Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Le Sifflet: journal humoristique de la famille — 1.1872

DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.3248#0199
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
kl SIFFLET

1%
Mi y

*, h

5*



lié!

([lit

ii#C"

Son rôjft sous Louis-Philippe, bien qu'appartenant
déjà à l'histoire, se dessina de plus an plus ce qu'il est
aujourd'hui. Ses idées les plus arrêtées datent delà. Nous
n'en parierons donc pas.

Mais, dans les luttes parlementaires qui précédèrent
la révolution de février, il se fit un talent d'orateur qui
n'a paru que gpancjir depuis.

Ce qu'on peut affirmer, c'est qu'il est maître de lui-
même et qu'il manie la langue avec une habileté con-
sommée.

Content ou mécontent, après l'avoir entendu, on a

toujours envie de chanter :

Contentons-nous d'une simple bouteille !

N'est-ce pas, après tout, une morale qui en vaut bien
une autre ?

Pendant tout le ministère de M. Guizot, M. Dufaure
fit de l'opposition ; aussi se rallia-t-il tout simplement à
la République, en 1848,

Depuis, le terrain brille.

Disons pourtant qu'au barreau, comme magistrat,
comme avocat, tout le monde redoute sa dialectique ser-
rée, son ironie mordante et sa logique impitoyable.

Le bourgeois est son vrai client ; quand il parle, il ne
reste qu'une chose à faire : plaindre son adversaire.

Eh bien! cet homme de talent, qui a été tant de fois
ministre, le croirez-vous, Paul de Cassagnac?

Le croirez-vous, Robert Mitchell ?

Le croirez-vous, Escudier ?

Le croirez-vous, pléiade des Quinze-Aoûtt

M. Dufaure n'est pas décoré !

Il y en a si long dans cette seule ligne, que je m'abstiens
de tout commentaire.

Par exemple, il y a une compensation : il est acadé-
micien !

Heu ! Je ne sais pas si je n'aimerais pas presque au-
tant être décoré. Académicien... Académicien... Il n'a-
vait pas plus besoin de ce tjtre-là que de l'autre.

Enfin, il l'est. Il est immortel ! Grand bien vous fasse,
monsieur le garde des scesux.

L'Académie avec Dufaure
Active un peu plus ses travaux,
Et quand l'Opéra prend du Faure,
Sans compter pleuventles bravos.

Il parait que c'est un nom prédestiné.

Mais, à nous, le ministre de la justice nous inspire
forcément une vénération salutaire.' Impossible de lui
parler comme au premier venu.

Impossible même de lui dire tout ce qu'on pense dans
un journal qui a oublié de verser son cautionnement.

Et puis, il faut si peu de lignes... pour parler de tra-
vers 1

Il vaut infiniment mieux en dire trop peu que trop. Je
m'arrête.

Le Guillois.

ÇQUPS DE SIFFUET



Un soir, K... avait été invité à passer la soirée dans
une riche maison des environs de Paris.

Au moment du départ, il pleuvait à verse, et personne
n'offrait de le ramener à Paris.

K... s'approche d'un des invités prêt à monter dans
une bonne voiture.

— Monsieur le comte, lui dit-il, oserai-je vous prier
de mettre mon paletot sur le devant de votre voiture ?

— Volontiers, où pourrai-je demain vous le faire
tenir?

— Oh! ne vous inquiétez pas, je serai dedans.
Et il revint en équipage. *

Un avare ayant entendu un très beau discours sur la
■charité, se mit à réfléchir profondément.

— Quelle éloquence, quelle conviction ! lui dit un
ami... ce discours prouve la nécessité de fajre l'aumône
d'une façon irrésistible.

— Tellement irrésistible, que j'ai presque envie de
mendier.

Le président à l'accusé :

— Pourquoi avez-vous tué votre femme?

— La vie commune était devenue insuppprtable.

— Il fallait vous en séparer.

■— Je lui avais juré de ne la quitter qu'à sa mort.

Qu'est-ce qu'un mari?

Un animal domestique souvent trop familier.

— Qu'est-ce que la femme ?

— Une esclave qui gouverne le monde.

—- Eh bien, Virginie, et ce civet?... Est-ce pour ce
soir ?

■— Non, madame, non. Madame sait mieux que moi
que le lapin demande à être écorché vif, mais que le liè-
vre préfère attendre...

Le 28 décembre, fête des saints Innocents !
Quelle fête !

On va, malgré la rigueur de l'hiver, porter les bou-
quets à :

M. Paul Ferrier, l'innocent auteur de Gilbert ;
M. Edouard Pailleron, le gendre innocent de Buloz ;

M. Saint-Genest, le matamore innocent dû Figaro;

M. d'Aiglemont, l'innocent directeur de Déjazet-bel-
œil, etc., etc.

C'est Blanche d'Antigny qui pousserait de beaux cris
si on ne lui souhaitait pas sa fête ce jour-là !

