'aurait certainement ac-
cordées à aucun autre.

Monseigneur, le repoussant. Qu'est-ce que c'sst que ça? Un
drapeau rouge?

Villemessant. Oh! du rouge, il n'y en a presque plus, et du
bleu non plus. (Étendant le drapeau.) Voyez, il nous concède
sept centimètres d'une couleur et sept de l'autre, ça fait ga-
gner au blanc quatorze centimètres.

-fr Vous n'y pensez pas, Villemessant!... Je consentirais...

-ii-Û, accorde encore une fleur de lis sur la hampe; seule-
ment il.y aura un coq au-dessus.

-s- Brisons là, mon ami, brisons là. Si vous ne vous appe-
liezïjpas de Villemessant, je croirais que.vous raillez.

-rj-. Monseigneur, permettez-moi une image. Quand le petit
poussin appelle sa mère...

— Non, sur ce sujet-là, voyez-vous, je suis intraitable. Je le
regrette profondément, parce que cela nuit beaucoup à ma
conviction la plus intime, qui est que moi seul puis faire le
bonheur de la France; mais c'est là une concession, et je ne
puis-l'admettre. C'est de concession en concession, on l'a dit
avant moi, que mon malheureux aïeul...

— Monseigneur, permeltez-moi une image. La France est
en ce moment comme un vaisseau battu par la tempête...

— Mon ami, demandez-moi tout ce que vous voudrez : une
place près de ma personne, celle de porte-coton, si cela vous
plaît, pour un de vos rédacteurs ; demandez-moi mon cœur,
demandez-moi ma tête, demandez-moi la tête de M. de Moriti,
mais ne me demandez jamais un pouce de bleu ou de rouge
sur mon drapeau. Tout ce que je puis vous accorder, avec un
effort sans nom, c'est une gance tricolore autour, mais surtout
pas de coq.

— Le duc s'y refuse absolument.

— Alors, mettons qu'il n'y ait rien de dit.

— Votre décision me navre pour la France, ô mon roi! Ex-
cusez ma rude franchise. Ai-je donc été si mauvais diplomate?

— Vous, Villemessant, vous auriez rendu des points à Tal-
leyrand... Et croyez bien que si jamais le sort... vous seriez
mon premier ministre.

— Ah ! monseigneur, puisque je vous vois dans ces heureuses
dispositions à mon égard, accordez-moi une faveur immense,
la grand'croix de Saint-Louis pour mon collaborateur Prével.

— Villemessant, je vous l'accorde.

— O mon roi !

— Helevez-vous, mon ami. Tenez, plus je vous regarde et
plus j'y songe.

— A quoi donc, monseigneur?

— Je ne puis pas faire de concessions, moi.; mais vous, qui
vous empêcherait d'en faire?...

— Que voulez-vous dire?

— Je veux dire, Villemessant, que le ciel n'a pas béni mon
union ; qu'après moi, si je ne prends pas soin de me désigner
un successeur, si je ne me crée p;is une lignée par adoption,
la branche aînée des Bourbons doit fatalement s'éteindre.

— Ah! monseigneur! j'ai peur de vous comprendre.

— Tu me comprends, mon ami, mon fils. C'est à toi que je
veux passer, après ma mort, le noble drapeau de la maison de
France. Dans mes bras, Hippolyte.

— Mon père !

— Mon fils... Alors, c'est convenu. Seulement n'en dis rien
encore à personne. On est si potinier à ma cour !

_— JV saurai me taire, ô mon père, je saurai dissimuler nia
joie, puisque vous l'ordonnez; mais, comme ça se trouve I J'al-
lais justement vous soumettre quelques idées de politique géné-
rale, en cas de proclamation de la royauté. D'abord le privilège
de l'Officiel était donné à Figaro. Je faisais deux éditions par
jour : une à midi avec le cours probable de la Bourse, l'autre
à sept heures avec le compte-rendu prématuré des théâtres. Les
kiosques seuls nous en enlevaient trente-deux mille de chacune.
Je refaisais mon traité avec Dollingen pour les annonces...

Monseigneur, l'arrêtant. Nous recauserons de cela, si tu veux
bien?

Villemessant. — Pardon , je me retire, monseigneur. Cette
conversation de sept quarts d'heure trois minutes et dix-neuf
secondes paraît vous avoir faiigué.

