lis onrtoT
PRIME GRATUITE
Toute personne de la provirce qui s'abon-
nera à an des journaux ci-après, par l'entre-
mis* de m. Madrk, directeur-gérant du Grelot,
13, rue du Croissant, à Paris, aara droit à an
abonnement gratuit au journal le GRELOT,
savoir :
Pour un abonnement d'un an : 6 mois au GRELOT.
— de 6 mois i 3 mois —
L'abonnement à plusieurs journaux dou-
bler», triplera la durée de l'envoi gratuit du
GRELOT.
Deux abonnements de trois mois à des jour-
naux différents donnent le môme droit qu'un
abonnement de six mois à un même journal.
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Buw pdbuc.............
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Joobjul dis Débats.
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République française.....
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Revue des Dbui-Moxobs. .
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1
Les prix qui précèdent sont, bien entendu, les prix
axés par les administrations de chacun de ces jour-
naux.
LG CARNET RÉVÉLATEUR
Sapristi, chers lecteurs, le Grelot l'a échappé
belle et j'en suis encore tout ému I
Figurez-vous — Jean, un peu de fleur d'o-
ranger, s'il vous plaît — figurez-vous que nous
étions sur le carnet du citoyen Rouffie !
Vous savez bien?... le citoyen RouffieI...
l'ex-agent de police embauché, paraîtrait-il,
par ces bons bonapartistes pour les besoins de
leur cause.
« Ma cause est juste et sainte I »
(Huguenots, acte IV.)
Oui, chers lecteurs, Rouffie, l'infâme Rouf-
fie nous avait couchés sur son carnet!...
Maintenant vous me demanderez comment
nous avons pu découvrir cette horrible machi-
nation.
La chose est des plus simples.
Rouffie avait un domestique, comme le
dernier des ténors venus.
Seulement, il arrivait ceci : c'est que le 1"
de chaque mois, Rouffie oubliait régulière-
ment de payer son larbin.
Le larbin furieux, — cela se comprend, —
a mis dans sa poche le carnet de son bon
maître et en a lait deux paris : l'une qu'il a
remise au préfet de police, l'autre qu'il est
venu nous offrir.
Moyennant un habillement complet à la
Belle Jardinière, nousavonsacheté la conscience
de ce faquin et les papiers nous concernant,
papiers destinés, s'ils étaient jamais venus à
la connaissance du gouvernement, à nous
faire certainement filer un mauvais colon.
Une fois en possession de ces odieuses
dénonciations, notre premier soin a été de
fermer les porte» et les volets de notre salle de
rédaction et de nous y barricader avec soin.
Puis, nous avons allumé quelques paquets
de bougies et d'une main tremblante j'ai été
chargé par mes collègues de dépouiller cette
correspondance aussi perfide que venimeuse.
Voici ce que j'ai lu en frémissant :
horrible complot du journal le grelot dirigé
contre MM. les membres de la censure.
Paris, 22 juin.
Il n'y a plus à en douter, l'affaire est dans
le sacl
Le Grelot conspire !
Et contre qui, grand Dieu!
Contre la plus bénigue, la plus indulgente
de nos institutions !... uneinstitution qui, pour
la douceur, n'est dégotlée que par la Revales-
cière.
Contre la censure I...
Je vous demande un peu ce que ces gredins
de journalistes ont dans le corps !
Mais heureusement Rouffie est là!... Rouffie
veille et prend des notes I... oui, je suis là!...
ah ! ah ! ah !... et vous allez voir.
Sur ce en route et ouvre l'œil, mon bon-
homme !
3 juin.
Rencontré un des rédacteurs de ladite
feuille, le nommé Charles Leroy, sortant de
chez un herboriste et glissant avec soin le
long des murailles.
Interrogé ledit herboriste.
— Connaîtriez-vous cet homme qui quitte
votre boutique?
— En aucune façon.
— Eh bien, c'est un rédacteur du Grelot.
— Ahl bah!...
— Il est jeune et beau, n'est-il pas vrai?
— Il m'a acheté trente grammes d'huile de
ricin, voilà ce qui m'a le plus frappé en lui.
— Trente grammes!... le misérable!...
mais il veut donc les tuer tous!
— Tous?... qui?...
— Les censeurs!... les censeurs!... com-
prenez-vous ?
