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Le Journal d'Abou Naddara = Abū Naẓẓāra = The Man with the Glasses = garīdat abī naẓẓāra = The Journal of the Man with the Glasses = Journal Oriental Illustré — Paris, 1886

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banale humanité, ou plutôt détournez ce» usage» et ces lois de leur
acception générale pour ne les invoquer qu'à votre profit. Riez-vous
des gouvernements et des peuples ; faites tout impudemment en vue
de votre dominati'û'n exclusive et égoïste, omnia impudenter prodomi-
natione, et cela, pour vous réveiller un beau matin, avec tous ces
psitt, psitt, dans les oreilles ! La corde que j’ai dressée e»t-elle donc
si tendue qu’elle menace de se rompre ?
Voix d’Abou Naddara : Oui.

LE MINISTÈRE GOBLET
Au nom du Parti National Egyptien, qu’il a l'honneur de
représenter en France, le cheikh Abou Naddara salue respec-
tueusement le ministère Goblet et du fond de son cœur lui
souhaite prospérité.
L’humble proscrit de la vallée du Nil est sûr que le nouveau
Cabinet ne se départira pas de la ligne politique suivie par
le Ministère Freycinet dans les affaires d’Egypte.
Il a comme garants et le choix auquel s’est arrêté le très
honorable M. Grévy, et l’acceptation par l’éminent M. Goblet,
de la présidence du Conseil des Ministres.
La Muse d’Abou Naddara espère chanter bientôt les louanges
du Ministère Goblet, en voyant, délivrée des Anglais, l’Egypte
rendue aux Egyptiens.
Paris, ce 28 novembre 1886.
Au cheikh Ab ou-Naddara,
Cher confrère et ami,
Ai-je eu raison? Etes-vous content d’avoir daigné suivre
mon conseil? Votre présence a-t-elle été sympathiquement
accueillie? Vos discours ont-ils été applaudis chaleureusement ?
La cause des revendications de l’Egypte a-t-elle, grâce à vous,
fait un grand pas vers ia solution nécessaire ? Castelar vous
a-t-il fourni des occasions bonnes ?
Je suis vraiment heureux que vous ayez accepté d’assister
à nos fêtes et qu’elles aient eu tous ces beaux résultats pour
vous et pour votre patrie.
Vous avez enfin pu constater clairement la sympathique
indignation inspirée aux populations riveraines de la Méditer-
ranée par l’effroyable situation de l’Egypte. Vous avez vu,
cher confrère et ami, combien nous aimons tous, en France,
votre belle vallée du Nil; combien les souffrances de vos
concitoyens nous touchent le cœur. Vous avez surtout pu voir
avec quel empressement l’unanimité des journaux parisiens de
toutes les opinions s’est manifestée en votre faveur, repro-
duisant avec éloges, commentant avec émotion vos admirables
improvisations, vos éloquents discours prononcés aux ban-
quets de l’Union Méditerranéenne, de Y Association patrio-
tique arménienne, del’Allouette, de Marmite, etc., offerts
par nous tous à Emilio Castelar !
Eh bien ! maintenant, ce n’est pas de cela que je vous fé-
licite : des ministres, des sénateurs, des députés, des publi-
cistes éminents l’ont fait avant moi et suffisamment.
Je vous félicite, aujourd’hui, du résultat heureux et inat-
tendu de vos paroles ; car, hier, à la Chambre, j’ai entendu
presque ces mêmes paroles revendicatrices prononcées, du
haut de la tribune française, par MM. Delafosse et de Frey-
cinet.
Oui, je me hâte de vous en informer, achetez le Journal
Officiel, vous y lirez la répétition de tout ce que vous avez
dit, il y a huit jours, au 4e banquet offert à Castelar !
L’honorable député Jules Delafosse a dit, comme vous,
comment l’Angleterre est entrée en Egypte ; comment elle
s’est substituée à nous dans l’administration de ce pays ;
comment la tutelle administrative et financière que
nous l’avions admise à partager avec nous, sous le nom
de condomini um, a été accaparée par elle et s’est terminée
par notre éviction.
Comme vous, il a dit encore que la perte de l’Egypte a été
pour nous, pour nos intérêts commerciaux, pour le crédit
de 'notre pays, pour le rayonnement de notre influence dans
le monde, une des plus grandes catastrophes que la France
ait jamais subies.
Comme vous, il a nettement établi que du jour où l’Angle-
terre est entrée en Egypte, elle a institué à l’état chronique
cette confusion dont se plaint lord Salisbury. Elle a acca-
paré toutes les institutions, tous les services, tous les pou-
voirs ; elle n’a laissé rien debout de ce qui était interna-
tional ou égyptien : elle a occupé de la base au sommet
/'administration, mot qui ne répond là-bas à aucune réalité,
car il n’y a plus d’administration en Egypte. L’Angle-
terre a seulement envoyé là-bas un nombre considérable
de fonctionnaires, qui touchent des émoluments mons-
trueux, mais qui n’administre rien du tout.
Vraiment, il me semblait vous entendre, et je m’attendais
à chaque instant à voir l’orateur se servir, lui aussi, de cette
belle expression de « gâchis » dont vous aviez caractérisé