— C'est vrai; au revoir, Hippolyte. Ah! bien des choses à
Caban.

— Qui ça, Caban?

— Eh bien! oui, Manteau, Redingote, Raglan, "Walerproof,
comment Pappelles-tu, notre ami, enfin?

— Ah ! c'est Pardessus que vous voulez dire.

— Pardessus, c'est cela même.

— Un ami bien rare. '

— Alors il eslùnique.

. — Ah! c'est encore un mot. Très-joli !

— Dis-lui'que je ne mets jamais ma veste sans penser à
lui!

— Monseigneur, je lui dirai que vous avez un esprit d'enfer.
Excusez ma rude franchise.

(M. de Villemessant sort à reculons.) •

Pour narration conforme.
CHUT.

LA SAINTE EUGENIE

LA PLACE DE LA MADELEINE. — UNE FOULE ÉMUE ET SILENCIEUSE. —
IL PLEUT.

Me Robin, le fidèle huissier de l'Empereur (se découvrant). —
Messieurs les parents!...

(Il outre la marche en se dirigeant vers l'église.)

Waldteuffel, chef d'orchestre des bals de la cour. — Ça va com-
mencer.

Mc* Lachaud, père et fils. — Nous allons rire.

M" Robin, le fidèle huissier de l'Empereur. — Ah ! messieurs !

Tous. — Qu'y a-t-il ?

M* Robin, le fidèle .. — La grille est fermée.

Maurice Richard, venu tout exprès de la province pour assister
à là cérémonie. — C'est une infamie!

Paul de Cassagnac. — Sonnez à la porte des sacrements.

Tous. — Oui, sonnez.

M" Robin. — Je sonne.

Albert Ro&at. — Sonnez plus fort.

Tous. — Oui, sonnez plus fort.

M" Robin (s'essugant le front). — Je fais ce que je peux... (La
tlle de_ l'abbé Lamazou apparaît à une lucarne.)

Tous. — Ah!,

L'abbé Lamazou. — On a sonné, je crois?

Tous. — Oh ! (L'abbé Lamazou, effrayé, referme sa lucarne.)

Bernard Derosne. — Nous sommes volés !

Maurice Richard, venu tout exprès... — C'est une infamie !

M™ Lachaud, père et fils. — Nous protestons.

M8 Robin (onctueux). — Si ces messieurs voulaient se rendre
à Saint-Étienne-du-Mont.

Sénepart, page de Napoléon Ier. — Ou à la chapelle des Inva-
lides.

C. Duvernois. — C'est une idée.

Ernest Huguet. — Elle est mauvaise.

C. Duvernois (menaçant). — Vous dites?

Ernest Huguet. — Je dis qu'elle est mauvaise.

Vitu. — Messieurs... il faudrait s'entendre.

M. Benedetti. — C'est vrai !

Vitu. — Je demanderai d'abord pourquoi l'on nous interdit
l'entrée de l'église?

Tous. — Oui, pourquoi?

Vitu. — Je sais bien qu'on ne me répondra pas.

Paul de Cassagnac. — Ils ont peurl

Albert Rogat. — Les lâches!

Vitu. — Hais puisque la messe commandée n'a pas lieu, on
doit nous rsndre l'argent.

Bernard Derosne. — Oui,... qu'ils rendent l'argent!

Tous (sw t'air des lampions). —Notre argent!... notre ar-
gent!... noitre argent!...

(La tête de l'abbé Lamazou reparaît à la lucarne.)

Tous. — Ah!

L'abbé Lamazou. — Chers frères,... croyez bien que s'il m'é-
tait possible de déférer à votre désir, je m'empresserais... mais
des circonstances imprévues...

Tous (sur le même air). — Notre argent!... notre argent!...
notre argent!...

L'abbé Lamazou. — Il a été versé entre les mains de Monsei-
gneur le comte de Chambord pour VOEuvre de la naturalisation
des pelits-fils d'émigrés nés en Allemagne.

M" Lachaud, père et fils. — Vous n'en avez pas le droit. '

Maurice Richard, venu tout exprès... — C'est une infamie!

Le baron Lambert, lieutenant des chasses impériales—Voyons...
nous sommes ici pour entendre une messe... Voulez-vous la
dire, oui ou non?

Dugué de la Fauconnerie. — Répondez.

