ÉTRENNES ET PRIME DU SIFFLET
Tableau-lpon à Surprises ! I !
offert pour 2 francs à tous les lecteurs du Sifflet
(eœpéçlié franco) et
GRATUITEMENT
franc de port à toutes les personnes qui s’abonneront ou
se réabonneront pour un an au journal.
Adresser les demandes à l’administration du Sifflet,
7, rue Rochechouart.
LE RÊVE DE BARNUM
Barnum est un Américain de haute futaie. Son nom
est tellement populaire qu’il est devenu chez nous un ad-
jectif.
Mais pour être fameux on n’est pas parfait.
Barnum rêve l’impossible. Tant qu’il n’aura pas réa-
lisé l’impossible, il ne sera pas content.
C’est ce qu’a pensé H. Demare, notre dessinateur, re-
tour de Vienne ; — car vous savez que Vienne l’a acca-
paré pendant toute sort Exposition.
Demare s’est rencontré là-bas avec Barnum et il lui a
demandé ce qu’il exhiberait l’an prochain.
Barnum a étouffé un soupir, — et Demare un perro-
quet.
— Ce que je voudrais, dit Barnum, ce serait un per-
sonnage double plus fort que la femme à deux têtes, —
ce serait, par exemple, l’homme-chien ne faisant qu’un
avec une jolie négresse 1
— Je vous trouverai ça, répondit Demare.
Et il a tenu parole.., dans le présent numéro.
Louis Gille.
NOUVEAU GUIDE DES ÉTRENNES
Rien n’est plus ennuyeux pour tout le monde que d’ê-
tre obligé d’offrir des étrennes.
D’abord c’est onéreux, et puis il est toujours très dif-
ficile de savoir ce qu’on peut donner pour satisfaire
l’exigence des personnes qui comptent sur vos ca-
deaux.
En donnant des étrennes qui ne plaisent pas, on
s’attire quelquefois une haine plus grande que si l’on
s’était complètement abstenu de toute générosité, et c’est
une haine terrible que celle-là !
On a vu des personnes manquer de brillants mariages
et rater les plus splendides positions, pour avoir fait sans
discernement et sans tact un cadeau du jour de Van.
Nous croyons que le Nouveau Guide des Etrennes
que nous allons publier, sera pour tout J. 'ondedela
plus grande utilité.
On n’aura qu’à le consulter pour savoirde suite ce
qu’on doit donner.;]
Ce n’est pas un travail fait à la légère ; nous l’avons
étudié avec tout le sérieux qu’exige son importance, l’on
peut donc suivre nos conseils avec sécurité en étant as-
suré de ne jamais faire de mécontents.
Si, par hasard, cependant, quelques grincheux ne se
trouvaient pas satisfaits, il n’y aurait alors qu’une chose
à faire, ce serait de les envoyer à l’Odéort voir Athalie
avec les chœurs de Mendelsohn, je suis persuadé qu’a-
près cela ils ne se plaindraient plus de leurs étrennes.
Ainsi, vous offrirez :
A votre blanchisseuse (si elle est jolie), un verre d’a-
nisette et une paire de jarretières.
A M. Louis Veuülot, le livret delà Jolie Parfumeuse
et la photographie de madame Théo, dans le second acte
de cette opérette.
A la femme d'un ami, qui vous fait bon accueil, un
sac de bonbons et un déjeuner en tête à tête n’importe
où.
A mademoiselle Fargueil, un flacon d’eau dentifrice
ambrée, du docteur Claude.
A M. De Belcastel, un billet pour les Folies-Ber-
gère.
A une comtesse pas bégueule, un Livre d’heures et trois
paquets de cigarettes caporal.
A Mademoiselle Lasseny (si l’on est intime), un bâ-
ton de sucre d’orge, (si l’on n’est pas intime) un petit ha-
vanais.
A M. Billion, une cage à serins.
A une jeune file honnête, un huit-ressorts et un sac
de marrons glacés.
A M. de Gavardie, le tableau de la femme vue de
dos, exposé sur le boulevard Poissonnière.
A la femme d’un chef de division, des hommages j
respectueux et un homard frais.
Au brillant Fêrvacquès, un déjeuner à vingt-deux !
sous chez Richefeu, boulevard Montparnasse.