John Bull : Qui • dit oui ?
Voix d’Abou Naddara : C'est moi, ton ancien et sincère ami, mon
cher John Bull, moi, James Sanua. Hi! hi.'hi!
John Bull : Et pourquoi ris-tu ’
Voix D’Abou Naddara : Parce que je songe que si court que
vienne à se rompre la corde que tu as tendue, il t’en restera toujours
assez pour te pendre. Ç’est la grâce que te souhaitent tous les bons
égyptiens.

pour nous l’état gouvernemental actuel de votre si malheu-
reux pays.
Et le même phénomène a eu lieu, tandis que M. de Frey-
cinet parlait à son tour.
L’honorable président du Conseil des ministres de la Répu-
blique française a dit, comme vous, que celui qui est maître
de l’Egypte est maître de la Méditerranée, et que jamais la
France, quoi qu’il arrive, ne doit se faire à l’idée que
l’Egypte puisse rester aux mains d’une grande puissance
européenne.
Comme vous, il a dit encore que l’heure est venue où il
faut que la solution de cette question intervienne ; cette
solution, est nécessaire,- elle est nécessaire pour l’équilibre
général des puissances; elle est nécessaire pour la bonné
continuation de la bonne amitié qui existe entre VAngleterre
et nous. [Bonne amitié! Cela vous ne l’aviez point dit,
confrère !...)
En somme, de Freycinet et Delafosse vous ont pleinement
donné raison ; ils vous ont publiquement, officiellement ap-
prouvé ; ils ont solennellement approuvé; ils ont solennel-
lement dit comme vous, que Y Egypte, terre égyptienne, doit
appartenir aux Egyptiens.
Voilà, cher ami, ce dont je vous félicite cordialement, au
nom des partisans de l’Union Méditerranéenne.
A présent, si. vous voulez rire (après avoir pleuré de joie),
lisez ce que vont écrire les Journalistes anglais à l’occasion de
cette manifestation du Parlement français, occasionnée par
la vôtre.
Amitiés vraies,
A. Gromier.

Nous reproduisons cette aimable et gracieuse lettre, qui est au-delà
du mérite de notre directeur et re’dacteur en chef, en remerciant son
auteur, M. M.-A. Gromier, qui est, comme l’a dit M. Marbeau dans sa
Revue française, la cheville ouvrière de l’AUiance armeno-greco-latiae
et de l'Union douanière méditerranéenne.
Nous remercions notre cher confrère, M. Gromier, aussi pour avoir
accueilli dans son ouvrage sur l’Union méditerranéenne, les lettres que
le Cheikh Abou Naddara a reçues de deux officiers du Mahdi et d’Os-
man Digna, révélant les vérités cachées jusqu’à ce jour sur la guerre
du Soudan.
La Rédaction.

Au très honorable Monsieur Jules Grévy, Président
de la République. ?
DU CHEIKH ABOU NADARA
Sur la mort du général Pittié, chef de la Maison militaire
du Président de la République et Secrétaire général de
la Présidence. v
Le général Pittié est mort. *
Mort! non, frères, il ne l’est pas. Son corps est descendu
dans la tombe ; ses membres seront bientôt réduits, en pous-
sière: mais lui, lui,le brave soldat, le savant distingue, le poete
exquis et charmant, lui, vit éternellement dans le cœur de ses
admirateurs sans nombre. ,
Nos yeux ne contempleront plus ses traits empreints de
noblesse, de bienveillance et de fierté; mais toujours sereine et
douce, son image se reflétera dans le miroir de nos âmes.
Le son de sa voix sympathique ne charmera plus nos
oreilles; mais ses paroles, inspirées par la vertu et marquées
au coin delà sagesse, resteront inaltérables, gravées dans notre
mémoire. , . , , T
Et pourtant, il ne bat plus, helas ! ce cœur généreux ! La
Patrie française a perdu un de ses plus glorieux enfants,
l’Armée un de ses chefs les plus intrépides, la Poésie, un de
ses plus fervents apôtres.
Qu’Allah, clément et miséricordieux, répande sur la veuve
et les orphelins qui le pleurent, le trésor de ses consolations !
Qu’il leur donne la force nécessaire pour supporter l’irréparable
perte d’un époux si dévoué, d’un pere si affectueux 1
Que le Maître tout puissant de l’Univers accueille parmi ses
élus dans ses célestes parvis, l’âme pure de ce mort illustre!
Il y priera encore pour la grandeur et la gloire de la France
et pour la prospérité de ses enfants.
Amen!
 
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