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Le Journal d'Abou Naddara = Abū Naẓẓāra = The Man with the Glasses = garīdat abī naẓẓāra = The Journal of the Man with the Glasses = Journal Oriental Illustré — Paris, 1906

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Issue 8 (10.1906)
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https://doi.org/10.11588/diglit.56682#0031
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Les femmes chantant :
Exauce tous nos vœux ardents,
Allah. Dieu de miséricorde,
Et toutes les gloires accorde
A l’Empereur des Ottomans.

Moi :
L’Egyptien te considère
Son Souverain national
Il T’aime, ô Sire, et Te vénère
Et te sera toujours loyal
Tous :

Longue vie et santé parfaite
Et des triomphes incessants
Au Successeur du grand Prophète,
Au Commandeur des vrais Croyants !
Abou Naddara.

Nous sommes heureux de publier la lettre suivante que nous venons de
recevoir de Mme Théodossia Sartinska Stéfanovitch, ex-interprète du
Harem Impérial de S. M. /. le Sultan et propriétaire-directrice de la
Revue Turco-Française « Maarifet », et. en même temps, nous sommes
émerveillés de constater chez la gracieuse personne de cette érudite
circassienne un dévouement infini au Trône qui mérite la sollicitude
Impériale et P admiration de tous ses fidèles sujets.
LETTRE DE TURQUIE
Constantinople, 26 Août 1906.
Vénérable Cheikh,
Sous les heureux auspices d’un Ami fidèle à S. M. I. le Sultan, et dé-
voué à vous, je me fais un plaisir de vous adresser ma première lettre,
pour constater la réjouissance de tous les Ottomans au recouvrement
de la santé de Notre Padischah.
Permettez-moi, cher et vénérable Cheikh, de saisir cette occasion pour
vous prier, avec mes confrères de la presse locale, d’exprimer notre
reconnaissance à la presse parisienne, d’avoir fêté le rétablissement de
Notre Bien-Aimé Souverain.
L’indisposition de Sa Majesté, quoique légère, nous désola, car nous
voyons en la Personne sacrée de notre Calife, non-seulement l’Emérite
Réformateur, l’infatigable marcheur vers le progrès et la civilisation,
mais aussi et suri ont le Monarque bon et compatissant envers tous,
sans distinction de race et de religion. Son nom seul suffit à animer les
faibles, à donner la consolation aux affligés, l’espoir aux malheureux.
Abdul Hamid II, par les conceptions politiques et la largeur de Ses
vues en matières administratives, est parvenu à donner aux rouages
compliqués des différentes administrations de Son Etat une marche
régulière et aux questions du dehors une direction qui font l’admiration
de l’Europe entière.
En effet, que d’améliorations ont été introduites en Turquie depuis
1876, époque où Notre glorieux Souverain a pris possession dès-affaires
de Son Etat : Ecoles en nombre considérable, développement de l’ins-
truction publique dans la plus large mesure ; réseaux de chemin dé fer
sur un grand nombre de points importants, routes carrossables un peu
partout, caisses agricoles, caisses d’épargnes et de secours, bazar de
charité, asile des pauvres, hôpitaux, et tant d’autres institutions pu-
bliques et privées, indiquant les bonnes intentions du Souverain, sont
en pleine prospérité partout où elles ont été patronées par Notre
Padischah.
Le cadre de ma présente lettre ne me permettant pas de développer
plus largement les Progrès vers le Bien qui ont été accomplis depuis
l'avènement au Trône de Notre Empereur, j’arrête là mon simple
exposé, en ajoutant combien je me sens heureuse de voir l’enthousiasme
qui remplit tous les cœurs devant le retour à la santé de Notre Padis-
chah adoré, et je m’unis à Ses fidèles sujets pour prier Dieu d’accorder
au Souverain qui nous gouverne longue vie pour le bonheur et la gloire
des Ottomans. Théodossia Sartinska.
S. M. I. LE SULTAN
Jugé par un Diplomate anglais.
- Le Daily Mail vient de publier un très intéressant article dans lequel
un diplomate anglais, mettant de côté les préventions et les perfidies
de la politique britannique, rend pleine et entière justice aux admi-
rables qualités, aux talents et à l’habileté de ,S. M. 1. le Sujtan. Nous
sommes heureux de résumer l’opinion impartiale de l’homhie d’Etat,
anglais et de reproduire fidèlement les passages les plus caractéris-
tiques de son argumentation.
Le diplomate rappelle d’abord qu’une certaine agitation s’est mani-
festée ces derniers temps dans le monde de l’Islam. Ce mouvement
« plutôt spasmodique que général » pourrait s’accroître et s’aggraver
si les Puissances occidentales, et surtout l’Angleterre, ne modifient pas
leur attitude à l’égard de la Turquie et de son Chef.
« Nous ne devons pas oublier, remarqne l’Anglais, que nous avons
sous notre domination plus de pays musulmans que toute autre nation
et nous aurions donc à souffrir plus que tout autre d’une agitation
Islamique » on ne s’est pas assez rendu compte du progrès de l’éduca-
tion parmi les Mahométans et de la divulgation des nouvelles par la
presse indigène. Il est donc certain que les Musulmans ont dù être
froissés de voir sans cesse leurs droits méconnus et leur Chef maltraité
par le plus grand nombre des journaux de Londres
On a aussi trop négligé, chez nous, la situation du Sultan comme
Calife. Si le Souverain a conquis une grande influence en relevant la
Turquie de sa situation amoindrie après la guerre turco-russe, cela
n’est rien en comparaison du prestige qu’il a conquis comme Calife.
Ce qu’il a perdu comme souverain était territorial, par suite du traité
de Berlin, il l’a bien amplement regagné en autorité sur toutes les
populations musulmanes qui se sont groupées autour du Califat.
« Comme Calife, il est regardé comme le protecteur et le défenseur de
tous les intérêts Musulmans et à sa Cour résident des représentants
de toutes les communautés Mahométanes, par lesquels il se tient en
relation avec toutes les parties du monde. »
Tous ceux qui ont assisté au Selamlik à l’époque du pélérinage de
la Mecque, ont été frappés de la diversité des races et des nationalités
présentes à la porte de la Mosquée où se rendait le Sultan. Tous ces