A Gabrielle GmV/her, les-Saints Evangiles (nouvelle j
édition), et les romans de Belot.
Al/. Baze, une fontaine de marchand de coco avec j
tous ses accessoires.
A une fleuriste, une galette en couronne et un pail- !
lasson.
A un académicien, un abat-jour et une douzaine de j
bonnets de coton.
? A M. Chesnelong, unpot de Redcol et un vélocipède.
I A une petite brUne, plusieurs kilos de cheveux roux.
I A Bardou, un cerf-volant et une grosse caisse.
I A Madame Judic, une serinette et un aquarium,
i A la veuve d’un colonel, une paire de rasoirs et une
boîte de chocolat.
A Mademoiselle Dica-Pelit, un cache-nez et une
! boîte d’allumettes.
• A Madame T hiers, un flacon de liqueur d’or,
jj A un ejeune fille de 15 ans, les contes... de La Fon-
i taine,
i Au rédacteur en chef du Constitutionnel, un irri-
i gateur Eguisier et une bassinoire.
Au facteur de mon quartier, un verre de berrichone
et une paire de chaussettes.
A unq cocotte chic, un bonheur du jour et plusieurs
actions des galions de Yigo.
A M. Jean Brunet, un polichinelle et un pâté de foie.
Si l'on veut suivre exactement ce nouveau guide, je
répète que l’on ne fera jamais de mécontents et que tout
le monde sera satisfait de ses étrennes.
Michel Anézo.
LES RÉVEILLONS PARISIENS
Gomme nous n’en trouvons point trace dans l’Histoire
de France, il nous est permis de supposer que le réveil-
lon est une invention moderne.
Certains savants prétendent même que l’inventeur du
réveillon n’est autre que Tony Réveillon..
Suivant les mathématiciens, le réveillon est une opé-
ration qui a pour but d’introduire dans son tube digestif
plusieurs aunes de boudin et plusieurs kilos de pâtés de
foie gras, et d’arroser largement le tout de vins plus ou
moins frelatés.
Le réveillon varie suivant les classes de la société. Si
vous le voulez bien, nous allons passer en revue les
divers genres de réveillon qui s’exécutent dans la
capitale.
Nous avons :
1° Le Réveillon de la noblesse. La scène se passe
dans un salon du faubourg Saint-Germain, chez le baron
de Jelattantoujours. Les ancêtres de cette aristocratique
famille se perdent dans la nuit des temps. L’un des aïeux
était, dit-«n, photographe d’Adam et Eve, dans le pa-
radis terrestre.
xkprès avoir religieusement entendu la messe de mi-
nuit àSaint-Sulpice, la famille Jelattantoujours s’apprête
à réveillonner avec son noble invité le marquis de
Jecroiquinereviendrapas.
Comme nous ne sommes que des roturiers, nous avons
vainement essayé de nous introduire dans cette noble
maison. Aussi ne pouvons-nous, à notre grand regret,
donner la description de ce réveillon, et nous passons
directement au
'P Réveillon de la finance. Une table somptueuse-
ment servie est entourée d’une douzaine de gros ban-
quiers qui s’apprêtent à faire honneur à un souper choisi.
Rien n'y manque ; huîtres d’Ostende, faisans truffés,
ortolans, ananas, fraises; comme vins, ilyades grandes
crûs de Bordeaux, des vins de Johannisberg et de Cons-
tance, du Xérès, etc., etc.
Ces messieurs sont des viveurs sérieux. Ils n’ont
point voulu admettre de femmes à leur table, parce que
les femmes ne boivent pas sérieusement et que d’ailleurs,
là où il y a des filles d’Eve, on finit toujours par se jeter
des assiettes à la figure.
Mais l’absence du sexe n’empêche pas la conversation
d’être tout à fait frpufroutillante. Au hasard, nous sai-
sissons quelques lambeaux de phrases :
— Mon cher, bien que la petite Carabinette m’ait
lâché fort brusquement, je la regrette, c’était une bonne
fille, que tout le monde aimait.
— Oui, c’est vrai, et qui aimait tout le monde.
A l’autre bout de la table, deux vieux noceurs forte-
ment éméchés, en étaient au chapitre des confidences.
