9- ANNEE. — N° 416
PARIS ET DEPARTEMENTS : 15 CENTIMES LE NUMERO
30 Mars 1879
REDACTION
r. Neuw-du-PetiU-Champt
PARIS
ABONNEMENTS
^AHIS ET DÉPARTEMENTS
Cau....... 8 fr. »
Six mois.... 4 »
Trois mois... £ OO
ADRESSER
^«ttxe» et Mandats à M. Madré, *
directeur-gérant,
Pi r. Neuve-des-Petits-Champ»
ADIWNISTKATIOh
"7, r. Neuvt-àes-t etitt-Champ»
PARIS
ABONNEMENTS
P4.YS DE L'UNION POSTALE
Un an....... fltf fr. »
Six mois..... 5 »
Trois mois... 8 SU
ahukoncjbs
Au bureau du Journal
et chez
M. BEAUDOIN, 9, pl. de la Boum*
La censure, dont M. Anatole de la Forge est le chef, nous ayant refusé CINQ CROQUIS cette semaine,
^hose qui ne nous était jamais arrivée sous le Seize Mai, nous sommes obligés de paraître sans dessin.
i c
Il nous vient, d'une source plus sérieuse que celle de Lourdes, une étrange
nouvelle :
fous nos ministres et fonctionnaires ne sont autre chose que de célèbres
°adingredins-> travestis depuis le Quatre-Septembre avec un art inouï.
Le Quatre-Septembre, tout d'abord, n'a été qu'une pochade, digne de figurer
au réPertoire du Palais-Royal.
Sentant la partie compromise , les bonapartistes eurent recours à une
Manœuvre dont la réussite égala l'audace et l'habileté.
Ils arrêtèrent, d'un seul coup, presque tous les républicains influents,
et les remplacèrent par des hommes à eux, habilement grimés, qui prirent
eurs noms, leurs habitudes, enfin s'introduisirent dans leurs peaux. C'est ainsi
^Ue> dans le gouvernement de la défense nationale, le véritable Trochu, homme
talent, fut joué par un vieux sacristain breton, ancien caporal aux infirmiers.
^e yrai Jules Favre gisait dans une cave des Tuileries, pendant que Bourbeau,
^quillé et couvert de filasse mal peignée, allait manquer de prestige, comme
°Q sait, à Ferrières. Gambetta se douta de l'affaire; c'est même ce qui le décida
a Partir en province.
Depuis, rien n'a changé, bien au contraire. Chaque fois qu'un républicain
binent arrive au pouvoir, il est enlevé le lendemain, expédié mystérieusement
Qs une oubliette inconnue, et remplacé par un Sosie badingredin.
Quelque étrange que paraisse cette histoire, elle est absolument véridique.
Que nos lecteurs veulent bien se donner la peine de réfléchir un peu, ils le
^connaîtront d'ailleurs eux-mêmes.
S'il en était autrement, comment expliqueraient-ils le brusque changement
clUl s'opère chez tous les républicains au lendemain de leur élévation à un minis-
^re ou à une haute fonction administrative quelconque?
Comment expliqueraient-ils qu'un homme comme M. de Marcère se soit
c°nduit d'une façon aussi insensée dans l'affaire de la Lanterne et de la préfecture
^e police; qu'un Léon Say, fils d'un savant économiste, ait compromis aussi
^aisément le crédit de la France; qu'un Léon Renault, jurisconsulte implacable,
Pieusement rengainé ses menaces solennelles contre lesdeBroglie et Fourtou,
compères de notre gouvernement impérial grimé, qu'ils doublent, quand la
situation devient trop difficile pour lui, et qu'il éprouve le besoin de se redonner
du crédit?
