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Toutain, Jules
Les cités romaines de la Tunisie: essai sur l'histoire de la colonisation romaine dans l'Afrique du Nord — Paris, 1895

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https://doi.org/10.11588/diglit.16856#0304

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290 LES CITÉS ROMAINES DE LA TUNISIE.

l'égard de Rome, il est certain que la civilisation gréco-romaine
exerça sur beaucoup d'entre eux un très vif attrait. On se plut
à choisir des noms romains ; la mode se répandit de porter un
prénom et un gentilice; on affecta, dans la société bourgeoise
et instruite, de ne parler que le latin ; les anciennes divinités
furent invoquées sous des noms latins; les nécropoles, jadis ca-
chées sous terre, s'étendirent aux portes des villes, se peuplè-
rent de cippes en forme d'autels, de mausolées semblables à
des temples. La toge devint l'habit d'apparat; les maisons se
remplirent et s'ornèrent d'objets importés de Rome ou de la
Grèce ; tout le monde se prit d'enthousiasme pour les mimes,
pour les combats de l'amphithéâtre, pour les courses du cirque.
On s'efforça d'imiter, jusque dans ses vices, le peuple-roi.

Ce qui prouve bien, d'ailleurs, que cette évolution fut spon-
tanée, c'est qu'elle s'accomplit lentement et progressivement
dans tous les sens. Les habitudes nouvelles pénétrèrent plus
vite et plus profondément dans les villes de la côte et dans les
cités assises sur les grandes voies de communication ; les an-
ciennes traditions survécurent plus longtemps dans les districts
montagneux et dans les cantons reculés, autour de Mactaris,
par exemple, et de Sicca Veneria. La bourgeoisie municipale
mit à se transformer plus d'empressement que les humbles et
les pauvres ; la plèbe laborieuse demeura plus fidèle au passé,
non par aversion pour Rome, mais par habitude, par routine,
par indifférence. La vie privée resta essentiellement le domaine
de l'initiative individuelle ; chacun put agir à sa guise, adopter
les mœurs romaines ou vivre comme avaient vécu les aïeux.
Les empereurs et les proconsuls ne crurent jamais qu'il fût de
leur devoir de démontrer aux Africains la supériorité de la civi-
lisation gréco-romaine sur leurs coutumes traditionnelles. Les
deux éléments qui se trouvaient en présence ne se combatti-
rent pas ; leurs relations furent toujours pacifiques ; aucune
lutte religieuse, aucune haine nationale n'arrêta ni n'entrava
l'œuvre de colonisation.

Cette politique du gouvernement impérial eut encore un autre
avantage. Au lieu de se superposer ou de s'exclure, les caractères
distinctifs du peuple romain et ceux des races africaines se mé-
langèrent, se fondirent. Les habitants des cités romaines de la
Proconsulaire ne ressemblaient guère aux marins phéniciens
ou aux pasteurs numides ; ce n'étaient pas non plus des Ro-
mains ni des Italiens. Comme les Gaulois, comme les Espagnols,
les Africains gardèrent, au milieu des peuples soumis à la do-
 
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