— Veux-tu que je te l’avoue, mon cher. Eh bien, je
crois que ta femme nous trompe.
Au dessert, lorsqu'il s’agit de se lever pour porter
un toast, quatre convives roulent sous la table.
Eh bien, après?. il faut bien que vieillesse se
passe.
3° Réveillon de M. Cocarneau. M. Cocarneau,
quoique épicier, n’en est pas moins homme. Il est marié ;
aussi a-t-il une maîtresse avec laquelle il soupe amou-
reusement.
' — Nastasie, si ma femme me voyait!... Est-elle assez
naïve ! je lui ai fait croire que j’allais voir ma sœur qui
est charcutière à Bellevue, et elle a coupé dans le pont...
M’aimes-tu, Nastasie?
Et Nastasie répond :
— Mon Dieu, que tu as l’air godiche ! gros se-
rin !
Cocarneau est enchanté.
4° Réveillon de madame Cocarneau. Madame Co-
carneau n’est pas ce qu’un vain peuple pense. Vous vous
figuriez qu’elle était tranquillement étendue sur le som-
mier conjugal, — tandis que nous la trouvons dans un
cabinet particulier de chez Truchot, en tête-à-tête avec j
M. Polydore, quincaillier en gros.
Polydore est un des plus beaux hommes du Ma- |
rais, et madame Cocarneau n’est pas encore trop dé frai- j
chie.
Le garçon, qui n’est pas bien au courant des faits et j
gestes parisiens,entre brusquement dans le cabinet.
— Dites donc, imbécile, s’écrie Polydore, tout inter-
loqué, vous auriez pu frapper avant d’entrer.
Quant à madame Cocarneau, elle ne paraît plus. La
honte l’avait dévorée!
5° Les réveillons du quartier latin. Les joyeux
indigènes du pays des écoles oublient parfois de passer
leurs examens et de prendre leurs inscriptions, mais
ils se croiraient déshonorés s’ils ne faisaient point ré-
veillon.
Dans toutes les rues et à tous les étages du pays Latin
on fait réveillon.
Le quartier latin est le pays de l’amour par excel-
lence.
Les cafés sont encombrés. A la brasserie de la Ciga-
rette, la petite Jeanne achève son quarante-cinquième
bock.
Nana Boisansoif est fort embarrassée. Elle a déjà
fait partie de cinq réveillons, et elle se rendait à son
sixième, lorsque ses forces la trahissent. Nana roule
dans le ruisseau en prononçant ces paroles émues :
— Nom d'chien ! que le homard est difficile à digé-
rer !...
Un chiffonnier, qui passait par là, aperçoit Nana, et, la
prenant pour un paquet de frusques informe, il la fourre
dans sa hotte et l’emporte chez lui.
— Quel riche cadeau je vais faire à ma femme, grom-
mèle-t-il.
Arrivé chez lui, il retire Nana de son cache-
mire.
— Est-y Dieu possible ! s’écrie la chiffonnière, c’est
ma fille !
Horreur ! stupéfaction ! abîme ! infini ! maternité !...
(Voir les drames de Pixérécourt.)
6° Réveillon de VAmbigu. M. Billion s’est dit : —•
Puisque tout le monde il fait réveillon, j’en feron-t-
aussi.
Billion fait bien les choses. Il a invité tous ses artistes,
qui prennent place autour d’une table immense; iis sont
rayonnants ; la générosité de leur directeur les a épatés.
Mais leur épatement ne tarde pas à faire place à un
déluge de protestations.
— C’est indigne!
— C’est affreux !
— Elle est mauvaise...
Voici ce qui s’était passé : Billion n’avait rien trouvé
de mieux que de composer son réveillon avec des acces-
soires de théâtres tels que : bouteilles de bois, poulets en
carton, écrevisses en ferblanc, crèmes en papier de soie
et autres mets non moins digestifs.
7° Réveillon de M. Alphonse. La réunion a lieu
dans un aquarium. Tous les poissons y figurent.
M. Alphonse, entouré de dames, s’écrie au dessert :
— Je bois à M. Dumas fils ! au grand homme qui
m’a immortalisé !
Puis, avec un soupir de satisfaction :
— Ah! qu’on est heureux d’être aimé pour soi-
même !