— Rien du tout.
— Vous êtes un imbécile !
— Monsieur!...
— Mais je suis suffisamment renseigné.
Adieu! je veille!...
& j uin.
Rencontré Nicolas Flammèche en face le
passage Jouflroy.
En voilà un dangereux, par exemple!
Motus!... et ne le perdons pas de vue.
11 frappe du pied avec impatience et je l'en-
tends murmurer :
— Ce farceur-là ne viendra pas!... est-ce
qu'il voudrait me faire poser, par hasard?...
11 sait bien cependant que je l'attends pour
aller au ministère!...
Au ministère !...
C'est bien cela!... Oh! Rouffie!... veille
bien, mon ami !...
—Quel lâcheur que ce Lepetil!... sous pré-
texte qu'il s'appelle Alfred, il n'est jamais à
l'heure.
Que peut-il bien vouloir dire par ces paro-
les?... Est-ce un mot spirituel ?... Peut-être...
attendons.
— Il sait pourtant que les bureaux de la
censure ferment de bonne heure!... Notre
dessin va encore rater.
Notre dessin?... quel dessin?... Ah! j'y
suis!... notre dessin!... Parbleu, c'est facile
à comprendre... ces deux brigands ont formé
celui da se débarrasser de ces fonctionnaires
qui les gênent.
Ils vont probablement faire sauler le minis-
tère!
Les bandits !... écoulons lencore.
— Voyons, ai-je des allumettes?...
Des allumettes!...
— Non... mais Alfred ne voyage jamais sans
sa mèche...
Sans sa mèche !
Alfred a une mèche qui ne l'abandonne ja-
mais!
Plus de doute !
Les bureaux de la censure sont minés !...
Heureusement, je suis là et je veille!...
Oh ! oui, je veille !...
— Allons... 11 ne vient pas... Prenons en-
core un bock... ça fera le huitième !...
Le huitième !... vous demande un peu ce
qu'on est en droit d'attendre d'un homme ca-
pable d'ingurgiter huit bocks !
Moi, je n'en ai pas plutôt regardé un que je
suis désaltéré.
Mais ces criminels!...
Observé Nicolas pendant qu'il prend son
huitième bock.
H a fait une grimace en l'avalant.
—-Sapristi!... que c'est mauvais!... s'écrie-
t-il... quelle décoction infecte!... Pouah!..,
Et cet Alfred qui n'arrive pas !... Allons, ce
sera pour dem.iin !...
Pour dema'n!... La censure est sauvée !...
Je vais prévenir le chef de la sûreté.
— Et s'ils nous refusent encore notre des-
sin !...
Que va-t-il ajouter, mon Dieu?
— Nous en referons un autre.
De quel air a-l-il dit cela!... Quel calme
menteur!... Si on croyait pourtant à ces phy-
sionomies de sainte-n'y-touche!... Oui, mais
Rouffie ne coupe pas Jà-dedans... Rouffie est
un malin... Rouffie est un des plus beaux ty-
pes de cette belle police impériale que nous
enviaient tous les pays du monde... Roul'iie
fera son devoir, et la censure sera sauvée !...
Vive l'emp...!
Diable 1... pas de bêtises!... les opinions,
c'est comme les horloges... faut pas qu'elles
avancent trop! »
Ici s'arrêtaient les notes de l'excellent
Rouffie.
On voit que notre existence n'a tenu qu'à
un fil!...
Heureusement, la Providencé veillait sur le
Grelot}... Ce qui fait, chers lecteurs, que j'ai
le plaisir de pouvoir me dire encore aujour-
d'hui votre tout dévoué,
NICOLAS FLAMMÈCHE.
LES AMIS
Eh bien! là vrai, on m'aurait dit ça dans le
temps, —
Que dis-je! on le leur aurait dit à eux-
mêmes,
Qu'ils n'eussent pas voulu le croire, — plus
que moi!
Les légitimistes dans les bras des bonapar-
tistes 1
Quoi de plus admirable!
Les assassins du maréchal Ney criblant de
baisers les assassins du duc d'Enghien 1
L'histoire est neuve, piquante, — à donner
de la joie et de l'inspiration aux Juvénal fu-
turs!
Ces hobereaux et ces truands réconciliés 1
Ces marguilliers et ces ribauds entrelacés!
