REMBBANDT
YI
de cette immense Ronde, à la hampe de la lance, brille comme une pierre
précieuse au milieu des jaunes qui l'entourent, la branche verte fait
valoir les rouges du pourpoint voisin. Et ces notes si parcimonieusement
ménagées, si habilement disposées aux points décisifs, n'en acquièrent
que plus d'autorité, une autorité irrésistible.
On ne peut quitter l'œuvre de Rembrandt exposé à Amsterdam sans
jeter un coup d'œil sur les dessins. Ils sont fort nombreux, et de valeur
très inégale : tantôt des croquis presque informes, tantôt des dessins où
l'on retrouve toutes les qualités de sa peinture; ici, un bout de tête, là
une vaste composition ; une œuvre achevée, ou quelques traits à peine.
Plusieurs sont des études sommaires faites en vue de ses tableaux ou de
ses eaux-fortes. Et dans aucun l'on n'aperçoit un souci quelconque de
lignes, d'élégance, de style, ni même, le plus souvent et ce qui est le
plus étonnant, nulle recherche d'effet. Mais, en revanche, le moindre de
ces croquis est expressif au premier chef. Rembrandt, lorsqu'il exécute
ceux-ci ou ceux-là, ne se préoccupe que de rendre, d'interpréter claire-
ment le sujet qui le liante. Il le cherche sous tous ses aspects, le retourne
dans tous les sens, le varie sans cesse; et le geste est toujours vrai, le
sentiment exprimé à la perfection. C'est tout ce qu'il demande à ses cro-
quis, tout ce qu'il exige de ses dessins. Et ce sont parfois des contours
d'une délicatesse infinie, parfois des écrasements de plume, des taches
qui semblent faites avec un doigt trempé dans de l'encre. Un bras sera
indiqué par une barre, un bonhomme par deux traits jetés à la hâte,
mais ce bras, mais ce bonhomme, cette barre, ces traits, ces taches expri-
meront merveilleusement ce que Rembrandt a voulu leur faire exprimer.
En terminant cette revue trop hâtive, qu'on nous permette un regret :
auprès de ses tableaux et de ses dessins, pourquoi n'a-t-on pas exposé
quelques-unes de ses merveilleuses eaux-fortes? Son génie extraordi-
naire se fût montré sous toutes ses faces. N'est-il pas, dans celle manifes-
tation de son talent, peut-être encore plus surprenant que dans sa pein-
ture ? Il y met toute sa verve et sa pénétration, tout son cœur, toute son
YI
de cette immense Ronde, à la hampe de la lance, brille comme une pierre
précieuse au milieu des jaunes qui l'entourent, la branche verte fait
valoir les rouges du pourpoint voisin. Et ces notes si parcimonieusement
ménagées, si habilement disposées aux points décisifs, n'en acquièrent
que plus d'autorité, une autorité irrésistible.
On ne peut quitter l'œuvre de Rembrandt exposé à Amsterdam sans
jeter un coup d'œil sur les dessins. Ils sont fort nombreux, et de valeur
très inégale : tantôt des croquis presque informes, tantôt des dessins où
l'on retrouve toutes les qualités de sa peinture; ici, un bout de tête, là
une vaste composition ; une œuvre achevée, ou quelques traits à peine.
Plusieurs sont des études sommaires faites en vue de ses tableaux ou de
ses eaux-fortes. Et dans aucun l'on n'aperçoit un souci quelconque de
lignes, d'élégance, de style, ni même, le plus souvent et ce qui est le
plus étonnant, nulle recherche d'effet. Mais, en revanche, le moindre de
ces croquis est expressif au premier chef. Rembrandt, lorsqu'il exécute
ceux-ci ou ceux-là, ne se préoccupe que de rendre, d'interpréter claire-
ment le sujet qui le liante. Il le cherche sous tous ses aspects, le retourne
dans tous les sens, le varie sans cesse; et le geste est toujours vrai, le
sentiment exprimé à la perfection. C'est tout ce qu'il demande à ses cro-
quis, tout ce qu'il exige de ses dessins. Et ce sont parfois des contours
d'une délicatesse infinie, parfois des écrasements de plume, des taches
qui semblent faites avec un doigt trempé dans de l'encre. Un bras sera
indiqué par une barre, un bonhomme par deux traits jetés à la hâte,
mais ce bras, mais ce bonhomme, cette barre, ces traits, ces taches expri-
meront merveilleusement ce que Rembrandt a voulu leur faire exprimer.
En terminant cette revue trop hâtive, qu'on nous permette un regret :
auprès de ses tableaux et de ses dessins, pourquoi n'a-t-on pas exposé
quelques-unes de ses merveilleuses eaux-fortes? Son génie extraordi-
naire se fût montré sous toutes ses faces. N'est-il pas, dans celle manifes-
tation de son talent, peut-être encore plus surprenant que dans sa pein-
ture ? Il y met toute sa verve et sa pénétration, tout son cœur, toute son