8° Réveillon d'amour eux. Vous avez connu mon
amiAntonin, n’est-ce pas?
Pauvre garçon !
— Que lui est-il donc arrivé? Serait-il malade?
— Pis que cela !
— Serait-il mort?
— Pis que cela! Antonin est amoureux!... Ça lui a
pris tout d’un coup comme une envie de bisser, quand il
voit jouer une pièce de Le Guillois.
La chambre est bien close.
Antonin est en tête avec son adorée, Mlle Marthe,
une grande brune qui a des yeux comme ça (—-).
Le réveillon à deux ! O la charmante chose, et qu’on
est heureux d’être jeune et amoureux !
Laissons les amoureux,
Becqueter une croûte,
Laissons-les, car nos yeux
Les gêneraient, sans doute.
Ah ! je vous assure que s’ils mangent des truffes, c’est
bien du superflu poui eux !
Ils n’en ont pas besoin !
9° Réveillon improvisé. Un pauvre diable passe
dans la rue de l’Echelle et s’arrête devant l’établissement
gastronomique d’un industriel bien connu.
— Personne ne me voit!... murrnure-t-il entre ses
dents... j’vas réveillonner aussi.
D’un poing vigoureux il casse une glace de la devan-
ture.
Et il allait saisir une oie superbe, lorsqu’il se sent sai-
sir lui-même au collet par un gardien de la paix.
— C’est dégoûtant! dit le larron, y a pas-moyen de
manger tranquillement un morceau. Oh! la socilliété !
la socilliété !
Alphonse Lafitte.
MONSIEUR DE BAVARDIE
Si vous croyez que je vais vous dire son vrai nom,
vous avez du toupet !
Lui! le nommer! lui faire de la réclame!... Et
combien nous paierait-il pour ça ?
Non, je ne le nommerai pas ; je ne l’appellerai que
M. de Bavardie, et si quelqu’un le reconnaît, qu’il se
taise, surtout ! Car M. de Bavardie est féroce ; il n’est
pas permis à tout le monde d’entrer dans sa cage.
D abord, M. de Bavardie n’a pas de chance, — pour
deux raisons.
La première, c’est qu’il est né le 2 décembre. — Il
Tableau-lpon à Surprises ! I !
offert pour 2 francs à tous les lecteurs du Sifflet
(eœpéçlié franco) et
GRATUITEMENT
franc de port à toutes les personnes qui s’abonneront ou
se réabonneront pour un an au journal.
Adresser les demandes à l’administration du Sifflet,
7, rue Rochechouart.
LE RÊVE DE BARNUM
Barnum est un Américain de haute futaie. Son nom
est tellement populaire qu’il est devenu chez nous un ad-
jectif.
Mais pour être fameux on n’est pas parfait.
Barnum rêve l’impossible. Tant qu’il n’aura pas réa-
lisé l’impossible, il ne sera pas content.
C’est ce qu’a pensé H. Demare, notre dessinateur, re-
tour de Vienne ; — car vous savez que Vienne l’a acca-
paré pendant toute sort Exposition.
Demare s’est rencontré là-bas avec Barnum et il lui a
demandé ce qu’il exhiberait l’an prochain.
Barnum a étouffé un soupir, — et Demare un perro-
quet.
— Ce que je voudrais, dit Barnum, ce serait un per-
sonnage double plus fort que la femme à deux têtes, —
ce serait, par exemple, l’homme-chien ne faisant qu’un
avec une jolie négresse 1
— Je vous trouverai ça, répondit Demare.
Et il a tenu parole.., dans le présent numéro.
Louis Gille.
NOUVEAU GUIDE DES ÉTRENNES
Rien n’est plus ennuyeux pour tout le monde que d’ê-
tre obligé d’offrir des étrennes.
D’abord c’est onéreux, et puis il est toujours très dif-
ficile de savoir ce qu’on peut donner pour satisfaire
l’exigence des personnes qui comptent sur vos ca-
deaux.
En donnant des étrennes qui ne plaisent pas, on
s’attire quelquefois une haine plus grande que si l’on
s’était complètement abstenu de toute générosité, et c’est
une haine terrible que celle-là !
On a vu des personnes manquer de brillants mariages
et rater les plus splendides positions, pour avoir fait sans
discernement et sans tact un cadeau du jour de Van.
