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Le Grelot: journal illustré, politique et satirique — 3.1873

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https://doi.org/10.11588/diglit.6812#0062

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LE GRBLOT

LA CHARBONNERIE DE 1873

SAYNÈTE EN UN ACTE.

(Un mot de M. Gounod, et nom ajoutons quel-
ques couplets à cette œuvre légère. Il n'y qu'à
s'adresser au bureau du Grelot).

PERSONNAGES :

M. Prudhomme.
Célina, sa femme.
Fouinât, charbonnier.

Nanette, jeune bonne... à tout faire et même
davantage.

Chambre à coucher chez M. Prudhomme.
Madame Prudhomme dort. Monsieur s'agite et
va se réveiller..

SCÈNE I.

PRUDHOMME, CÉLINA.
prudhomme, ouvrant un œil.
Quelle heure peut-il bien être?... Huit heu-
res à mon remontoir... et le soleil commence
à pénétrer dans cette alcôve, pudique temple
du bonheur conjugal... c'est étrange!... com-
ment se fait-il que le jour succède toujours à
la nuit?... et cela depuis le commencement
du monde... absolument inexplicable... Cé-
lina!... Célina!... elle dort... pauvre ange !...
la vertu même...

célina , rêvant.

Encore un qui n'I'aura pas.,
La timbale (6îs.).

PnUDHOMME.

Touchante naïveté!... elle murmure dans
son sommeil les vers des poètes aimés!... et
moi!... moi!... j'ai mené hier Henriette Godi-
chard à la Fille de madame Angotl... Oh !... les
hommes!... mais chut!... les femmes ont le
sommeil si léger! Qu'elle ignore à jamais mes
erreurs ! (Il sonne.) Nanette!

SCENE II.
LES MÊMES, NANETTE.

NANETTE.

Voilà, monsieur!

PRUDHOMME.

Déjà à l'ouvrage, ma fille?

NANETTE.

Oui, monsieur.

PRUDHOMME.

Bien... très-bien... Mon Figaro est-il ar-
rivé?

nanette.

Oui, monsieur.

prudhomme.

Donnez-le-moi, je vous prie.

(Nanette sort.)
Quel journal !... et que j'admire ce prodi-
gieux Saint-Genestf... Jamais il ne dit la même
chose deux fois de suite; et, quelque soin
qu'on y mette, il est impossible de savoir ce
qu'il pense. Quelle nature !

(Nanette rentre.)

NANETTE.

Voilà votre feuille, monsieur.

prudhomme, la dépliant.

Par quel singulier hasard, Nanette, se fait-il
qu'il y ait du cirage sur la première colonne
du feuilleton?

nanette, embarrassée.
Je vis vous dire, monsieur... en faisant vos
boites... j'avais placé le journal devant moi...
et... je ne sais pas comment... en lisant...

prudhomme.

Ah!... vous avez lu?...

nanette.

Monsieur!...

prudhomme.

Je ne vous en veux pas, mon enfant... Il est
bon de s'instruire dans toutes les classes de la
société... Allez... je vous pardonne. D'ailleurs,
je ne sais rien de plus propre à former l'esprit
et le cœur que la prose enchanteresse de Fran-
cis Magnard,ce belge de tant d'esprit.

nanette.

Que Monsieur est bon !

prudhomme.

Je suis juste, voilà tout. Soignez le cho-
colat.

nanette.

Monsieur peut être tranquille.

(Elle sort.)

SCÈNE III.

PRUDHOMME, CÉLINA.

prudhomme.

Brave fille, au fond!... Voyons un peu où
nous en sommes et ce que mitonnent encore
ces gueux de républicains.

(Il parcourt rapidement le journal.)
Rien de bien neuf... quelques lamentations
de Xavier Eyma... Passons... Ah!... Gazette
des Tribunaux... la Charbonnerie de 1873... 0
ciel !... qu'est-ce que cela veut bien dire?...
(Il lit.)

Oh 1... ah!... Fichtre!... bigre!...
(Son front se couvre a'une sueur froide).

Non... c'est impossible!... et cependant Re-
days le dit... Cent mille !... ils sont cent mille I...
Célina!... Célina!...

célina. s'êveillant.
Que veux-tu, Joseph?

prudhomme, d'une voix étranglée.
Ils sont cent mille ?

CÉLINA.

Cent mille quoi ?

prudhomme.

Cent mille charbonniers.

célina.

Tant que ça à Paris ?

prudhomme.

Eh non, pas à Paris !... dans le Midi, mal-
heureuse !

célina.

Eh bien, qu'est-ce que cela me fait ?

prudhomme.

Comment, qu'est-ce que cela te fait? mais
tu ne sais donc pas ce qu'ils font, ces cent
mille misérables?

célina.

Ils vendent du charbon, je pense.

prudhomme.

Ils veulent détruire la société.

célina.

Bah!

prudhomme.

Lis le Figaro de ce matin.

célina.