Quels sujets pour Daumier!
Et quel dommage que Callot soit mort I...
Certes, rien d'étonnant à ce que les bona-
partistes, pratiques comme les jésuites, trou-
vent tous les chemins bons pour arriver à leur
but!
La honte qui les couvre est si épaisse qu'ils
ne se soucient plus de l'augmenter de temps
en temps d'une infamie nouvelle.
Mais, les Iégétimistes, c'est clillérent!
Ce parti d'imbéciles et de radoteurs qui
prétend nous ramener au droit de cuissage et
aux autres droits féodaux, ne comptait,— n'a-
vait de signification et de valeur,
Que par son inébranlable attachement à ses
principes, — par son immobilité dans sa foi,
— par ses scrupules de conscience, respec-
tables en somme, qui allaieut jusqu'à l'em-
pêcher d'envoyer son drapeau blanc chez les
teinturiers, — dût-il en échange de cette con-
cession recevoir un royaume!
A cause de cela, ou se refusait à le con-
fondre dans la tourbe de ces vils intrigants
qui bombinent, comme dit Rabelais, dans
l'ombre des broglie et des Rouher;
Et malgré son petit nombre, il était le s£ul,
de tous les vieux partis, qui eût gardé quelque
majesté.
Les bassesses qu'on voyait faire aux autres,
on l'en jugeait incapable!
Eh bien, non !
Il ne valait pas mieux que le reste !
Les ignominies ne lui coûtent pas, à lui non
plusl
11 s'emplit la bouche d'ordures, tout comme
un autre 1
11 lie avec un cheveu de Marie-Antoinette
et un cheveu d'Eugénie son lys et leur vio-
lette,
Chante Partant pour la Syrie sur l'air de
Vive Henri 1V.
Il va laver dans les fossés de Vincînne* sis
mains rougies à la place de l'Observatoire!
Je n'avais guère d'illusions,
Mais celle de la sincérité et de la loyauté
des légitimistes était un de ces rares oiseaux :
La voilà envolée pour jamais!...
C'est égal, il est doux quand on est répu-
blicain de se dire que les légitimistes sont
aussi méprisables que les bonapartistes.
ZED.
j L'INSPECTION DES INVALIDES
!
Il n'est que trop vrai !
Les efforts redoublés d'une presse infâme ont ob-
tenu celle mesure ignominieuse!
Tant de vieux et anciens serviteurs de Sa Majesté
N poléon III, glorieusement mort en exil à la suite de
sa blessure (voir lus premiers-Paris du l'ays.—Tant
de sénateurs, de présidents de tribunaux correction-
nels, de députés, rie préfets à poigne et a virements,
de vénérables juges d'instruction, d'honorables mou-
chards, que dans leur magnanimité, le gouvernement
du i septembre et l'Assemblée du 8 février avaient
comblés de pensions, se voient aujourd'hui obligés de
l'aire valoir de nouveau leurs droits à la retraite.
L'Assemblée, plus soucieuse que jadis des deniers
du pays, veut s'assurer s'ils ont vraiment mérité une
pension de retraite.
On ose prétendre que ce n'est pas au feu qu'ils ont
reçu leurs blessures !
On ose dire que ce n'est pas au service de l'Etat
qu'ils ont attrapé leurs rhumatismes !
U Il y en a même qui osent affirmer qu'ils n'ont ni
infirmités ni blessures, qu'ils se portent comme père
et mère. — et que si le petit Badinguet revenait^ on
les verrait tous jeter leurs béquilles comme Sixte-
Quint, et leurs emplâtres noirs comme Robert Ma-
caire.
Mais le monde est si méchant 1
Enfin, toujours est-il, qu'un comité de trois méde-
cins assermentés a été nommé et que les bonapartis-
tes sont tenus d'aller lui montrer leurs plaies; — la
voix publique prétend qu'ils en ont de hideuses!
Ils viennent donc défiler tour à tour devant les mé-
decins que cette besogne semble peu récréer.
1er médecin, à un malade. — Allons, mon-
sieur, — avancez, monsieur,— c'est vous qui
vous nommez Matagralobos?
matagralobos. —Oui, monsieur, c'est moi.
(On voit s'avancer un gaillard de six pieds de
haut, large à proportion, avec des moustaches
noires de 18 centimètres de long et le chapeau sur
l'oreille.)