Nous croyons que le Nouveau Guide des Etrennes
que nous allons publier, sera pour tout J. 'ondedela
plus grande utilité.
On n’aura qu’à le consulter pour savoirde suite ce
qu’on doit donner.;]
Ce n’est pas un travail fait à la légère ; nous l’avons
étudié avec tout le sérieux qu’exige son importance, l’on
peut donc suivre nos conseils avec sécurité en étant as-
suré de ne jamais faire de mécontents.
Si, par hasard, cependant, quelques grincheux ne se
trouvaient pas satisfaits, il n’y aurait alors qu’une chose
à faire, ce serait de les envoyer à l’Odéort voir Athalie
avec les chœurs de Mendelsohn, je suis persuadé qu’a-
près cela ils ne se plaindraient plus de leurs étrennes.
Ainsi, vous offrirez :
A votre blanchisseuse (si elle est jolie), un verre d’a-
nisette et une paire de jarretières.
A M. Louis Veuülot, le livret delà Jolie Parfumeuse
et la photographie de madame Théo, dans le second acte
de cette opérette.
A la femme d'un ami, qui vous fait bon accueil, un
sac de bonbons et un déjeuner en tête à tête n’importe
où.
A mademoiselle Fargueil, un flacon d’eau dentifrice
ambrée, du docteur Claude.
A M. De Belcastel, un billet pour les Folies-Ber-
gère.
A une comtesse pas bégueule, un Livre d’heures et trois
paquets de cigarettes caporal.
A Mademoiselle Lasseny (si l’on est intime), un bâ-
ton de sucre d’orge, (si l’on n’est pas intime) un petit ha-
vanais.
A M. Billion, une cage à serins.
A une jeune file honnête, un huit-ressorts et un sac
de marrons glacés.
A M. de Gavardie, le tableau de la femme vue de
dos, exposé sur le boulevard Poissonnière.
A la femme d’un chef de division, des hommages j
respectueux et un homard frais.
Au brillant Fêrvacquès, un déjeuner à vingt-deux !
sous chez Richefeu, boulevard Montparnasse.
A Gabrielle GmV/her, les-Saints Evangiles (nouvelle j
édition), et les romans de Belot.
Al/. Baze, une fontaine de marchand de coco avec j
tous ses accessoires.
A une fleuriste, une galette en couronne et un pail- !
lasson.
A un académicien, un abat-jour et une douzaine de j
bonnets de coton.
? A M. Chesnelong, unpot de Redcol et un vélocipède.
I A une petite brUne, plusieurs kilos de cheveux roux.
I A Bardou, un cerf-volant et une grosse caisse.
I A Madame Judic, une serinette et un aquarium,
i A la veuve d’un colonel, une paire de rasoirs et une
boîte de chocolat.
A Mademoiselle Dica-Pelit, un cache-nez et une
! boîte d’allumettes.
• A Madame T hiers, un flacon de liqueur d’or,
jj A un ejeune fille de 15 ans, les contes... de La Fon-
i taine,
i Au rédacteur en chef du Constitutionnel, un irri-
i gateur Eguisier et une bassinoire.
Au facteur de mon quartier, un verre de berrichone
et une paire de chaussettes.
A unq cocotte chic, un bonheur du jour et plusieurs
actions des galions de Yigo.
A M. Jean Brunet, un polichinelle et un pâté de foie.
Si l'on veut suivre exactement ce nouveau guide, je
répète que l’on ne fera jamais de mécontents et que tout
le monde sera satisfait de ses étrennes.
Michel Anézo.
LES RÉVEILLONS PARISIENS
Gomme nous n’en trouvons point trace dans l’Histoire
de France, il nous est permis de supposer que le réveil-
lon est une invention moderne.
Certains savants prétendent même que l’inventeur du
réveillon n’est autre que Tony Réveillon..
Suivant les mathématiciens, le réveillon est une opé-
ration qui a pour but d’introduire dans son tube digestif
plusieurs aunes de boudin et plusieurs kilos de pâtés de
foie gras, et d’arroser largement le tout de vins plus ou
moins frelatés.
Le réveillon varie suivant les classes de la société. Si
vous le voulez bien, nous allons passer en revue les
divers genres de réveillon qui s’exécutent dans la
capitale.
