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Saint-Non, Jean Claude Richard de
Voyage Pittoresque Ou Description Des Royaumes De Naples Et De Sicile (Band 4,1): Contenant La Description De La Sicile — Paris, 1785 [Cicognara, 2708-2]

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https://doi.org/10.11588/diglit.3243#0277
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*9* VOYAGE PITTORESQUE
de la Sicile, &C un des plus grands-Hommes qu'elle ait produit. On sait qu'il étoit
fils d'un simple Potier de terre, 8c que par la force de son génie, &C la supériorité
de Ces talens, il vint à bout d'aiservir ôe" de gouverner son pays (i).
Parmi les différentes Fabriques de ces antiques Vases d'argille , dont nous nous
sommes souvent occupés dans cet Ouvrage, Ô£ qui étoient si fort en usage chez
les Anciens, celle de Sciacca paroît avoir été une des plus recherchées, & l'on
lui attribue même une grande partie de ceux qui sont conservés dans les principales
Coile&ions de la Sicile, soit à Catane, soit à Palerme. On peut croire le desir
que nous aurions eu de rencontrer sur les lieux &C dans le pays même, un de
ces Vases que Ton eût pu supposer fabriqués par le père du fameux Agatocles >
mais à peine en vîmes-nous l'apparence d'un seul dans toute la Ville.
Nous montâmes la Montagne où sont les Etuves, imaginées & fabriquées,
dit-on, par Dédale, ce génie universel, l'Inventeur de tous les arts, par-tout
desiré, ÔC chasTé de par-tout ; qui, après s'être couvert d'autant de crimes que
de gloire, étoit venu trouver Cocalus, Roi des Sicaniens &C de presque toute
la Sicile , pour se dérober à la vengeance de Minos. On voit dans la Fable
que ce Roi poursuivoit Dédale, pour avoir favorisé les amours monstrueux du
Taureau, èC de Pafvphaé son épouse : les plus anciennes traditions de la Sicile
veulent que ce soit dans ces Etuves que Cocalus fit étouffer Dédale, pour se
débarrasser des menaces que lui faisoit Minos de lui déclarer la guerre, s'il ne lui
rendoit ce malheureux Fugitif, ou mort ou vif. Quoi qu'il en soit, c'esl à trois


(i) Diodore rapporte que Carcynus , père d'Aga-
tocles , ayant consulté l'Oracle sur les rêves qui le
tourmentoient depuis la groiïcsie de sa femme,
la réponse de l'Oracle fut que l'enfant dont elle
accoucheroit feroit un jour le malheur de son
pays. Carcynus, dans l'effroi que lui cansa cet Ora-
cle, crut devoir préférer la tranquillité de sa patrie
à tout ce que la tendresse paternelle pouvoit lui
inspirer pour son fils ; & il ne fut pas plutôt aii
monde, qu'il donna des ordres pour le faire.mourir.
Sa femme ne pouvant consentir a une résolution
aussi barbare, prit le parti de tromper son mari &
•de dérober son fils a la mort. Elle fut trouver ceux
qui avoient été chargés de ces ordres cruels, &c
qui, heureusement attendris par la beauté singu-
lière de l'enfant, différoient de les mettre à exé-
cution.
Le petit Agatocles fut alors transporté en secret
& élevé chez Hcraclydes son oncle, où il crût en
beauté &: en intelligence. Il avoit atteint l'âge de
sept ans , lotfqu'Heraclydes voûtant célébrer un

sacrifice dans sa maison, invita son beau-frère à y
assilier. Carcynus ne fut pas plutôt entré, qu'ap-
percevant Agatocles, involontairement il ne put
ôter les yeux de delTus cet enfant, dont il admiroit
la noblesse &c les grâces. Sa femme qui l'observoit,
crut pouvoir lui rappeller dans cet instant, la perte
qu'ils avoient faite : elle lui dit que son fils seroit
précisément de cet âge , s'ils n'avoient pas eu le
malheur de le perdre. A ce souvenir, les yeux de
Carcynus se mouillent de larmes, il caresie de plus
en plus son fils sans le connoître, & regardant
l'enfant avec attendrissement, il se reprochoit sa
barbarie & se livrait au désespoir. Alors la mère
saiiit ce moment de sensibilité, pour lui découvrir
la feinte Se les moyens dont elle s'étoit servi pour
conserver un fils qui devoit faire un jour leur
bonheur. Carcynus à ce récit, transporté de joie,
enlève le jeune Agatocles & le reconduit chez lui,
aux risques de tout ce qui pourrait en arriver par
les suites.
Diod. de Sic. LU. XIX.
 
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