pèlerins, venus des pays les plus lointains, n’ont d’autre idée que de
saluer le Calife. Ils voient aussi ces milliers de soldats turcs, bien
armés, ces vaisseaux de guerre, avec leurs énormes canons, ancrés
dans la Corne d’Or ; en traversant le Bosphore et les Dardanelles, ils
contemplent ces forts et ces batteries qui défendent les abords de la
capitale. Toutes ces choses, ils les racontent à leurs correligionnaires,
soit dans les villes saintes, soit à leur retour dans leur patrie ; de là
l’immense respect que tous les Musulmans professent pour leur Chef.
On ne doit pas oublier, non plus, les progrès énormes que fait le
Mahométisme, surtout en Afrique, où cette religion dominera sans
doute tout le Continent. De plus, beaucoup de Japonais et de Chinois
se sont convertis à l’Islam « si le Panislamisme, ajoute l’Anglais,
devient une force perturbatrice dans notre empire, nous ne le devons
qu’à nous-mêmes, à notre politique injuste vis-à-vis du Sultan et à
notre dûreté à l’égard des Musulmans » Pendant ce temps là, l’Empe-
reur d’Allemagne ne néglige aucune occasion de se poser en protecteur
des Mahométans et obtient des avantages commerciaux et des conces-
sions.
Les Turcs n’ont d’ailleurs que trop sujet de se plaindre des injustices
qu’on commet à leur égard. Jamais l’intention des négociateurs du
traité de Berlin n’avait été de créer une Bulgarie, qui fût une menace
pour la paix de l’Europe. D’année en année, les Bulgares ont accru
leurs forces militaires sans que les Puissances y fassent aucune objec-
tion; au contraire, celles-ci se sont préoccupées d’amoindrir et de
limiter les forces du Sultan.
Les Turcs se sont vus enlever la Roumélie orientale et le même
système sera suivi en Crète si les puissance ne garantissent pas loyale-
ment la sécurité des habitants musulmans de Pile.
Au lieu de récriminer contre la Turquie et de l’accuser d’être germa-
nophile, il vaudrait mieux essayer de gagner son amitié par des pro-
cédés loyaux, équitables et bienveillants.
LA MORT D’IBRAHIM PACHA
Al Montenelbi, notre poète arabe immortel, disait : Le chagrin abat
mon courage et la fermeté d'âme le relève ; mes larmes obéissantes et re-
belles cèdent au combat de ces deux affections contraires. C’est ainsi qu’au-
jourd’hui je pense exprimer la perte irréparrable que la mort de ce grand
homme me fait éprouver.
Oui, la disparition inattendue de cet ami affectueux et affectionné,
qui toujours eût pour moi une tendresse filiale, m’a frappé et m'a
anéanti.
Ibrah’m ! Ibrahim ! Tes nobles amis admiraient en toi les hautes
vertus et les qualités supérieures ; maintenant tous pleurent sur toi, car
ils ont perdu leur sage conseiller, et. leur frère toujours prompt à les
défendre contre les envieux et les adversaires.
Que de familles malheureuses tu as sauvées de la misère ! Que de
veuves, que d’orphelins ont trouvé en toi un magnanime bienfaiteur.
Ton âme sensible, ton cœur généreux avaient pitié des malheurs du
prochain et ne pensaient qu’à les soulager.
Ta rectitude, ta droiture et ton honnêteté t’ont fait trouver grâce aux
yeux de ton Auguste Maître, qui t’aimait, t’appréciait et te comblait de
faveurs.
Ton âme sainte et pure, accueillie par le Très-Haut, prie à cette heure
pour la complète guérison de notre Souverain bien aimé, et pour le
bonheur et la prospérité des millions de ses fidèles sujets.
La postérité honorera ton nom et le père rappellera à son fils les
vertus sans nombre d’ibrahim Pacha, ex-grand maître des cérémonies
de S. M. I. le Sultan. Aboü Naddara.