Eh bien, quand ils auront détruit la société,
qui est-ce qui leur achètera leur charbon?

PRUDnOMME.

Célina, vous jonglez avec les choses les
choses les plus sérieuses... Je vous répète que
le Figaro a découvert la plus effroyable des
conspirations. Ah! brave journal, va... excel-
lent Rodays!...

CÉLINA.

Jeseph, vous devenez fou !

PRUDHOMME.

Lis, te dis-je, lis. Ils ont des mots de passe,
des signes de ralliement, un langage à eux,
langage épouvantable!... à faire frémir les
plus courageux !... Cent mille !... nous sommes
perdus!... enfoncés!... démolis!... Célina...
nous allons partir pour l'Amérique... dès que
la blanchisseuse aura rapporté le linge !

CÉLINA.

Jeseph, tu es plus que fou... tu deviens ab-
solument gâteux.

PRUDHOMME.

Madame I...

CÉLINA.

: Tu donnes donc dans ces godants-là?

PRUDHOMME.

Godan^estunpeudur, appliqué à la prose de
M. de Rodays, madame, je me permettrai de
. vous le faire observer.

célina.

C'est vrai, aussi... on n'a pas idée de ça !...
Tu ne connais donc pas les trucs de ces far-
ceurs? Us savent ce qu'ils font, va. Us savent
que ces blagues...

PRUDHOMME.

Des blagues !

CÉLINA.

Eh oui, des blagues... ça effraie l'abonné et
ils se figurent que cela fait du tort à la Répu-
blique.

PRUDHOMME.

Mais enfin, ces cent mille charbonniers...
ce procès... car enfin il y a eu procès... le nier
serait de la folie!...

CÉLINA.

Cent mille!... Demande donc un peu qui les
a comptés. II faut toujours que ces bonshom-
mes-là inventent quelque chose pour terrifier
le bourgeois. Après le Spectre rouge de 48, la
Charbonnerie de 73.

PRUDHOMME.

Vous n'entendez rien à !a politique, ma-
dame; j'ai quelque honte à le dire.

CÉLINA.

Joseph, vous êtes un sot.

prudhomme.

Célina !

célina.

J'ai dit un sot. Nanette, mon chocolat I
(On entend un bruit de voix qui se disputent.)

PRUDHOMME.

Qui donc se permet de parler de ee ton dans
mes lares?

(La porte s'ouvre. Nanette paraît.)

SCÈNE IV.

LES MÊMES, NANETTE.

PRUDHOMME.

Nanette, qui donc est là?

NANETTE.

C'est le charbonnier, monsieur.
prudhomme, tombant à la renverse sur un oreiller.
Le cha... le cha... le cha... charbonnier!...

Grâce!..... grâce!..... pitié!..... ne me tuez

pas!.....

(Entre Fouinât.)

SCÈNE V.
LES MÊMES, FOUINAT.

fouinat.

C'hest mademoiselle qui me disait comme
cha...

prudhomme.

Sortez, misérable!... ou craignez la fureur
de M. de Redays !

fouinat.

Je ne chais pas che que c'hest que M. Ro-
days, mais je viens pour la petite note...
prudhomme , complètement idiot.
Vous ne l'aurez qu'?vec ma vie !

fouinat.

Mais, monchieur...

Célina, se tenant les côtes. "
Revenez dans une heure, mon ami. M. Pru-
dhomme aura pris sa douche.., il sera plus
calme.

fouinat.

Merchi, madame...

prudhomme.

Ah! Rodays, Rodays!...vous serez cause de
ma mort !...

célina, bas à Nanette.
Nanette, vous n'irez plus acheter le Fi-
garo... et si monsieur demande pourquoi
vous lui répondrez que M. de Villemessant l'à
fondu avec le Corsaire... ça sera aussi vrai-
semblable que les cent mille charbonniers de
M. de Redays.

NICOLAS FLAMMÈCHE.

CAMÉES POLITIQUES

LES HOMMES DE LA TROISIÈME RÉPUBLIQUE

IX

de FALLOUX

Il est encore dans la coulisse; mais, de
même que dans les mélodrames, on aperçoit
le poignard et le plumet des assassins encore
postés derrière les battants, on peut voir déjà
le goupillon et la baïonnette de ce jésuite en
robe courte derrière l'entrée des artistes du
théâtre de Versailles. Ce marchand de cochons,
anobli par Louis-Philippe, poursuit un rêve
qui lui vient de Saint-Dominique en passant
par Torquemada : c'est l'introduction en
France de la très-sainte Inquisition. Ce hobe-
reau veut allumer sa pipe aux bûchers et ne
priser plus que de la fleur de soufre. Mais le
moyen d'arriver à cette régénération par le
feu!... Le peuple a lu Voltaire, et il est pris

De ce rire usité
Chez les gens affligée d'une gibbosité,

lorsqu'on lui parle de l'eau de Lourdes comme
panacée universelle. Que faire donc?... Dé-
truire le peuple, dit Falloux, ou plutôt non,—
car si on le détruisait, il n'y aurait plus que
les nobles, qui seraient obligés de travailler

GAZETTE DE M0NTRET00T

Hyméné.....e (bis)

0 journé.....e,

Fortuné.....e!...