Et Cora Pearl, donc !

Cochinat, toujours yerveux, se trouvait avec Koning
et Prével, — une mauvaise -encontre.

La conversation, ft«*t it faisait tous les frais, ne lan-
guissait pas.

— A nous trois, s'écria Koning, npus avons de l'es-
prit comme cent !

— C'est vrai, dit Cochinai, à vous deux vous repré-
sentez à merveille les deux zéros du nombre.

Origène, qui devait avoir quelque analogie avec Wfclff,
a écrit cette plrrase :

« La femme est le, chef du péché, les armes du diable
et l'écueil du paradis. »

Voilà qui n'est pas galant !

Il est vrai que Labienus, un païen, a dit :

Millier quœ sola cogitai, inala cogitât.

Maris, traduisez à vos dames !

Voyons, il faut s'entendre ; le rapport présenté par
M. de Châteauneuf à lAcadémiedes sciences dit que la
durée d'un académicien est de vingt-quatre ans, et le
rapport de M. Potiquet assure que la véritable existence
d'un membre de cette docte assemblée est de dix-neuf
ans et sept mois.

Us oublient donc tous les deux que les académiciens
sont immortels !

On doit reprendre, dit-on, au Gymnase, Hêloïse et
Ahélard de Scribe... avec coupures, bien entendu.

I Les inspecteurs des boucheries parisiennes viennent
d'être pourvus d'instruments pour l'étude microscopique
i des viandes.

La fille Cruch,. dite Cora Pearl, a de la chance d'être
, à Monaco.

! N'oublions pas les petites affiches.

Nous avons trouvé, dans ce spirituel journal, cette
drôlerie :

« Un homme fort, ayant de belles relations, connais-
« sant la cuisine, la comptabilité et le frottage, désire
« un empfoi de directeur, de régisseur ou de concierge.
« Bonnes références. Ecrira poste-restante aux ini-
tiales K, C.

Un spectateur des matinées dramatiques de la Gaîté
disait, dimanche dernier, à un de ses voisins en voyant
mademoiselle Croizette dans la comédie de M. Denay-
rousse :

C'est une belle épaule, mais ce n'est pas une belle
, Paule.

\ M. Daiglemont, dit Bel-œil, qui joue en ce moment
i sur son théâtre d'une façon si remarquable Figaro, a fait
1 l'autre soir une recette qui a dépassé six francs vingt
I centimes. Sa satisfaction n'a plus de bornes, aussi se
! prépare-t-il à attaquer les grands rôles de tragédie.
I Mounet Sully est flambé !

j Comme on parlait de M. Dupanloup, quelqu'un le dé-
. finit ainsi :

Une crosse pastorale qui se conduit comme une crosse
I de fusil.

LE PÈRK-S1FF1EUR.

JOURNAL DON INONDÉ DE LA MARNE

C'était le 3 décembre 1872.

Je demeurais au rez-de-chaussée d'une maison à deux
étages et à volets verts, située non loin de Nogent.

Il y avait bien un grenier, avec des lucarnes imper-
ceptibles. .. Mais j'étais bien trop 'fier pour en parler ! A
peine daignais-je y monter mes vieux meubles par une
trappe, à l'aide d'une échelle.

Mon grenier ! fi donc !

Heureusement que le jardinier, moins exclusif, y por-
tait tous les fruits du jardin, qu'il rangeait avec amour
sur de la paille. Car, il faut vous le dire, la.maison est à
moi. C'est ma mai.sqn de campagne.

Si vous voyiez comme elle est bien campée au milieu
d'un grand jardin bien clos de murs, à deux cents mè-
tres de la Marne.

La Marne !... c'est juste, je l'oubliais.

Le 3 décembre, un bruit affreux me réveilla au mi-
lieu de la nuit.

Je savais bien que la rivière grossissait à vue d'ceil ;
mais je la connais, — ou plutôt je croyais la connaître !
— je n'en avais pas peur.

Je me disais : elle va se répandre un peu sur le che-
min de halage, et tout sera dit.

Fatale confiance ! Le bruit épouvantable qui me ré-
veillait, c'était mon mur qui s'écroulait et s'abîmait dans
les flots...

C'était la Marne furieuse qui se frayait un passage à
travers tous les obstacles.

Elle commença par s'engouffrer dans les caves, — ces
caves, objet de mon culte, que je choyais avec tant d'a-
mour... cescaves que je sacrifiais avec tant d'insou-
ciance à mon affreux grenier.

Presque en même temps que l'écroulement du mur,
les bouteilles se heurtèrent et se cassèrent, mêlantàl'eau
jaunâtre leur rubis généreux.

Puis les portes cédèrent et l'eau entra chez moi dans
mon salon, dans ma chambre à coucher...