1" médecin. —Vous avez allégué, pour faire
valoir vos droits à la retraite, la faiblesse de
votre constitution !
matagralobos. — Oui, monsieur...
2° médecin. — Diable ! cependant il me sem-
ble que vous êtes assez solide!...
matagralobos, d'une voix dolente. — Hélas !
mon bon monsieur, je me meurs !...
3" médecin. — Toussez un peu pour voir.
matagralobos. — Volontiers !...
(// tousse, — et, au bruit qu'il fait, trois vitres
de l'appartement se fêlent de haut en bas.)
1er médecin. — Nous voyons que vous êtes
d'une santé très-délicate.
matagralobos. — Comment donc! C'est-à-
dire que je suis obligé de manger tous les
jours quatre livres de viande et de boire six
litres de vin, sinon,je ne pourrais pas me sou-
tenir, et je viendrais tout à rienl...
1" médecin.— C'est bien; nous délibére-
rons sur votre cas tout à l'heure... (Aun au-
tre.) Eh bien! et vous, qu'est-ce que vous fai-
tes là? approchez donc!... M. Pipardin, je
crois?
pipardin.—Pour vous servirl...
1er médecin. — De quoi vous plaignez-
vous?
pipardin.— Mon Dieu! monsieur, je vais
vous dire... J'étais président d'une chambre
correctionnelle, et vous savez ce qu'on nous
envoyait de journalistes à condamner!...
Aussi, les séances élaient d'une longueurtelle
que mes collègues et moi nous en éprouvions
une grande fatigue, — et que moi surtout,
messieurs, qui vous parle, j'en ai contracté
des hémorrhoïdes à force d'être si longtemps
assis, — mais de» hémorrhoïdes!... (Avec un
sourire ironique :) Voulez-vous que je vous les
montre?...
2° médecin.—Non, non, c'est inutile!
3e médecin. — Nous vous croyons sur pa-
role I
pipardin. —Alors, je garde ma pension?
1er médecin.— Nous relaterons dans notre
rapport ce que vous venez de nous dire!...
Allons, à un autre !
FÉlaRDEAU. — Moi, c'est bien simple , al-
lez... J'étais secrétaire du préfet de police et
j'étais d'un tempérament faible... Or, mon
chef m'emmenant souper assez souvent avec
lui, je me trouvais obligé de faire la noce
plus que ça ne m'était permis par les méde-
cins;— ce qui fait qu'aujourd'hui j'ai des
cailloux dans la vessie, — comme Sa Majesté,
quoi!...
2' médecin. — Eh! morbleu, vous n'aviez
qu'à n'y pas aller!
félardeau.—Impossible!... Forcé de sui-
vre mon chef!... Le devoir avant tout!
3e médecin. — Retirez-vous... Nous aurons
soin de vous !...
1er médecin. — Quelle diable de besogne
nous a-t-on ici donnée?
2* médecin. — Ce sont des malades de la
Cour des Miracles... Ah! mais, attendez donc,
il me semble qu'en voilà un qui est vraiment
infirme.
1er médecin. — Approchez, mon ami... Com-
ment avez-vous perdu ce bras-là?
MALACOttNi. — Voilà I C'était du temps des
émeutes du boulevard Montmartre; vous sa-
vez bien, en juin 69... vous connaissez bien
ça !...
2* médecin.—Oui, oui, passez!
malacogne. — Pour lors, que j'étais sans
place, vu que ma femme avait été enlevée
dans une râlle et que j'avais pu rien y faire,
malgré que j'avais des protections... Four
lors, j' battais la péqraine (1), une belle af-
faire!... Mb de braise (2) !... Je me serais fais
curé!... Pour lors, que je rencontre un an-
cien truffard avec qui que j'avais liché dans le
temps à l'École militaire... — Té! qu'y dit,
c'est Malacogne, quelle trompette! T'as donc
pas boulolté depuis trente plombes (3).— Et
mèche (4) 1 que je lui réponds. — Viens donc
avec moi, qu'y mô dit, j' suis dans la rousse à
Badingue ; nous tripotons l'émeute sur le bou-
levard Montmartre... J'ai une escouade, je
t'enrôle. — C'est il fatigant? que je dis.— Pas
trop, qu'y répond; tu viens ce soir à cinq
(1) Je mourais de faim.