Si Devienne, mal empaillé, ne s'était pas glissé cauteleusement dans le radical
Lepère, si Piétri en personne n'avait point fait disparaître l'honnête et courageux
Anatole de la Forge, pour le doubler, comment expliqueraient-ils que cesimplacables
adversaires de l'empire appliquent les décrets du lendemain du coup d'Elat,
décrets qu'il est si facile de laisser dormir, comme tant de lois, en attendant que
le Parlement daigne les abroger ?
Comment expliqueraient-ils, notamment, que le directeur actuel de la presse,
qui combattit si vaillamment pour sa liberté dans le Siècle, la persécute mainte-
nant, quil ait accepté la position répugnante de chef de la censure, que lui, le
héros de Saint-Quentin, impassible en face de la mitraille, tremble devant la
souquenille d'un calotin, et interdise en huit jours à un journal satirique cinq
dessins, qu'il eût autorisés la veille, qu'il autorisera demain, et devant lesquels la
censure de 18G9 se fût montrée clémente?
Comment expliqueraient-ils que cette censure des dessins et la censure dra-
matique existent encore, que le crayon et lu scène ne rentrent pas dans le droi
commun, pour n'être plus justiciables que de la police correctionnelle, s'ils
outragent quelqu'un ouïes mœurs, comme un insulteur public, un libelle diffama
toire, un émule du comte de G..., un article de journal par trop grivois ou un livre
du marquis de Sade ?
Comment expliqueraient-ils enfin que des républicains purs, intègres, ambi-
tionnant seulement le bonheur public, s'abaissent ainsi par de honteuses cour-
bettes devant des hommes influents et s'avilissent par de lâches compromissions
avec leur conscience ou de plates renonciations de principes, uniquement pour
conserver leurs places et leurs appointements?
Platitude inutile, d'ailleurs. Le peuple se fatigue. Ces perpétuelles contradic-
tions des hommes avec eux-mêmes, de leur conduite présente avec leurs prin-
cipes et leurs promesses passées, paraît louche aux républicains et les exaspère.
Ils pressentent aujourd'hui la vérité. Demain elle éclatera entière à leurs yeux
descillés... Alors il faudra bien que la mascarade d'empire, que nous subissons
depuis neuf ans, disparaisse pour faire place à la véritable République. La
chienlit perpétuelle sera finie ce jour-là. Espérons qu'il est proche!
HfîittY Vaudémoki.
PARIS ET DEPARTEMENTS : 15 CENTIMES LE NUMERO
30 Mars 1879
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^«ttxe» et Mandats à M. Madré, *
directeur-gérant,
Pi r. Neuve-des-Petits-Champ»
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"7, r. Neuvt-àes-t etitt-Champ»
PARIS
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Trois mois... 8 SU
ahukoncjbs
Au bureau du Journal
et chez
M. BEAUDOIN, 9, pl. de la Boum*
La censure, dont M. Anatole de la Forge est le chef, nous ayant refusé CINQ CROQUIS cette semaine,
^hose qui ne nous était jamais arrivée sous le Seize Mai, nous sommes obligés de paraître sans dessin.
i c
Il nous vient, d'une source plus sérieuse que celle de Lourdes, une étrange
nouvelle :
fous nos ministres et fonctionnaires ne sont autre chose que de célèbres
°adingredins-> travestis depuis le Quatre-Septembre avec un art inouï.
Le Quatre-Septembre, tout d'abord, n'a été qu'une pochade, digne de figurer
au réPertoire du Palais-Royal.
Sentant la partie compromise , les bonapartistes eurent recours à une
Manœuvre dont la réussite égala l'audace et l'habileté.
Ils arrêtèrent, d'un seul coup, presque tous les républicains influents,
et les remplacèrent par des hommes à eux, habilement grimés, qui prirent
eurs noms, leurs habitudes, enfin s'introduisirent dans leurs peaux. C'est ainsi
^Ue> dans le gouvernement de la défense nationale, le véritable Trochu, homme
talent, fut joué par un vieux sacristain breton, ancien caporal aux infirmiers.
