Quatrième Année
FONDATEUR
Directeur et. Rédacteur en Chef
J. SANUA ABOU NADDARA
43, Rue Richer, PARIS
Obnsfî b'Wbou pobbara
Toute communication et toute demande d'abonnement doivent être adressées an Directeur du Journal
N° 2 — Juillet 1902
ABONNEMENTS :
Un An.|Sf
Avec le Joutai d'Abou
Naddara et L'Attawadod. 26
CONTENU DE NOTRE TEXTE ARABE
La conclusion de la paix anglo-boër, la satisfaction générale, la
grande joie en Angleterre et dans le sud de l'Afrique, l'éloge des soldats
boërs et de leurs chefs au Parlement et dans les journaux anglais.
— Explication du dessin ci-dessous et sa légende arabe. — La France,
nos félicitations pour ses élections législatives et son nouveau ministère.
— La terrible catastrophe de la Martinique, la douloureuse impression
qu'elle fit dans le monde entier, empressement du Ministère des Colonies
pour l'envoi des secours et le don généreux de S. M. I. le Sultan pour
les sinistrés. — L'Italie ses relations amicales avec l'Empire Ottoman,
son ambassadeur au palais de Yildiz, l'assurance que son gouverne-
ment n'a aucune vue sur la Tripolitaine, la haute bienveillance de
l'Auguste Calife de l'Islam pour le digne représentant de S. M. le Roi
Victor-Emmanuel et le Grand Cordon qu'Il lui a conféré. — L'Espagne,
les belles fêtes du couronnement de S. M. T. C. le Roi Alphonse XIII et
la gracieuse lettre que l'aimable M. Aguilar, secrétaire de la Reine
Douairière nous a adressée pour nous remercier, au nom de Sa Majesté,
pour nos félicitations et notre article élogieux. — La Perse, l'arrivée
de S. M. I. le Schah en France et l'ode magnifique que notre eonfrère,
Mohammed Effendy Abd el Fattah, déaie à l'Auguste Souverain
d'iram. Abou Naddara.
LA PAIX
Le Fellah. — Salut, brave Boër, intrépide défenseur du Transvaal
qui, depuis trente lunes, te bats comme le lion de ton désert pour la
liberté de ta patrie bien aimée. Le vénérable Cheikh Abou Naddara qui,
depuis le commencement de la guerre, plaide ta sainte cause, célèbre
ta valeur et t'attire les vives sympathies de l'Orient et de l'Occident,
me charge de te présenter ses sincères félicitations pour la conclusion
de la paix et t'offrir de sa part ce bouquet de roses nilotiques parfu-
mées d'amour, d'estime et d'admiration pour toi et les chefs valeureux.
(Il lui offre le bouquet.)
Le Boër. — Merci, aimable Fellah, vaillant agriculteur d'Egypte, qui
attends patiemment l'heure de la délivrance ; puisse-t-elle bientôt sonner
Le Fellah (soupirant). — Que Dieu réalise ton souhait !
John Bull (au Fellah). — Et tu ne dis rien à moi non pas de la part
d'Abou Naddara qui me déteste, mais au nom de tes frères d'Egypte
qui m'aiment.
L'Irlandais (riant aux éclats). — Pourquoi t'aimeraient-ils? Est-ce
pour avoir envahi leur pays, massacré leurs frères et semé partout la
ruine et la désolation?
John Bull. — J'ai fait le bonheur et la prospérité de la vallée du Nil.
Le Fellah. — Tu as fait son malheur et son adversité.
L'Irlandais (applaudissant). — A11 right ! Vive l'Egypte!
Le Boër (au Fellah). — Veuille exprimer notre reconnaissance au
Cheikh pour tout ce qu'il a fait pour nous. Les feuilles françaises nous
ont appris qu'il a organisé des soirées et fait des conférences en notre
faveur. Le produit de ces fêtes a été donné à des jeunes français qui
vinrent se battre pour notre indépendance. Dis à Abou Naddara que
ses journaux parvenaient régulièrement à nos chefs qui les distribuaient
dans leurs commandos ; car ses écrits nous encouiageaient à la résis-
tance.
John Bull. — Goddem ! Il aime la guerre.
Le Fellah. — II la déteste. IL aime la paix qui est la bénédiction cé-
leste que Dieu accorde à ses élus; la paix qui est le meilleur souhait du
fidèle croyant a son prochain. A peine cette parole divine, douce et
affectueuse fût-elle prononcée à Prétoria que le Cheikh la salua avec
joie. Depuis de longs mois il la souhaitait ; mais ainsi qu'il l'a dit dans
son journal du mois de mai, il la voulait favorable aux Républiques
sud-africaines et honorable pour leurs indomptables guerriers.