(2) Pas d'argent.
(3) Heures.
(4) Et plus.
PRIME GRATUITE
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13, rue du Croissant, à Paris, aara droit à an
abonnement gratuit au journal le GRELOT,
savoir :
Pour un abonnement d'un an : 6 mois au GRELOT.
— de 6 mois i 3 mois —
L'abonnement à plusieurs journaux dou-
bler», triplera la durée de l'envoi gratuit du
GRELOT.
Deux abonnements de trois mois à des jour-
naux différents donnent le môme droit qu'un
abonnement de six mois à un même journal.
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Les prix qui précèdent sont, bien entendu, les prix
axés par les administrations de chacun de ces jour-
naux.
LG CARNET RÉVÉLATEUR
Sapristi, chers lecteurs, le Grelot l'a échappé
belle et j'en suis encore tout ému I
Figurez-vous — Jean, un peu de fleur d'o-
ranger, s'il vous plaît — figurez-vous que nous
étions sur le carnet du citoyen Rouffie !
Vous savez bien?... le citoyen RouffieI...
l'ex-agent de police embauché, paraîtrait-il,
par ces bons bonapartistes pour les besoins de
leur cause.
« Ma cause est juste et sainte I »
(Huguenots, acte IV.)
Oui, chers lecteurs, Rouffie, l'infâme Rouf-
fie nous avait couchés sur son carnet!...
Maintenant vous me demanderez comment
nous avons pu découvrir cette horrible machi-
nation.
La chose est des plus simples.
Rouffie avait un domestique, comme le
dernier des ténors venus.
Seulement, il arrivait ceci : c'est que le 1"
de chaque mois, Rouffie oubliait régulière-
ment de payer son larbin.
Le larbin furieux, — cela se comprend, —
a mis dans sa poche le carnet de son bon
maître et en a lait deux paris : l'une qu'il a
remise au préfet de police, l'autre qu'il est
venu nous offrir.
Moyennant un habillement complet à la
Belle Jardinière, nousavonsacheté la conscience
de ce faquin et les papiers nous concernant,
papiers destinés, s'ils étaient jamais venus à
la connaissance du gouvernement, à nous
faire certainement filer un mauvais colon.
Une fois en possession de ces odieuses
dénonciations, notre premier soin a été de
fermer les porte» et les volets de notre salle de
rédaction et de nous y barricader avec soin.
Puis, nous avons allumé quelques paquets
de bougies et d'une main tremblante j'ai été
chargé par mes collègues de dépouiller cette
correspondance aussi perfide que venimeuse.
Voici ce que j'ai lu en frémissant :
horrible complot du journal le grelot dirigé
contre MM. les membres de la censure.
Paris, 22 juin.
Il n'y a plus à en douter, l'affaire est dans
le sacl
Le Grelot conspire !
Et contre qui, grand Dieu!
Contre la plus bénigue, la plus indulgente
de nos institutions !... uneinstitution qui, pour
la douceur, n'est dégotlée que par la Revales-
cière.
Contre la censure I...
Je vous demande un peu ce que ces gredins
de journalistes ont dans le corps !
Mais heureusement Rouffie est là!... Rouffie
veille et prend des notes I... oui, je suis là!...
ah ! ah ! ah !... et vous allez voir.
Sur ce en route et ouvre l'œil, mon bon-
homme !
3 juin.
Rencontré un des rédacteurs de ladite
feuille, le nommé Charles Leroy, sortant de
chez un herboriste et glissant avec soin le
long des murailles.
Interrogé ledit herboriste.
— Connaîtriez-vous cet homme qui quitte
votre boutique?
— En aucune façon.
— Eh bien, c'est un rédacteur du Grelot.
— Ahl bah!...
— Il est jeune et beau, n'est-il pas vrai?
— Il m'a acheté trente grammes d'huile de
ricin, voilà ce qui m'a le plus frappé en lui.
— Trente grammes!... le misérable!...
mais il veut donc les tuer tous!
— Tous?... qui?...
— Les censeurs!... les censeurs!... com-
prenez-vous ?
— Rien du tout.
— Vous êtes un imbécile !
— Monsieur!...
— Mais je suis suffisamment renseigné.
Adieu! je veille!...
