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i'-:-lK

A l'occasion de notre dessin, qui nous transporte, eom-
me dans un rêve, aux steepes sauvages du Nouveau-Mon-
de, nous publions aujourd'hui le premier chapitre d'un
roman américain, dû à la plume d'un de nos plus célèbres
écrivains de ce genre.

Nous y laissons, sans y rien changer, toute la saveur du
style, le pittoresque des descriptions, et la profondeur du
côté philosophique.

Ajoutons, que cette page harmonieuse et féerique n'est
pas de M. Gustave Aimard.

I. — Paysage

Nul pied humain n'a pénétré dans ces vierges fo-
rêts de l'Amérique. Depuis des siècles, les ruisseaux
babillards serpentent sous l'enchevêtrement des lia-
nes. Ces eaux capricieuses et traîtresses recèlent la
mort. Car tout est terreur dans ces climats formida-
bles. La feuille verte du cactus cache le serpent, dis-
tillateur de poisons ; l'insecte venimeux bourdonne,
autour de la fleur dont le parfum savoureux glace de
l'éternel sommeil. Le caïman se vautre dans l'eau
saumâtre des étangs pestilentiels. Le serpent noir
clapote au milieu de l'onde livide. On entend au loin
le bondissement du tigre et le rugissement de la
panthère.

En haut des platanes, voltigent les singes impudi-
ques, et papillonnent les colibris et les oiseaux-mou-
ches, semblables à des pierreries ailées.

Le chimpazé grogne comme un homme. Sur les
grands cèdres grimacent et rigolent les ouistitis, ces
gavroches de la nature. Le boa enlace voluptueuse-
ment la blonde gazelle, dont les os craquent sous ce
baiser.

Autour du cocotier, au fruit plein de fait, et du
mancenillier dont l'ombre est mortelle, voltigent les
oiseaux de paradis ; le jubira gazouille, te kàmichi
siffle, l'urubcru éclate de rire :

« Brri brri, toutou, laï-tou, zig zig, boum, tra la la,
hou, hou, tra rarrara tchi chi. »

Au loin, sur les pampas, dont les rares ruisseaux
coupent la terre désolée, sur l'herbe maigre et épi-
neuse que foulent les bisons et les chevaux sauvages,
se lève lé soleih blanc comme un fantastique fromage
à la crème.

II. — Le grand-chef

A la lisière de la forêt, près du wigam des Nez-en-
Marmelade, le grand-chef a dressé ses bras au ciel,
du côté du soleil levant, et fait une invocation au
Grand-Esprit.

Car, la Balle-empoisonnée est un grand chef, son
père, le Dromadaire-Sentimental, était aussi un grand
chef.

La tribu voyant le grand-chef se livrer à cette ver*
tigineuse télégraphie, poussa ce cri :

« Tou tou la ba fé pu schloff. »

Ce qui signifie dans le langage pittoresque des
Peaux-Rouges.

— « Le grand chef est réveillé ; il est l'heure de se
tirer des pieds. » La tribu des Nez-en-Marmelade fut
debout en un instant. C'était une belle tribu. Les
hommes, peinturlurés des couleurs de guerre,
étaient secs, comme un vent du Sud. Ils portaient sur
l'épaule le carquois aux flèches empoisonnées; les
tomawahs rougis du sang des prisonniers étaient
pendus à leurs ceintures, à côté des hideuses cheve-
lures des ennemis scalpés. Les femmes, en tirant
leur marmaille, allumèrent les feux, autour desquels
se groupèrent les Indiens. Le grand chef lui-même
s'approcha.

III. — Le repas.
La Balle-Empoisonnée, qui est un grand chef, parla
en ces termes :

— J'ai entendu le chant de la hulotte bleue ; j'ai
suivi, sur les feuilles mortes, la piste des Visages-
Pâles ; je me suis peint en guerre ; mes lrères se sont
peints en guerre, marchant dans le sentier des com-
bats; nous avons tué quelques Visages-Pâles, tri,
tri, macach, bono, truco, zim laï, la ... (1).

La tribu, après avoir écouté la voix du grand chef,
se prosterna faces contre terre. Au loin, on enten-
dait, comme un tonnerre, le fracas des torrents.

La marmita formidable bouillait. Un grand chef (de
cuisine) écumait la supa.

(1) Nous allons nous en payer une tranche. (Note du tmd,uc-
teur.)