Le Boër. — Dieu exauça ses vœux et nous voyons aujourd hui la
paix briller dans toute sa splendeur dans notre pays en ruine et parmi
ses habitants réduits à la misère. Mais Dieu est Clément et Miséricor-
dieux. Il nous ouvrira les portes de sa divine Providence et nous rever-
rons bientôt notre patrie aussi heureuse et prospère qu'elle l'était avant
cette guerre.
L'Irlandais (l'interrompant). - Cette guerre inique et scélérate que le
gouvernement anglais a provoquée pour s'emparer du Transvaal. Mais
Dieu est juste! Les vingt-cinq mille Boërs ont infligé aux deux cent
cinquante mille guerriers de la perfide Albion des défaites sanglantes
qui ont couronné de gloire l'étendard Boër et couvert de honte et de
mépris la drapeau anglais.
Le Fellah. — Pauvres soldats anglais ! Je les plains sincèrement. Ils
PARIS. IMP. G. LEFEBVRE 5 &7,RUE CLAUDE VELLEFAUX.
se battaient valeureusement pour une cause infâme que leurs généraux
leur faisaient croire justç et honorable. Ils sont tombés par milliers sous
les balle 4 infaillibles des héros boërs et sous les pieds de leurs bœufs
belliqueux. Cette guerre de convoitise a coûté à l'Angleterre des mil-
lions et des millions de guînées et a plongé dans le deuil des milliers et
des milliers de familles britanniques.
John Bull. — Ne parlons pas de douleur, mais de joie. La paix nous
fait oublier nos morts et notre argent perdu. Allons au bar, ô mes amis,
où le gin, le cherry, le brandy et le whisky nous attendent. Nous en
boirons en chantant nos hymnes nationaux; puis nous irons danser
joyeusement comme les hommes et les femmes que vous voyez dans les
rues de Londres.
Le Fellah. — Merci, John Bull. Ma religion me défend de me saoûler
et de danser avec les femmes des autres. Je ne suis venu que pour féli-
citer mon ami le Boër de la paix conclue et pour lui dire que son nom
ceint de gloire, passera à la postérité, et l'Histoire l'inscrira en lettres
d'or dans les annales des nations héroïques et magnanimes. (Il sort )
L'Irlandais. — Et moi, je suis venu pour te faire entendre, ô John
Bull, ce que 1' « Irihs indépendant » notre journal nationaliste de Dublin
du Ier juin, dit à propos de la paix, (il lit) : « Quelles que soient les
conditions de paix, les actions des Boërs les ont couverts de gloire à
tout jamais. L'héroïsme de la lutte qu'ils ont soutenue pendant plus de
deux années contre des forces d'une écrasante supériorité numérique
est sans exemple dans les annales de l'humanité.
En cédant à l'inévitable, ils ont laissé au monde entier un exemple
auquel le temps ne pourra que donner une sanction plus éclatante en-
core. Il n'en est pas de même des vainqueurs.
Etant donné que ces derniers ont provoqué la guerre, qu'ils en ont
marqué le cours par des infamies qui sont à l'heure actuelle reconnues,
que leur infériorité au point de vue militaire vis-à-vis des fermiers des
deux Républiques a été clairement démontrée et qu'ils n'ont triomphé,
finalement, que grâce au nombre, l'exploit des Anglais dans l'Afrique
du sud apparaîtra dans l'histoire comme le triomphe le plus honteux et
le moins glorieux qui ait jamais été enregistré, si nous faisons excep-
tion de la soi-disant conquête de l'Irlande. »
John Bull (à l'Irlandais). — Je me moque de ce que dit ton imbécile
de journaliste. La paix est conclue et le couronnement de notre Roi,
qui devient Empereur, sera célébré dans la joie que la cessation des
hostilités nous fait éprouver. (Au Boër) : Je t'attends au bar voisin. (Il
sort en criant) : Vive l'Angleterre ! Vive l'Empereur Edouard !
L'Irlandais (au Boër). — Vas-tu le suivre?
Le Boër (s'essuyant une larme). — Non, mon ami, je n'ai pas le cœur
à la joie. Je vais joindre mes compatriotes qui se dirigent vers le cime-
tière. Là, en priant Dieu pour le repos des âmes de nos martyrs, je,dépo-
serai sur leurs tombes les roses du Cheikh Abou Naddara, notre ami
sincère. Pauvre Egypte!
L'Irlandais. — L'Egypte, les Républiques sud-africaines et l'Irlande
ne sont pas mortes ; elles vivent encore, bien fortifiera le bras de leurs
enfants et le joug anglais qui les accable sera brisé plus tôt qu'on le
pense. (Il sort.)