& j uin.
Rencontré Nicolas Flammèche en face le
passage Jouflroy.
En voilà un dangereux, par exemple!
Motus!... et ne le perdons pas de vue.
11 frappe du pied avec impatience et je l'en-
tends murmurer :
— Ce farceur-là ne viendra pas!... est-ce
qu'il voudrait me faire poser, par hasard?...
11 sait bien cependant que je l'attends pour
aller au ministère!...
Au ministère !...
C'est bien cela!... Oh! Rouffie!... veille
bien, mon ami !...
—Quel lâcheur que ce Lepetil!... sous pré-
texte qu'il s'appelle Alfred, il n'est jamais à
l'heure.
Que peut-il bien vouloir dire par ces paro-
les?... Est-ce un mot spirituel ?... Peut-être...
attendons.
— Il sait pourtant que les bureaux de la
censure ferment de bonne heure!... Notre
dessin va encore rater.
Notre dessin?... quel dessin?... Ah! j'y
suis!... notre dessin!... Parbleu, c'est facile
à comprendre... ces deux brigands ont formé
celui da se débarrasser de ces fonctionnaires
qui les gênent.
Ils vont probablement faire sauler le minis-
tère!
Les bandits !... écoulons lencore.
— Voyons, ai-je des allumettes?...
Des allumettes!...
— Non... mais Alfred ne voyage jamais sans
sa mèche...
Sans sa mèche !
Alfred a une mèche qui ne l'abandonne ja-
mais!
Plus de doute !
Les bureaux de la censure sont minés !...
Heureusement, je suis là et je veille!...
Oh ! oui, je veille !...
— Allons... 11 ne vient pas... Prenons en-
core un bock... ça fera le huitième !...
Le huitième !... vous demande un peu ce
qu'on est en droit d'attendre d'un homme ca-
pable d'ingurgiter huit bocks !
Moi, je n'en ai pas plutôt regardé un que je
suis désaltéré.
Mais ces criminels!...
Observé Nicolas pendant qu'il prend son
huitième bock.
H a fait une grimace en l'avalant.
—-Sapristi!... que c'est mauvais!... s'écrie-
t-il... quelle décoction infecte!... Pouah!..,
Et cet Alfred qui n'arrive pas !... Allons, ce
sera pour dem.iin !...
Pour dema'n!... La censure est sauvée !...
Je vais prévenir le chef de la sûreté.
— Et s'ils nous refusent encore notre des-
sin !...
Que va-t-il ajouter, mon Dieu?
— Nous en referons un autre.
De quel air a-l-il dit cela!... Quel calme
menteur!... Si on croyait pourtant à ces phy-
sionomies de sainte-n'y-touche!... Oui, mais
Rouffie ne coupe pas Jà-dedans... Rouffie est
un malin... Rouffie est un des plus beaux ty-
pes de cette belle police impériale que nous
enviaient tous les pays du monde... Roul'iie
fera son devoir, et la censure sera sauvée !...
Vive l'emp...!
Diable 1... pas de bêtises!... les opinions,
c'est comme les horloges... faut pas qu'elles
avancent trop! »
Ici s'arrêtaient les notes de l'excellent
Rouffie.
On voit que notre existence n'a tenu qu'à
un fil!...
Heureusement, la Providencé veillait sur le
Grelot}... Ce qui fait, chers lecteurs, que j'ai
le plaisir de pouvoir me dire encore aujour-
d'hui votre tout dévoué,
NICOLAS FLAMMÈCHE.
LES AMIS
Eh bien! là vrai, on m'aurait dit ça dans le
temps, —
Que dis-je! on le leur aurait dit à eux-
mêmes,
Qu'ils n'eussent pas voulu le croire, — plus
que moi!
Les légitimistes dans les bras des bonapar-
tistes 1
Quoi de plus admirable!
Les assassins du maréchal Ney criblant de
baisers les assassins du duc d'Enghien 1
L'histoire est neuve, piquante, — à donner
de la joie et de l'inspiration aux Juvénal fu-
turs!
Ces hobereaux et ces truands réconciliés 1
Ces marguilliers et ces ribauds entrelacés!
Quels sujets pour Daumier!
Et quel dommage que Callot soit mort I...