Nous avons :
1° Le Réveillon de la noblesse. La scène se passe
dans un salon du faubourg Saint-Germain, chez le baron
de Jelattantoujours. Les ancêtres de cette aristocratique
famille se perdent dans la nuit des temps. L’un des aïeux
était, dit-«n, photographe d’Adam et Eve, dans le pa-
radis terrestre.
xkprès avoir religieusement entendu la messe de mi-
nuit àSaint-Sulpice, la famille Jelattantoujours s’apprête
à réveillonner avec son noble invité le marquis de
Jecroiquinereviendrapas.
Comme nous ne sommes que des roturiers, nous avons
vainement essayé de nous introduire dans cette noble
maison. Aussi ne pouvons-nous, à notre grand regret,
donner la description de ce réveillon, et nous passons
directement au
'P Réveillon de la finance. Une table somptueuse-
ment servie est entourée d’une douzaine de gros ban-
quiers qui s’apprêtent à faire honneur à un souper choisi.
Rien n'y manque ; huîtres d’Ostende, faisans truffés,
ortolans, ananas, fraises; comme vins, ilyades grandes
crûs de Bordeaux, des vins de Johannisberg et de Cons-
tance, du Xérès, etc., etc.
Ces messieurs sont des viveurs sérieux. Ils n’ont
point voulu admettre de femmes à leur table, parce que
les femmes ne boivent pas sérieusement et que d’ailleurs,
là où il y a des filles d’Eve, on finit toujours par se jeter
des assiettes à la figure.
Mais l’absence du sexe n’empêche pas la conversation
d’être tout à fait frpufroutillante. Au hasard, nous sai-
sissons quelques lambeaux de phrases :
— Mon cher, bien que la petite Carabinette m’ait
lâché fort brusquement, je la regrette, c’était une bonne
fille, que tout le monde aimait.
— Oui, c’est vrai, et qui aimait tout le monde.
A l’autre bout de la table, deux vieux noceurs forte-
ment éméchés, en étaient au chapitre des confidences.
— Veux-tu que je te l’avoue, mon cher. Eh bien, je
crois que ta femme nous trompe.
Au dessert, lorsqu'il s’agit de se lever pour porter
un toast, quatre convives roulent sous la table.
Eh bien, après?. il faut bien que vieillesse se
passe.
3° Réveillon de M. Cocarneau. M. Cocarneau,
quoique épicier, n’en est pas moins homme. Il est marié ;
aussi a-t-il une maîtresse avec laquelle il soupe amou-
reusement.
' — Nastasie, si ma femme me voyait!... Est-elle assez
naïve ! je lui ai fait croire que j’allais voir ma sœur qui
est charcutière à Bellevue, et elle a coupé dans le pont...
M’aimes-tu, Nastasie?
Et Nastasie répond :
— Mon Dieu, que tu as l’air godiche ! gros se-
rin !
Cocarneau est enchanté.
4° Réveillon de madame Cocarneau. Madame Co-
carneau n’est pas ce qu’un vain peuple pense. Vous vous
figuriez qu’elle était tranquillement étendue sur le som-
mier conjugal, — tandis que nous la trouvons dans un
cabinet particulier de chez Truchot, en tête-à-tête avec j
M. Polydore, quincaillier en gros.
Polydore est un des plus beaux hommes du Ma- |
rais, et madame Cocarneau n’est pas encore trop dé frai- j
chie.
Le garçon, qui n’est pas bien au courant des faits et j
gestes parisiens,entre brusquement dans le cabinet.
— Dites donc, imbécile, s’écrie Polydore, tout inter-
loqué, vous auriez pu frapper avant d’entrer.
Quant à madame Cocarneau, elle ne paraît plus. La
honte l’avait dévorée!
5° Les réveillons du quartier latin. Les joyeux
indigènes du pays des écoles oublient parfois de passer
leurs examens et de prendre leurs inscriptions, mais
ils se croiraient déshonorés s’ils ne faisaient point ré-
veillon.
Dans toutes les rues et à tous les étages du pays Latin
on fait réveillon.
Le quartier latin est le pays de l’amour par excel-
lence.
Les cafés sont encombrés. A la brasserie de la Ciga-
rette, la petite Jeanne achève son quarante-cinquième
bock.