L'abbé Lamazou. — Chers frères... croyez bien que s'il m'é-
tait possible... ce serait avec un vif plaisir... mais il est venu
tout à l'heure une dame en noir...

Tous. — C'est Jules Simon.

L'abbé Lamazou. — ... qui m'a donné contre-ordre.

C. Duvernois (furieux). — Vous dites?

Elysée Ollivier (ombre d'Emile). — Voilà ce qu'on fait de la
liberté de réunion!... Ah! mon frère! mon pauvre frère! (Il
sanglote.)

C. Duvernois. — De quel droit le prétendu chef de l'intérim
du soi-disant pouvoir exécutif de la république provisoire s'op-
pose-t-il à cette manifestation, toute de famille?

Tous. — Oui, de quel droit?

C. Duvernois. — J'en appelle au peuple !

Ernest Huguet. — Je demande un plébiscite.

Tous. —Plébiscite. — Plébiscite. —Plébiscite... (La pluie
redouble )

C. Duvernois monte sur une borne. — Messieurs !

Tous. — Bravo !

C. Duvernois. — Messieurs, je ne m'y trompe pas, ces ap-
plaudissements s'adressent à celle qui, un jour par semaine,
sortait incognito des Tuileries pour aller payer discrètement les
termes arriérés du locataire, nécessiteux, mais timide ; ils s'a-
dressent à celle qui ravitaillait Paris dans l'espoir de partager
les provisions du siège; à celle qui voulait prendre le comman-
dement des troupes et qui disait : «Je briserai mon épée plu-
tôt que de la rendre ! »

M. de Saint-Albin, lecteur de l'impératrice. — C'est positif...

C. Duvernois. — Messieurs, je propose d'envoyer à S. M.
l'impératrice une couronne d'immortelles et de violettes.

Ernest Huguet. — La souscription est ouverte dans les bu-
reaux de l'Avenir libéral, 32, rue Nolre-Dame-des-Victoires.

Paul de Cassagnac et Albert Rogat (A part). — Intrigant!

C. Duvernois. — On a déjà réuni, me dit-on, 7,500,000 si-
gnatures.

M. Sénepart, page de Napoléon 1". — Je demande la parole.

Dugué de la fauconnerie. ~A la tribune! (Le père Séne-
part monte sur la borne.)

Sénepart (avec émotion). Messieurs, ce sont des vers... qu'on
pourrait... il me semble... glisser dans le bouquet.

Ernest Dreolle. Lisez-les...

M. Robin. Silence, messieurs!

M. Sénepart, lisant.

L'ESPOIR

L'espoir... c'est un sonnet... un hymne d'espérance
Que je viens, à vos pieds, réciter en ce jour
Kt qui reflète ici le bonheur de la France,
Dont le pays vous garde à jamais son amour.

Dans les sommets poudreux où plane la victoire,
Votre époux, Eugénie, est digne de ce nom;
Tout ce que l'oncle a fait en ses heures de gloire,
Le neveu le répète à la voix du canon.

L'humble cultivateur du fond de sa clieumière
Réserve à ses enfanta une ardente prière
Pour les accents émus qui s'exhaleat du cœur.

Et dans ces sentiments où la concorde brille
Les souhaits les plus purs soat pour votre famille
Et se mêlent aux «ris de : « Vive l'empereur! »

(M. Sénepart descend de la borne.)

Tous. — Bravo! bravo!...

Un facteur de l'agence Havas-Bullier. — Une dépêche
pour M. Duvernois.

Ernest Huguet. — Donnez (// lit) : « M. le prince de Bis-
mark a dit ce matin confidentiellement à M, Arnim : Tant que
M. Thiers usurpera le pouvoir, je garderai [Alsace et la Lorraine;
je ne rendrai ces deux provinces que si Napoléon {11 remonte sur
le trône; c'est lui qui les a perdues, c'est à lui que je dois les re-
mettre. »

Tous. — II a raison.

Un deuxième facteur. — Une autre dépêche pour...

Duvernois, Huguet et Cassagnac, la lui arrachant des mains ot
lisant ensemble. — Ciel! (lisant).

« Boulogne-sur-Mer, 15 novembre 1871. »
« Il arrive ! »

Tous. - Courons à sa rencontre ! (Ils se précipitent du côté de
la gare du Nord. )

La place de la Madeleine reste vide.

Les gardiens de la paix, arrivant en foule. — Circulez, nies-
sieurs, circulez !
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