Certes, rien d'étonnant à ce que les bona-
partistes, pratiques comme les jésuites, trou-
vent tous les chemins bons pour arriver à leur
but!
La honte qui les couvre est si épaisse qu'ils
ne se soucient plus de l'augmenter de temps
en temps d'une infamie nouvelle.
Mais, les Iégétimistes, c'est clillérent!
Ce parti d'imbéciles et de radoteurs qui
prétend nous ramener au droit de cuissage et
aux autres droits féodaux, ne comptait,— n'a-
vait de signification et de valeur,
Que par son inébranlable attachement à ses
principes, — par son immobilité dans sa foi,
— par ses scrupules de conscience, respec-
tables en somme, qui allaieut jusqu'à l'em-
pêcher d'envoyer son drapeau blanc chez les
teinturiers, — dût-il en échange de cette con-
cession recevoir un royaume!
A cause de cela, ou se refusait à le con-
fondre dans la tourbe de ces vils intrigants
qui bombinent, comme dit Rabelais, dans
l'ombre des broglie et des Rouher;
Et malgré son petit nombre, il était le s£ul,
de tous les vieux partis, qui eût gardé quelque
majesté.
Les bassesses qu'on voyait faire aux autres,
on l'en jugeait incapable!
Eh bien, non !
Il ne valait pas mieux que le reste !
Les ignominies ne lui coûtent pas, à lui non
plusl
11 s'emplit la bouche d'ordures, tout comme
un autre 1
11 lie avec un cheveu de Marie-Antoinette
et un cheveu d'Eugénie son lys et leur vio-
lette,
Chante Partant pour la Syrie sur l'air de
Vive Henri 1V.
Il va laver dans les fossés de Vincînne* sis
mains rougies à la place de l'Observatoire!
Je n'avais guère d'illusions,
Mais celle de la sincérité et de la loyauté
des légitimistes était un de ces rares oiseaux :
La voilà envolée pour jamais!...
C'est égal, il est doux quand on est répu-
blicain de se dire que les légitimistes sont
aussi méprisables que les bonapartistes.
ZED.
j L'INSPECTION DES INVALIDES
!
Il n'est que trop vrai !
Les efforts redoublés d'une presse infâme ont ob-
tenu celle mesure ignominieuse!
Tant de vieux et anciens serviteurs de Sa Majesté
N poléon III, glorieusement mort en exil à la suite de
sa blessure (voir lus premiers-Paris du l'ays.—Tant
de sénateurs, de présidents de tribunaux correction-
nels, de députés, rie préfets à poigne et a virements,
de vénérables juges d'instruction, d'honorables mou-
chards, que dans leur magnanimité, le gouvernement
du i septembre et l'Assemblée du 8 février avaient
comblés de pensions, se voient aujourd'hui obligés de
l'aire valoir de nouveau leurs droits à la retraite.
L'Assemblée, plus soucieuse que jadis des deniers
du pays, veut s'assurer s'ils ont vraiment mérité une
pension de retraite.
On ose prétendre que ce n'est pas au feu qu'ils ont
reçu leurs blessures !
On ose dire que ce n'est pas au service de l'Etat
qu'ils ont attrapé leurs rhumatismes !
U Il y en a même qui osent affirmer qu'ils n'ont ni
infirmités ni blessures, qu'ils se portent comme père
et mère. — et que si le petit Badinguet revenait^ on
les verrait tous jeter leurs béquilles comme Sixte-
Quint, et leurs emplâtres noirs comme Robert Ma-
caire.
Mais le monde est si méchant 1
Enfin, toujours est-il, qu'un comité de trois méde-
cins assermentés a été nommé et que les bonapartis-
tes sont tenus d'aller lui montrer leurs plaies; — la
voix publique prétend qu'ils en ont de hideuses!
Ils viennent donc défiler tour à tour devant les mé-
decins que cette besogne semble peu récréer.
1er médecin, à un malade. — Allons, mon-
sieur, — avancez, monsieur,— c'est vous qui
vous nommez Matagralobos?
matagralobos. —Oui, monsieur, c'est moi.
(On voit s'avancer un gaillard de six pieds de
haut, large à proportion, avec des moustaches
noires de 18 centimètres de long et le chapeau sur
l'oreille.)
1" médecin. —Vous avez allégué, pour faire
valoir vos droits à la retraite, la faiblesse de
votre constitution !
matagralobos. — Oui, monsieur...