Pour comble de malheur, le jardinier qui est mon seul
domestique, demeure à trois quarts d'heure de chemin
de chez moi. Je suis seul.

Une fois le premier moment de terreur passé, je pris
mes draps, mes couvertures et un matelas, et je me pré-
cipitai vers l'escalier.

Patatras!... Le passage était trop étroit pour un si
gros volume... Voilà toute ma literie dans l'eau.
Et l'eau montait plus haut que mes chevilles.
Et j'étais nu,

Je revins m'emparer de mes vêtements et je les mon-
tai au premier.

Puis, je prisle matelas, les draps et les couvertures
mouillées, et non plus pour m'en servir dans l'état où
ils étaient, mais bien pour les sauver, je les montai aussi
au premier.

L'eau montait toujours. J'en avais jusqu'aux genoux...
Je courus au buffet, j'enlevai rapidement tout ce que
je pus trouver de provisions, pain, vin, viande, fromage
et fruits.

Déjà mon pauvre mobilier nageait au milieu des piè-
ces du rez-de-chaussée. Un violent éternûment me rap-
pela le peu de costume que j'avais pour courir'ainsi
dans l'eau. L'instinct de la conservation me l'avait fait
oublier.

Il y avait en haut un lit d'amis. Je m'y blottis.
Impossible de me réchauffer. Impossible de fermer
l'œil, tant le vacarme de l'eau était affreux, inquiétant
et lugubre.

Je me rhabillai et j'allumai à grand'peine une bou-
gie. .. Je ne trouvais sous la main que des allumettes
mouillées.

Enfin, le jour parut! Le soleil se lève si tard en dé-
cembre !

Je courus à la fenêtre... Horreur! Ma jolie maison
de campagne avec volets verts était devenue une île.
Les,quatre murs étaient battus par les flots déchaînés.
L'eau montait presque jusqu'au plafond du rez-de-
chaussée... Perron, rampe, fenêtres, tout avait disparu.
Que faire? Je n'avais pas à ma disposition le moindre
bateau. En eussé-je eu que je n'aurais pas osé m'en ser-
vir : il y avait encore plus de danger à affronter le cou-
rant qu'à ne pas bouger.

Et j'étais seul... Je commençai à penser à Blanche.
Le 4 se passa tristement. A peine eus-je le «oùrage
de toucher aux provisions que j'avais sauvées-•■ Je pen-
sais de plus en plus à Blanche.

Le 5 et le 6 furent à peu près semblables. île ne dor-
mais plus, je ne vivais plus.

La Marne parut un peu diminuer lp 7, j'eus une
lueur d'espérance. Je fis un grand désastre dp ines pro-
visions et je dormis jusqu'au grand jour. J'avais oublié
Blanche.

Le 8, la rivière recommença à monter.
Cette fois, je me crus perdu. Allais-je mourir dp faim?
Et Blanche ! Pensait- elle à moi ?

Quelle idée aussi de venir m'inslaller en contre-bas
de la Marne !

Le 9, je n'osai guère manger mes dernières bouchées
de pain'... Pauvre Blanche !...

Le 10, —au milieu de la nuit, encore! r-l'eau en-
vahit l'étage où je m'étais réfugié et je .commençai un
sauvetage, moins compliqué que la première fois.

Cette persistance de l'inondation m'abrutissait. Je
devenais fou.

Je n'hésitai pas à appliquer l'échelle à la trappe et à
monter directement dans le grenier, que j'avais tant
dédaigné.

J'étais faible, abattu... J'attendais la mort... Mon
Dieu, que fait Blanche?...

Je me jetai sur un tas de paille, résolu à n'en plus
bouger jusqu'à la fin du.fléau.

0 bonheur ! Cette paille couvrait les fruits déposés là
par le jardinier. J'en dévorai une demi-dov.zaine avec
avidité.

Ensuite, un peu ragaillardi, je me hissai jusqu'à la
lucarne-etje regardai...-
La Marne montait toujours!
J'ai passé le 10 une horrible journée.
Le 11, j',ai pris mon calepin et j'ai tracé ces quelques
lignes... pour toi, Branche...

Je prendrai une bouteille vide, je les y déposerai ;
puis, je boucherai bien hermétiquement et je la livrerai
à la merci des ondes...

Je suis dans mon grenier. Espérons que l'eau ne vien-
dra pas m'y atteindre. ,

Mon Dieu!... Si la maison s'écroulait!

S

Adieu, Blanche!.,
larmes sans doute).

(Signature illisible, ■—à,force de

Poussée par le courant, la bouteille est v
qu'aux bureaux du Sifflet.

Mais où trouver la malheureuse victime ?

Louis Giluï

ue jus
Bildbeschreibung
Für diese Seite sind hier keine Informationen vorhanden.

Spalte temporär ausblenden
 
Annotationen