Le Boër. — Amen!
Abou Naddara.
Le Gérant : G. Lefebvre.
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Avec le Joutai d'Abou
Naddara et L'Attawadod. 26
CONTENU DE NOTRE TEXTE ARABE
La conclusion de la paix anglo-boër, la satisfaction générale, la
grande joie en Angleterre et dans le sud de l'Afrique, l'éloge des soldats
boërs et de leurs chefs au Parlement et dans les journaux anglais.
— Explication du dessin ci-dessous et sa légende arabe. — La France,
nos félicitations pour ses élections législatives et son nouveau ministère.
— La terrible catastrophe de la Martinique, la douloureuse impression
qu'elle fit dans le monde entier, empressement du Ministère des Colonies
pour l'envoi des secours et le don généreux de S. M. I. le Sultan pour
les sinistrés. — L'Italie ses relations amicales avec l'Empire Ottoman,
son ambassadeur au palais de Yildiz, l'assurance que son gouverne-
ment n'a aucune vue sur la Tripolitaine, la haute bienveillance de
l'Auguste Calife de l'Islam pour le digne représentant de S. M. le Roi
Victor-Emmanuel et le Grand Cordon qu'Il lui a conféré. — L'Espagne,
les belles fêtes du couronnement de S. M. T. C. le Roi Alphonse XIII et
la gracieuse lettre que l'aimable M. Aguilar, secrétaire de la Reine
Douairière nous a adressée pour nous remercier, au nom de Sa Majesté,
pour nos félicitations et notre article élogieux. — La Perse, l'arrivée
de S. M. I. le Schah en France et l'ode magnifique que notre eonfrère,
Mohammed Effendy Abd el Fattah, déaie à l'Auguste Souverain
d'iram. Abou Naddara.
LA PAIX
Le Fellah. — Salut, brave Boër, intrépide défenseur du Transvaal
qui, depuis trente lunes, te bats comme le lion de ton désert pour la
liberté de ta patrie bien aimée. Le vénérable Cheikh Abou Naddara qui,
depuis le commencement de la guerre, plaide ta sainte cause, célèbre
ta valeur et t'attire les vives sympathies de l'Orient et de l'Occident,
me charge de te présenter ses sincères félicitations pour la conclusion
de la paix et t'offrir de sa part ce bouquet de roses nilotiques parfu-
mées d'amour, d'estime et d'admiration pour toi et les chefs valeureux.
(Il lui offre le bouquet.)
Le Boër. — Merci, aimable Fellah, vaillant agriculteur d'Egypte, qui
attends patiemment l'heure de la délivrance ; puisse-t-elle bientôt sonner
Le Fellah (soupirant). — Que Dieu réalise ton souhait !
John Bull (au Fellah). — Et tu ne dis rien à moi non pas de la part
d'Abou Naddara qui me déteste, mais au nom de tes frères d'Egypte
qui m'aiment.
L'Irlandais (riant aux éclats). — Pourquoi t'aimeraient-ils? Est-ce
pour avoir envahi leur pays, massacré leurs frères et semé partout la
ruine et la désolation?
John Bull. — J'ai fait le bonheur et la prospérité de la vallée du Nil.
Le Fellah. — Tu as fait son malheur et son adversité.
L'Irlandais (applaudissant). — A11 right ! Vive l'Egypte!
Le Boër (au Fellah). — Veuille exprimer notre reconnaissance au
Cheikh pour tout ce qu'il a fait pour nous. Les feuilles françaises nous
ont appris qu'il a organisé des soirées et fait des conférences en notre
faveur. Le produit de ces fêtes a été donné à des jeunes français qui
vinrent se battre pour notre indépendance. Dis à Abou Naddara que
ses journaux parvenaient régulièrement à nos chefs qui les distribuaient
dans leurs commandos ; car ses écrits nous encouiageaient à la résis-
tance.
John Bull. — Goddem ! Il aime la guerre.
Le Fellah. — II la déteste. IL aime la paix qui est la bénédiction cé-
leste que Dieu accorde à ses élus; la paix qui est le meilleur souhait du
fidèle croyant a son prochain. A peine cette parole divine, douce et
affectueuse fût-elle prononcée à Prétoria que le Cheikh la salua avec
joie. Depuis de longs mois il la souhaitait ; mais ainsi qu'il l'a dit dans
son journal du mois de mai, il la voulait favorable aux Républiques
sud-africaines et honorable pour leurs indomptables guerriers.