2° médecin. — Diable ! cependant il me sem-
ble que vous êtes assez solide!...
matagralobos, d'une voix dolente. — Hélas !
mon bon monsieur, je me meurs !...
3" médecin. — Toussez un peu pour voir.
matagralobos. — Volontiers !...
(// tousse, — et, au bruit qu'il fait, trois vitres
de l'appartement se fêlent de haut en bas.)
1er médecin. — Nous voyons que vous êtes
d'une santé très-délicate.
matagralobos. — Comment donc! C'est-à-
dire que je suis obligé de manger tous les
jours quatre livres de viande et de boire six
litres de vin, sinon,je ne pourrais pas me sou-
tenir, et je viendrais tout à rienl...
1" médecin.— C'est bien; nous délibére-
rons sur votre cas tout à l'heure... (Aun au-
tre.) Eh bien! et vous, qu'est-ce que vous fai-
tes là? approchez donc!... M. Pipardin, je
crois?
pipardin.—Pour vous servirl...
1er médecin. — De quoi vous plaignez-
vous?
pipardin.— Mon Dieu! monsieur, je vais
vous dire... J'étais président d'une chambre
correctionnelle, et vous savez ce qu'on nous
envoyait de journalistes à condamner!...
Aussi, les séances élaient d'une longueurtelle
que mes collègues et moi nous en éprouvions
une grande fatigue, — et que moi surtout,
messieurs, qui vous parle, j'en ai contracté
des hémorrhoïdes à force d'être si longtemps
assis, — mais de» hémorrhoïdes!... (Avec un
sourire ironique :) Voulez-vous que je vous les
montre?...
2° médecin.—Non, non, c'est inutile!
3e médecin. — Nous vous croyons sur pa-
role I
pipardin. —Alors, je garde ma pension?
1er médecin.— Nous relaterons dans notre
rapport ce que vous venez de nous dire!...
Allons, à un autre !
FÉlaRDEAU. — Moi, c'est bien simple , al-
lez... J'étais secrétaire du préfet de police et
j'étais d'un tempérament faible... Or, mon
chef m'emmenant souper assez souvent avec
lui, je me trouvais obligé de faire la noce
plus que ça ne m'était permis par les méde-
cins;— ce qui fait qu'aujourd'hui j'ai des
cailloux dans la vessie, — comme Sa Majesté,
quoi!...
2' médecin. — Eh! morbleu, vous n'aviez
qu'à n'y pas aller!
félardeau.—Impossible!... Forcé de sui-
vre mon chef!... Le devoir avant tout!
3e médecin. — Retirez-vous... Nous aurons
soin de vous !...
1er médecin. — Quelle diable de besogne
nous a-t-on ici donnée?
2* médecin. — Ce sont des malades de la
Cour des Miracles... Ah! mais, attendez donc,
il me semble qu'en voilà un qui est vraiment
infirme.
1er médecin. — Approchez, mon ami... Com-
ment avez-vous perdu ce bras-là?
MALACOttNi. — Voilà I C'était du temps des
émeutes du boulevard Montmartre; vous sa-
vez bien, en juin 69... vous connaissez bien
ça !...
2* médecin.—Oui, oui, passez!
malacogne. — Pour lors, que j'étais sans
place, vu que ma femme avait été enlevée
dans une râlle et que j'avais pu rien y faire,
malgré que j'avais des protections... Four
lors, j' battais la péqraine (1), une belle af-
faire!... Mb de braise (2) !... Je me serais fais
curé!... Pour lors, que je rencontre un an-
cien truffard avec qui que j'avais liché dans le
temps à l'École militaire... — Té! qu'y dit,
c'est Malacogne, quelle trompette! T'as donc
pas boulolté depuis trente plombes (3).— Et
mèche (4) 1 que je lui réponds. — Viens donc
avec moi, qu'y mô dit, j' suis dans la rousse à
Badingue ; nous tripotons l'émeute sur le bou-
levard Montmartre... J'ai une escouade, je
t'enrôle. — C'est il fatigant? que je dis.— Pas
trop, qu'y répond; tu viens ce soir à cinq
(1) Je mourais de faim.
(2) Pas d'argent.
(3) Heures.
(4) Et plus.