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Toutain, Jules
Les cités romaines de la Tunisie: essai sur l'histoire de la colonisation romaine dans l'Afrique du Nord — Paris, 1895

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https://doi.org/10.11588/diglit.16856#0302

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288 LES CITES ROMAINES DE LA TUNISIE.

les témoignages de loyalisme que l'on réclama de ces provin-
ciaux africains. Ils devaient, en outre, envoyer chaque année,
à Rome et en Italie, des milliers de boisseaux de froment et
d'amphores d'huile : les uns et les autres étaient impatiemment
attendus sur les bords du Tibre. Là se borna l'intervention des
pouvoirs publics dans la vie quotidienne et individuelle.

Rome ne se préoccupa nullement d'effacer d'un seul coup,
par des mesures violentes, tout vestige du passé; liberté pleine
et entière fut laissée par elle aux habitants du pays de conser-
ver les mœurs et les traditions qu'ils avaient héritées de leurs
ancêtres. Puisque ces usages et ces souvenirs n'étaient pas des
ferments de révolte , peu lui importait qu'ils fussent vivaces.

Rome ne fit point, en Afrique, de propagande religieuse en
faveur de ses divinités nationales ; il n'entra pas davantage,
dans ses desseins, de civiliser, comme on dirait aujourd'hui, les
peuplades numides ou gétules soumises à son empire. Le gou-
vernement impérial ne se soucia jamais d'imposer légalement
à ses sujets ce qui échappe absolument à toute loi; il se désin-
téressa de tout ce qui, dans la vie humaine, est inaccessible aux
édits et aux décrets.

Lorsque César et Auguste, renonçant à la politique stérile
que le Sénat de la République avait suivie à l'égard de l'ancien
empire carthaginois, cherchèrent à éveiller, dans ces contrées
naturellement fécondes, une vie nouvelle et intense, ils ne son-
gèrent nullement à y transporter des mœurs et des coutumes
nées sous d'autres cieux et propres à une autre race. Il ne vint
même pas à l'esprit des fondateurs de l'empire que la colonisa-
tion romaine pût et dût être autre chose que l'organisation ad-
ministrative et l'exploitation économique du monde méditerra-
néen ; ils pensaient, sans doute, qu'on ne traite pas des peuples
comme des enfants ; que chaque nation, policée ou barbare,
sédentaire ou nomade, glorieuse ou obscure, a ses usages et ses
traditions ; que ces traditions et ces usages, lentement créés
par de nombreuses générations, ne peuvent pas être détruits en
un jour ou par la seule volonté d'un vainqueur, si puissant qu'il
soit ; en un mot, que la personnalité historique d'une race ou
d'un peuple n'est pas moins à l'épreuve de la force et des vio-
lences matérielles que la personnalité morale des individus.

Si la civilisation gréco-romaine ne fut pas imposée par les
conquérants, il faut qu'elle ait été introduite dans le pays par
les sujets eux-mêmes ; il faut que les Africains soient pour ainsi
dire allés spontanément au-devant d'elle. Cette évolution n'a
 
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