Quelques enfants étaient suspendus aux mamelles
de leurs mères, comme des grappes rouges à une
vigne sauvage.

Il y eut un silence solennel, qui ne fut interrompu
que par le battement isochrone de cent mâchoires
humai ue s.

Le vautour fauve au vol rapide tournoyait affamé
au-dessus de la bouillabaissa.

IV. — Ou APPARAIT LA BELLE DûLORÈS

— Tri, tri, la ri ra don daine.,. (1) exclama la Balle-
Empoisonnée, qui est de plus en plus un grand chef.

Un vent de mécontentement souffla, sinistre, sur
les visages des Nez-en-Marmelade.

D'un geste énergique le grand chef réprima ces
signes de mécontentement.

— Puis il commença son récit :

« Mon père, qui était un grand chef, m'a emmené
à deux cents lieues, dans le sentier de la guerre.
Le camp des Visages-Pâles se dressait à l'horizon.
Le Grand-Esprit conduisait le vieillard. A dix pas du
camp passait une Espagnole. Mon père scalpa l'Espa-
gnole.

Le vieillard partagea avec son fils le butin. La chair
était fraîche, comme la rosée du matin. De retour au
wigam, le père, qui comptait trop de lunes, fut
scalpé par la main du fils. Manou avait parlé. Le fils
mangea le père à son tour. C'était dur, comme la
corne d'un bison. Le vieillard était un grand chef.
Que le Grand-Esprit ait son souffle ! »

V. — La chute d'un astre.

La Balle-Empoisonnée avait dit. Les gazelles sau-
tillaient joyeuses, dans les savanes arides. Le forto
vento soufflait au sud-sud-nord-duest. A l'horizon,
des troupeaux de bœufs sauvages s'émergeaient en
silhouettes sombres. Le soleil, tomate céleste, mon-
tait insensiblement au zénith. La panthère hurlait
dans les brousses. Il y avait des scarabées d'or qui
faisaient une orgie dans les fantastiques orchidées.
L'oiseau gypaète poussait son tu pu, tu pu. L'affreux
typhlops serpentait entre les pierres humides et
mousseuses. Pendant que la nature savourait son re-
pas divin, la tribu se délectait des tibias et des péro-
nés de leurs ennemis morts. C'était l'heure de la
grande digestion universelle..., quand tout à coup un
corps bizarre, un aréblithe, venu de l'autre monde,
tomba sur la marmita...

Alunzo y Caremelos

(La suite au prochain numéro.)

2?*2

LES RUINES DE PARIS

De môme que les fromages sont livrés aux vers à cette
époque de l'année, de môme les étrangers envahissent
notre bonne ville de Paris, pendant que les citadins, qui
ont le sabj à leur tour se répandent sur les plages de
France, depuis Dunkerque jusqu'à Bayohne.

Les hôtels sont remplis, jusqu'aux combles, d'Anglais,
de Russes et même de Paiagonais ; deux choses les attirent
spécialement, d'abord Paris et ses plaisirs (en ce moment,
il n'y a pas gras), ensuite les ruines.

J'ai compté l'autre jour soixante-seize lorgnettes bra-
quées, comme des obusiers, devant l'ex-pavillon de l'Hor-
loge des ex-Tuileries, et pas mal de télescopes, dans une
Situation identique, devant l'Hôtel-de-Ville.

Mais on se lasse de tout; les ruines, paraît-il, ne plai-
sent plus guère; les étrangers demandent du nouveau. Ils
sont tellement habitués à voir chez nous dés coups de
théâtre !

Un cicérone intelligent vient d'ajouter, au catalogue
des raines de Paris, quelques nouveaux spécimens.

Pour un léger supplément, il mène ses clients contem-
pler les ruines suivantes :

1° Timothée Tkimm, monument d.u style composite, dont
on retrouve les épaves au journal l'Evénement, à la Se-
maine et autres terrains vagues.

2° Barbey d'Aurevilly, gothique pur à ogives, du
XIIe siècle ; on remarque, de ce monument antique, quel-
ques corniches dans le Figaro.

3" Armand de Pontmahtin, style rococo ; il est difficile
de s'en procurer une pierre, même au prix des plus grands
sacrifices. Tout est enfoui sous l'herbe épaisse des siècles.

4° ArsènB Hobssaye, rocaille, genre démodé.

5° Garnier Pages, sur cette imposante ruine on a dressé

(1) Fermez votre boîte, je vais vous raconter une histoire.
(Note du traducteur.)

une pierre tumulaire, avec cette inscription : « Souve
et regrets. — 1848-1870. »

6° Jules Favre. A la place de ce grand monument,
a dressé une fontaine.