Nana Boisansoif est fort embarrassée. Elle a déjà
fait partie de cinq réveillons, et elle se rendait à son
sixième, lorsque ses forces la trahissent. Nana roule
dans le ruisseau en prononçant ces paroles émues :
— Nom d'chien ! que le homard est difficile à digé-
rer !...
Un chiffonnier, qui passait par là, aperçoit Nana, et, la
prenant pour un paquet de frusques informe, il la fourre
dans sa hotte et l’emporte chez lui.
— Quel riche cadeau je vais faire à ma femme, grom-
mèle-t-il.
Arrivé chez lui, il retire Nana de son cache-
mire.
— Est-y Dieu possible ! s’écrie la chiffonnière, c’est
ma fille !
Horreur ! stupéfaction ! abîme ! infini ! maternité !...
(Voir les drames de Pixérécourt.)
6° Réveillon de VAmbigu. M. Billion s’est dit : —•
Puisque tout le monde il fait réveillon, j’en feron-t-
aussi.
Billion fait bien les choses. Il a invité tous ses artistes,
qui prennent place autour d’une table immense; iis sont
rayonnants ; la générosité de leur directeur les a épatés.
Mais leur épatement ne tarde pas à faire place à un
déluge de protestations.
— C’est indigne!
— C’est affreux !
— Elle est mauvaise...
Voici ce qui s’était passé : Billion n’avait rien trouvé
de mieux que de composer son réveillon avec des acces-
soires de théâtres tels que : bouteilles de bois, poulets en
carton, écrevisses en ferblanc, crèmes en papier de soie
et autres mets non moins digestifs.
7° Réveillon de M. Alphonse. La réunion a lieu
dans un aquarium. Tous les poissons y figurent.
M. Alphonse, entouré de dames, s’écrie au dessert :
— Je bois à M. Dumas fils ! au grand homme qui
m’a immortalisé !
Puis, avec un soupir de satisfaction :
— Ah! qu’on est heureux d’être aimé pour soi-
même !
8° Réveillon d'amour eux. Vous avez connu mon
amiAntonin, n’est-ce pas?
Pauvre garçon !
— Que lui est-il donc arrivé? Serait-il malade?
— Pis que cela !
— Serait-il mort?
— Pis que cela! Antonin est amoureux!... Ça lui a
pris tout d’un coup comme une envie de bisser, quand il
voit jouer une pièce de Le Guillois.
La chambre est bien close.
Antonin est en tête avec son adorée, Mlle Marthe,
une grande brune qui a des yeux comme ça (—-).
Le réveillon à deux ! O la charmante chose, et qu’on
est heureux d’être jeune et amoureux !
Laissons les amoureux,
Becqueter une croûte,
Laissons-les, car nos yeux
Les gêneraient, sans doute.
Ah ! je vous assure que s’ils mangent des truffes, c’est
bien du superflu poui eux !
Ils n’en ont pas besoin !
9° Réveillon improvisé. Un pauvre diable passe
dans la rue de l’Echelle et s’arrête devant l’établissement
gastronomique d’un industriel bien connu.
— Personne ne me voit!... murrnure-t-il entre ses
dents... j’vas réveillonner aussi.
D’un poing vigoureux il casse une glace de la devan-
ture.
Et il allait saisir une oie superbe, lorsqu’il se sent sai-
sir lui-même au collet par un gardien de la paix.
— C’est dégoûtant! dit le larron, y a pas-moyen de
manger tranquillement un morceau. Oh! la socilliété !
la socilliété !
Alphonse Lafitte.
MONSIEUR DE BAVARDIE
Si vous croyez que je vais vous dire son vrai nom,
vous avez du toupet !
Lui! le nommer! lui faire de la réclame!... Et
combien nous paierait-il pour ça ?
Non, je ne le nommerai pas ; je ne l’appellerai que
M. de Bavardie, et si quelqu’un le reconnaît, qu’il se
taise, surtout ! Car M. de Bavardie est féroce ; il n’est
pas permis à tout le monde d’entrer dans sa cage.
D abord, M. de Bavardie n’a pas de chance, — pour
deux raisons.
La première, c’est qu’il est né le 2 décembre. — Il