(Musique de Barthélémy'Sainl-
Epistolaire.)

Enfin, nous allons être tranquilles !
L'avenir de la République est désormais
assuré.

Gambetta vient d'épouser mademoiselle
Dosne...

C'est mardi dernier, à midi, que les deux
jeunes gens ont reçu la bénédiction nuptiale
à l'église des Batàgnolles.

Monseigneur Dupanloup, officier delà légion
d'honneur, officiait également dans cette cir-
constance.

Un immense concours de peuple et d'or-
phéons assistait à la cérémonie.

Parmi les invités, nous avons remarqué
madame Thierret, Victor Koning, le nonce du
pape et mademoiselle Schneider, M. Caduc
de Haut-Mal, mademoiselle Paola Marié,
M. d'Arnim, Fervacques, le général Trochu et
M. Francis Magnard, lequel a daigné apposer

au bas du contrat son grand paraphe « coup
de foudre. »

Monseigneur Dupanloup, dans une improvi-
sation dès longtemps méditée, a versé des tor-
rents de larmes et d'éloquence sur la tête des
deux époux.
Voici la péroraison de l'évêque Orléaniste :
« ... Petit Léon, dans le sein de ta mère, tu
a méditais déjà de grandes choses. Habent sua
» fata... (Saint Mathieu, verset... toujours.)
» Faute-de-Mieux 7" t'a adopté. Te voilà Dau-
» phin de France et beau-frère de la présiden-
» ce... (Pardonnez-moi si je te tutoie, mais
» j'ai besoin de lancer un jeu de mots adusum
» Julii Simonis qui fait de l'œil à mademoiselle
» Paola Marié...) Oui, Léon, ta nouvelle posi-
» tion t'impose de sublimes devoirs... Si la
» République te trompe, n'écoute point M. Du-
» mas fils qui te dira : Tue-la ! suis plutôt mon
» conseil et... Consti... TUE-LA! »

Le soir, grand gueuleton à la barrière de la
Cbopinette.

M. Thiers était radieux.

Gambetta un peu ému.

Sa femme le dévorait des yeux et ne ces-
sait de dire à l'inévitable M. Troncin-Dumer-
san :

— J'avais toujours rêvé d'épouser un bor-
gne...

— Pourquoi ça? fit Gambetta, choqué.

— Parce qu'un borgne ne peut pas faire de
dettes : il n'a l'œil nulle part...

Et M. Thiers de s'esclaffer, et son dauphin de
renverser le contenu de son verre sur la
nappe...

— 11 va falloir changer de Nappe, ô Léon!...
murmurèrent les assistants.

On se sépara fort tard et, chose bizarre,
sans avoir fait aux époux la moindre farce de
fumiste.

M. Thiers, comme un bon petit bourgeois,
loua un sapin et ne cessa de répéter pendant
tout le trajet, à son aller ego, son fidus Achates,
Mimi-Saint-Épistolaire, ces simples mais tou-
chantes paroles :

— Maintenant, je puis mourir tranquille !

Tout pâlit devant l'événement capital que
je viens de relater.

Aussi suis-je forcé de grouper un peu au
hasard, par ordre d'importance, les heureuses
nouvelles de cette semaine fortunée:

Sur la proposition de M. Changarnier, l'As-
semblée a voté la levée immédiate de l'état de
siège.

L'extrême droite a donné sa démission en
masse, et c'est maintenant la gauche qui, de-
venue indéboulonnable, s'écrie : « Il n'y a que
les gens dissolus qui demandent la dissolu-
tion. »

*

* *

Mentionnons aussi :

L'abdication de Don Carlos;

La déportefeuillisation de M. Jules Simon ;

L'abolition de la censure par le nouveau
ministre de l'instruction publique, M. Jean
Brunet du Trocadéro, qui vient d'obtenir pour
les masses l'instruction grattoire et obligra-
tuite ;

L'abandon par les d'Orléans, au profit de la
libération du territoire, des cinquante mil-
lions que la Chambre leur a restitués en dé-
cembre ;

La réception de Commerson à l'Académie
française. Le discours de l'Auguste vieillard
débutait ainsi : « J'aime mieux mon thé à la
crème qu'à la tribune... »

Quoi encore?

Un dialogue édifiant que j'ai ouï dans les
coulisses des Menus - Plaisirs, pendant que
Mme Thierret étudiait dans la fameuse trappe
les lois de la chute des corps en écrasant tous
ceux de la flavescente Lasseny.

victor koning. —Je suis fier, voyez-vous, de
pouvoir m'écrier : Je suis le fils de mes œu-
vres...

clairville. — Parbleu ! on sait bien que
vous n'en êtes pas le père !
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