Extrait de Y Athénée de France, de septembre 1906 :
L’ŒUVRE DE CINQUANTE ANS D’ABOU NADDARA
(Molière Egyptien)
Journaliste, conférencier, dramaturge.
Un grand nombre de lecteurs nous ayant souvent exprimé lç désir
de voir publié dans l’Athénée, un résumé compact de l’œuvre dé nota
vénérable ami le Cheikh Abou Naddara, dont nous fêtions il y a
un an les noces d’or littéraires en compagnie de confrères français
et étrangers, nous sommes heureux de pouvoir aujourd’hui satisfaire
leur légitime curiosité, grâce à l’obligeance de M. Parthénis, publiciste
égyptien qui -a bien voulu npus documenter.
Comme journaliste,' le Cheikh a écrit des articles, des notices, des
critiques, des contes, des nouvelles et des poésies dans les revues et
journaux arabes, français, italiens et anglais depuis 1855. Il a été fon-
dateur, directeur et rédacteur en chef de dix feuilles, trois existent
encore, dont une YAbou Naddara, qui sous sa direction marche dans sa
trentième année et se tire à plusieurs milliers d’exemplaires.
Comme orateur, il.a prononcé huit cent cinquante-trois discours et
fait cent soixante-cinq conférences, dont deux à Lisbonne et à Paris
présidées en i889 et toflO'par Dom Ptedro, empereur du Brésil.
Comme écrivain et dramaturge, le Cheikh a composé en langues
différentes, prose et vers, quarante ouvrages, dont trente-deux pièces
de théâtre en arabe, cinq volumes en italien et dix en français, dont
Les Sœurs latines, le dernier paru, en six langues, prose et vers, fut
dédié à M. Loubet, en 1905, alors Président de la République Française
et agréé par lui.
Et le Cheikh J. Sanua Aboa Naddara, Chaër-el-Molk- et Molière
Egyptien, continue sa brillante carrière, le nombre des années n’abat
pas son courage. Il répond aux attaques des envieux par ces vers du
poète arabe.
« Lorsque Dieu veut exposer au grand jour une vertu qui restait
cachée dans l’ombre, il arme contre elle la langue de l’envieux. Si la
flamme ne s’attachait pas à tout ce qui l’environne, on ne connaîtrait
pas le parfum exquis de l’aloès ».
Comme on le voit, le Cheikh a une vie bien remplie. Nous croyons
qu’il y a peu de confrères qui puissent se flatter d’en avoir fait autant.
Bonneval,
Directeur de V Athénée de France.
 
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