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l’art français
cherche générale du style et de la mise en scène. 1 ous
les artistes modèlent la terre cuite comme Puget ou
Coysevox, ou la cire comme Girardon ; mais la spon-
tanéité qu’ils avaient jetée dans l’humble matière, en vives
ébauches, prend immédiatement une belle tenue dans le
bronze impérissable et dans le marbre, « le plus beau
qui sera trouvé » comme le stipule le contrat pour la
statue funéraire de Mazarin. Voilà les matières classiques :
seules elles sont dignes de Dieu et du Roi, de la sainteté,
de l’héroïsme, du génie, de toutes les grandeurs humaines.
Et elles assurent dans le style le goût du grand. A
Versailles le Roi eut même l’idée de remplacer tous les
marbres de ses jardins par des bronzes après les avoir
fait mouler : c’était vouloir assurer à cet Olympe son
immortalité. Versailles, les églises, sont habités par un
peuple d’airain et de marbre « poli et dur », comme dit
La Bruyère, à offusquer Rome impériale.
La statuaire antique est d’ailleurs le modèle de plus
en plus vénéré. Les œuvres estimées les plus parfaites
depuis la Renaissance, le « Lantin », l’Apollon, les Lutteurs,
le Laocoon, etc..., trônent dans les collections de l’Aca-
démie Royale, et les académiciens font devant leurs
collègues des conférences sur le secret de leur beauté :
surtout les proportions. Ne soyons pas étonnés si c’est
le grand prêtre de Poséidon qui souffre et pleure sous
l’aspect du Temps sur le tombeau de Henri de Lorraine
par Nicolas Renard à Saint-Roch. Sa figure pathétique
n’est-elle pas du meilleur « bolonais »? Ou plutôt l’art
d'Annibal Carrache, de Dominiquin et du Guide, n’est-il
pas l’arrière-neveu de celui de Rhodes ou de Pergame?
C’est précisément cette intime affinité entre l’art hellé-
nistique et l’art baroque qui encourage notre sculpture
dans son [penchant vers l’antique, vers l’antique qu’on
l’art français
cherche générale du style et de la mise en scène. 1 ous
les artistes modèlent la terre cuite comme Puget ou
Coysevox, ou la cire comme Girardon ; mais la spon-
tanéité qu’ils avaient jetée dans l’humble matière, en vives
ébauches, prend immédiatement une belle tenue dans le
bronze impérissable et dans le marbre, « le plus beau
qui sera trouvé » comme le stipule le contrat pour la
statue funéraire de Mazarin. Voilà les matières classiques :
seules elles sont dignes de Dieu et du Roi, de la sainteté,
de l’héroïsme, du génie, de toutes les grandeurs humaines.
Et elles assurent dans le style le goût du grand. A
Versailles le Roi eut même l’idée de remplacer tous les
marbres de ses jardins par des bronzes après les avoir
fait mouler : c’était vouloir assurer à cet Olympe son
immortalité. Versailles, les églises, sont habités par un
peuple d’airain et de marbre « poli et dur », comme dit
La Bruyère, à offusquer Rome impériale.
La statuaire antique est d’ailleurs le modèle de plus
en plus vénéré. Les œuvres estimées les plus parfaites
depuis la Renaissance, le « Lantin », l’Apollon, les Lutteurs,
le Laocoon, etc..., trônent dans les collections de l’Aca-
démie Royale, et les académiciens font devant leurs
collègues des conférences sur le secret de leur beauté :
surtout les proportions. Ne soyons pas étonnés si c’est
le grand prêtre de Poséidon qui souffre et pleure sous
l’aspect du Temps sur le tombeau de Henri de Lorraine
par Nicolas Renard à Saint-Roch. Sa figure pathétique
n’est-elle pas du meilleur « bolonais »? Ou plutôt l’art
d'Annibal Carrache, de Dominiquin et du Guide, n’est-il
pas l’arrière-neveu de celui de Rhodes ou de Pergame?
C’est précisément cette intime affinité entre l’art hellé-
nistique et l’art baroque qui encourage notre sculpture
dans son [penchant vers l’antique, vers l’antique qu’on