^e yrai Jules Favre gisait dans une cave des Tuileries, pendant que Bourbeau,
^quillé et couvert de filasse mal peignée, allait manquer de prestige, comme
°Q sait, à Ferrières. Gambetta se douta de l'affaire; c'est même ce qui le décida
a Partir en province.
Depuis, rien n'a changé, bien au contraire. Chaque fois qu'un républicain
binent arrive au pouvoir, il est enlevé le lendemain, expédié mystérieusement
Qs une oubliette inconnue, et remplacé par un Sosie badingredin.
Quelque étrange que paraisse cette histoire, elle est absolument véridique.
Que nos lecteurs veulent bien se donner la peine de réfléchir un peu, ils le
^connaîtront d'ailleurs eux-mêmes.
S'il en était autrement, comment expliqueraient-ils le brusque changement
clUl s'opère chez tous les républicains au lendemain de leur élévation à un minis-
^re ou à une haute fonction administrative quelconque?
Comment expliqueraient-ils qu'un homme comme M. de Marcère se soit
c°nduit d'une façon aussi insensée dans l'affaire de la Lanterne et de la préfecture
^e police; qu'un Léon Say, fils d'un savant économiste, ait compromis aussi
^aisément le crédit de la France; qu'un Léon Renault, jurisconsulte implacable,
Pieusement rengainé ses menaces solennelles contre lesdeBroglie et Fourtou,
compères de notre gouvernement impérial grimé, qu'ils doublent, quand la
situation devient trop difficile pour lui, et qu'il éprouve le besoin de se redonner
du crédit?
Si Devienne, mal empaillé, ne s'était pas glissé cauteleusement dans le radical
Lepère, si Piétri en personne n'avait point fait disparaître l'honnête et courageux
Anatole de la Forge, pour le doubler, comment expliqueraient-ils que cesimplacables
adversaires de l'empire appliquent les décrets du lendemain du coup d'Elat,
décrets qu'il est si facile de laisser dormir, comme tant de lois, en attendant que
le Parlement daigne les abroger ?
Comment expliqueraient-ils, notamment, que le directeur actuel de la presse,
qui combattit si vaillamment pour sa liberté dans le Siècle, la persécute mainte-
nant, quil ait accepté la position répugnante de chef de la censure, que lui, le
héros de Saint-Quentin, impassible en face de la mitraille, tremble devant la
souquenille d'un calotin, et interdise en huit jours à un journal satirique cinq
dessins, qu'il eût autorisés la veille, qu'il autorisera demain, et devant lesquels la
censure de 18G9 se fût montrée clémente?
Comment expliqueraient-ils que cette censure des dessins et la censure dra-
matique existent encore, que le crayon et lu scène ne rentrent pas dans le droi
commun, pour n'être plus justiciables que de la police correctionnelle, s'ils
outragent quelqu'un ouïes mœurs, comme un insulteur public, un libelle diffama
toire, un émule du comte de G..., un article de journal par trop grivois ou un livre
du marquis de Sade ?
Comment expliqueraient-ils enfin que des républicains purs, intègres, ambi-
tionnant seulement le bonheur public, s'abaissent ainsi par de honteuses cour-
bettes devant des hommes influents et s'avilissent par de lâches compromissions
avec leur conscience ou de plates renonciations de principes, uniquement pour
conserver leurs places et leurs appointements?
Platitude inutile, d'ailleurs. Le peuple se fatigue. Ces perpétuelles contradic-
tions des hommes avec eux-mêmes, de leur conduite présente avec leurs prin-
cipes et leurs promesses passées, paraît louche aux républicains et les exaspère.
Ils pressentent aujourd'hui la vérité. Demain elle éclatera entière à leurs yeux
descillés... Alors il faudra bien que la mascarade d'empire, que nous subissons
depuis neuf ans, disparaisse pour faire place à la véritable République. La
chienlit perpétuelle sera finie ce jour-là. Espérons qu'il est proche!
HfîittY Vaudémoki.