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hension qui l'entoure, ni l'hostilité ouverte ou sournoise à la-
quelle il est en butte pendant des années. Il a vu dès son enfance
son but clairement dessiné: voilà ce qu'il poursuit, advienne que
pourra. Tout ce que la vie lui apporte est sujet à étude; tout
l'intéresse et tout est assujetti par lui. Il vit misérablement, mais
c'est la misère qu'il approfondira et qu'il traduira en lignes
harassées et en couleurs épuisées de douleur et de lassitude,
lorsqu'il produira les « Las de vivre», les «Ames déçues», «l'Eu-
rythmie». Il s'intéresse à l'histoire et au passé de son pays. Il
entrevoit un jour tout ce monde de guerriers indomptables qui,
à grands coups de hallebardes et de piques, se forgent brutalement
une patrie. Il se sent chair de leur chair et sang de leur sang,
et il nous donnera sa « Retraite de Marignan », son « Tell », sa
« Bataille de Nâfels », continuant à coups de pinceau la besogne
que ceux en qui il reconnaît ses ancêtres firent par la force de
leurs bras, armés d'indomptables volontés et d'armes massives.
I^a fortune commence à lui sourire et vous le voyez, égayant
ses tons, sortant de sa farouche mélancolie, nous doterdu « Jour»,
du « Printemps », de 1' « Heure sacrée». Il apprend à connaître
et à approfondir l'amour; il se rend compte que l'amour, comme
tout ce qui est de ce monde, n'est qu'une suite ininterrompue de
joies et de douleurs; et voilà qu'il traduit cette révélation par
l'eurythmie de la joie, par une série d'œuvres dans lesquelles
tout son être et tous ses sens jubilent. Il revoit de temps à autre
ses montagnes, dont l'impression juvénile lui est restée fidèle et
il en interprète la grandeur et l'austérité gigantesques. La mort
croise son chemin en lui enlevant des êtres aimés. Il la contemple
et la pénètre, lui arrache ses émouvants secrets d'immobilité et
de continuité, et fixe ses émotions profondes sur la toile en vain-
queur que rien ne saurait ni surprendre ni tromper. Et puis la
maladie s'attaque à lui, toujours si vigoureux et toujours si solide.
Sa volonté de s'affirmer ne se dément pas. Il est vrai que mainte-
nant, pour la première fois, il plonge un regard scrutateur dans
hension qui l'entoure, ni l'hostilité ouverte ou sournoise à la-
quelle il est en butte pendant des années. Il a vu dès son enfance
son but clairement dessiné: voilà ce qu'il poursuit, advienne que
pourra. Tout ce que la vie lui apporte est sujet à étude; tout
l'intéresse et tout est assujetti par lui. Il vit misérablement, mais
c'est la misère qu'il approfondira et qu'il traduira en lignes
harassées et en couleurs épuisées de douleur et de lassitude,
lorsqu'il produira les « Las de vivre», les «Ames déçues», «l'Eu-
rythmie». Il s'intéresse à l'histoire et au passé de son pays. Il
entrevoit un jour tout ce monde de guerriers indomptables qui,
à grands coups de hallebardes et de piques, se forgent brutalement
une patrie. Il se sent chair de leur chair et sang de leur sang,
et il nous donnera sa « Retraite de Marignan », son « Tell », sa
« Bataille de Nâfels », continuant à coups de pinceau la besogne
que ceux en qui il reconnaît ses ancêtres firent par la force de
leurs bras, armés d'indomptables volontés et d'armes massives.
I^a fortune commence à lui sourire et vous le voyez, égayant
ses tons, sortant de sa farouche mélancolie, nous doterdu « Jour»,
du « Printemps », de 1' « Heure sacrée». Il apprend à connaître
et à approfondir l'amour; il se rend compte que l'amour, comme
tout ce qui est de ce monde, n'est qu'une suite ininterrompue de
joies et de douleurs; et voilà qu'il traduit cette révélation par
l'eurythmie de la joie, par une série d'œuvres dans lesquelles
tout son être et tous ses sens jubilent. Il revoit de temps à autre
ses montagnes, dont l'impression juvénile lui est restée fidèle et
il en interprète la grandeur et l'austérité gigantesques. La mort
croise son chemin en lui enlevant des êtres aimés. Il la contemple
et la pénètre, lui arrache ses émouvants secrets d'immobilité et
de continuité, et fixe ses émotions profondes sur la toile en vain-
queur que rien ne saurait ni surprendre ni tromper. Et puis la
maladie s'attaque à lui, toujours si vigoureux et toujours si solide.
Sa volonté de s'affirmer ne se dément pas. Il est vrai que mainte-
nant, pour la première fois, il plonge un regard scrutateur dans