7° Eugène Pelletan, actuellement coulé en bronze, fl
la pose d'un prophète biblique, tenant en mains son H
de la Nouvelle Babylonne. a ,

8° Alphonse Karb, monument retappé, étayé,. replâtre
couvert de mousse ; il en tombe, de temps en tempfe >
quelques vieux moellons qui ne font de mal à personn

9° Edmond About et Francisque Sarcey, style classique;
monument* oubliés, dont on ne peut tirer aucune utui
publique.

10° Louis Veuillot. —Va singe dans une niche, boi »
tout au plus, à effrayer les moineaux.

11° Trochd, un arc de triomphe en carton peint.

Il y a sur le catalogue de notre cicérone bien d'autr
curiosités dont l'énumération serait aussi longue qne

fas-

le

aux

tidieuse. Les personnes qui désireraient se procurer
répertoire complet de ces ruines n'ont qu'à s'adresser a
bureaux de la Scie, de midi à quatre heures, excepte
jour de l'ouverture de la chasse.

Homo.

Itfl E PIN WJ TRAVAIL

DEMANDES ET OFFRES

— On demande un ténor au Théâtre-Miniat4^>
l'artiste n'ayant qu'à faire mouvoir des marionnette-
on ne tient pas au physique.

— Un abonné à la Gazette de Paris demande à per'
muter avec un abonné du Journal des Décavés, il °^
la décoration du Christ de Portugal par dessus
marché.

— On offre à un ex-fabricant de cantates une plaC
chez un confiseur pour faire les devises. Ne pas ,
présenter sans une recommandation d'Albert MiU»11

— Séparations de corps, divorces etc. — DcJlA.
fils ; ne pas confondre avec la maison GirarWn 1
est au coin du quai. Entrée particulière pour
dames.

— Le dernier roi d'Araucanie céderait volonté1 "
son trône contre une place de contrôleur d'omniP11^
à la personne qui lui enverrait, sous pli, l'usurpât©11
Planchut.

— M. V. Sardou., demande un collaborateur p°u
sa prochaine pièce. En cas de four, ce dernier y&g&"
vra seul les pommes cuites.

— Un cocher de fiacre, qui a échoué dans sa "e'
mande pour entrer au Conseil d'État, troquerait a^e0
plaisir son siège contre une sous-préfecture.

— La précieuse liqueur dite : « La Berrichonne *
fait seule digérer lés articles de M. de Saint-Geûest'
Paiement après parfaite g'uérison.

E. B. T.

PARIS-SCIE

livre

dé-

du

Dans deux théâtres de genre, ôtt vient démettre le
de Dumas en scène.

Au Palais-Royal, Tue-la a obtenu un maigre succ
Ce vaudeville, parsemé de combats à la hache et au
agréments de ce genre, a déplu au public.

Ne la lue pas, aux Variétés, conférence débitée V
M. Berthelier, est une plaisanterie assez amusante. .

Il paraît que nos directeurs de théâtre ne s'en tiendr
pas à ces deux bleuettcs. On prêté à un impressario de "a
l'intention de monter, sur le rejet de V Homme-FW*1
une splendide féerie avec un nombre infini de tableau*-^

Notre reporter des théâtres a pu recueillir quelques
tails que nous transcrivons ici.

Le titre sera : L'Homme-Femme, ou les Oueun°nS
pays de Nod. Voici les titres des différents tableaux :

Acî.e 1er. — Les femmes de temple. — Le couvent
oiseaux. ** Le jardin des Tuileries, où on verra de je0
demoiselles jouer au cerceau et vendre des timbres-p°s
— Les onza mille vierges. — Ballet des Vestales.*:

Acte 2e. — Les femmes de foyer, — La demande en
riage. — La noce. — La nuit des noces (Je dernier tabl
devant être très-scabreux, le rideau ne lèvera pas ; la "*
en scène $era remplacée par une doiice et voluptueuse
sique). — Six mois après. — Le flagrant délit (autre
bleaii très-déco'leté). —Le divorce.

Acte 3°. —Les femmes de rue. — Le quartier Breda-
Changement à vue, Pompéï (pas de Sardou). — Les oo >
res. — Quadrille final par toute la troupe. n

Acte 4e. — Le paradis terrestre. — Le serpent entre
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