Le Boër. — Dieu exauça ses vœux et nous voyons aujourd hui la
paix briller dans toute sa splendeur dans notre pays en ruine et parmi
ses habitants réduits à la misère. Mais Dieu est Clément et Miséricor-
dieux. Il nous ouvrira les portes de sa divine Providence et nous rever-
rons bientôt notre patrie aussi heureuse et prospère qu'elle l'était avant
cette guerre.
L'Irlandais (l'interrompant). - Cette guerre inique et scélérate que le
gouvernement anglais a provoquée pour s'emparer du Transvaal. Mais
Dieu est juste! Les vingt-cinq mille Boërs ont infligé aux deux cent
cinquante mille guerriers de la perfide Albion des défaites sanglantes
qui ont couronné de gloire l'étendard Boër et couvert de honte et de
mépris la drapeau anglais.
Le Fellah. — Pauvres soldats anglais ! Je les plains sincèrement. Ils
PARIS. IMP. G. LEFEBVRE 5 &7,RUE CLAUDE VELLEFAUX.
se battaient valeureusement pour une cause infâme que leurs généraux
leur faisaient croire justç et honorable. Ils sont tombés par milliers sous
les balle 4 infaillibles des héros boërs et sous les pieds de leurs bœufs
belliqueux. Cette guerre de convoitise a coûté à l'Angleterre des mil-
lions et des millions de guînées et a plongé dans le deuil des milliers et
des milliers de familles britanniques.
John Bull. — Ne parlons pas de douleur, mais de joie. La paix nous
fait oublier nos morts et notre argent perdu. Allons au bar, ô mes amis,
où le gin, le cherry, le brandy et le whisky nous attendent. Nous en
boirons en chantant nos hymnes nationaux; puis nous irons danser
joyeusement comme les hommes et les femmes que vous voyez dans les
rues de Londres.
Le Fellah. — Merci, John Bull. Ma religion me défend de me saoûler
et de danser avec les femmes des autres. Je ne suis venu que pour féli-
citer mon ami le Boër de la paix conclue et pour lui dire que son nom
ceint de gloire, passera à la postérité, et l'Histoire l'inscrira en lettres
d'or dans les annales des nations héroïques et magnanimes. (Il sort )
L'Irlandais. — Et moi, je suis venu pour te faire entendre, ô John
Bull, ce que 1' « Irihs indépendant » notre journal nationaliste de Dublin
du Ier juin, dit à propos de la paix, (il lit) : « Quelles que soient les
conditions de paix, les actions des Boërs les ont couverts de gloire à
tout jamais. L'héroïsme de la lutte qu'ils ont soutenue pendant plus de
deux années contre des forces d'une écrasante supériorité numérique
est sans exemple dans les annales de l'humanité.
En cédant à l'inévitable, ils ont laissé au monde entier un exemple
auquel le temps ne pourra que donner une sanction plus éclatante en-
core. Il n'en est pas de même des vainqueurs.
Etant donné que ces derniers ont provoqué la guerre, qu'ils en ont
marqué le cours par des infamies qui sont à l'heure actuelle reconnues,
que leur infériorité au point de vue militaire vis-à-vis des fermiers des
deux Républiques a été clairement démontrée et qu'ils n'ont triomphé,
finalement, que grâce au nombre, l'exploit des Anglais dans l'Afrique
du sud apparaîtra dans l'histoire comme le triomphe le plus honteux et
le moins glorieux qui ait jamais été enregistré, si nous faisons excep-
tion de la soi-disant conquête de l'Irlande. »
John Bull (à l'Irlandais). — Je me moque de ce que dit ton imbécile
de journaliste. La paix est conclue et le couronnement de notre Roi,
qui devient Empereur, sera célébré dans la joie que la cessation des
hostilités nous fait éprouver. (Au Boër) : Je t'attends au bar voisin. (Il
sort en criant) : Vive l'Angleterre ! Vive l'Empereur Edouard !
L'Irlandais (au Boër). — Vas-tu le suivre?
Le Boër (s'essuyant une larme). — Non, mon ami, je n'ai pas le cœur
à la joie. Je vais joindre mes compatriotes qui se dirigent vers le cime-
tière. Là, en priant Dieu pour le repos des âmes de nos martyrs, je,dépo-
serai sur leurs tombes les roses du Cheikh Abou Naddara, notre ami
sincère. Pauvre Egypte!
L'Irlandais. — L'Egypte, les Républiques sud-africaines et l'Irlande
ne sont pas mortes ; elles vivent encore, bien fortifiera le bras de leurs
enfants et le joug anglais qui les accable sera brisé plus tôt qu'on le
pense. (Il sort.)
Le Boër. — Amen!
Abou Naddara.
Le Gérant : G. Lefebvre.