SECONDE PARTIE.
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à le faire périr. Alors son ambition ne connut plus de frein ; alliant la dissi-
mulation à la violence, il enleva la Macédoine à Démctrius et à Pyrrhus,
et il y établit son empire. Mais l'emportement de son caractère, que l'expé-
i-ience ni l'âge n'avoient pu réprimer, devint à la fin la cause de ses mal-
heurs et de sa ruine. Changeant d'épouse au gré de ses caprices, il sacrifia
au ressentiment coupable ou à la jalousie d'Arsinoé, fille de Ptolémée, roi
d'Egypte, qu'il avoit nouvellement épousée, l'aîné et le plus vaillant de ses
fils, Agathoclès , qui l'aidoit à soutenir le poids de la couronne et des
guerres, et qui, sous un roi septuagénaire, étoit le seul espoir de ses états.
Sa barbarie ne se borna pas à ce parricide ; il entreprit d'étouffer par la
terreur les plaintes et les regrets que cette mort arrachoit aux premiers
personnages de son royaume. Ses sujets, qui avoient supporté patiemment
jusqu'alors son avarice et, sa dureté, tremblèrent de devenir la victime de
ses soupçons. Plusieurs d'entre eux coururent à Babylone implorer le secours
et la vengeance de Séleucus. Ptolémée Céraunus étoit à leur tète : beau-
frere de Lysimaque , il l'étoit aussi du malheureux prince dont on déplo-
roit la perte. Lysandra, veuve d'Agathoclès, étoit née du même père et de
la même mère que Ptolémée. Celui-ci, dont la perfidie et la violence justi-
fièrent Ptolémée Soter son père de l'avoir déshérité, se trouvoit à la cour
de Lysimaque, et avoit pris le parti de Lysandra contre Arsinoé qui n'étoit
sa sœur que du côté paternel1. La veuve d'Agathoclès suivit son frère à
Babylone avec ses enfants, tandis que les principaux sujets de Lysimaque
se révoltoient ouvertement ou favorisoient en secret la révolte. Séleucus ,
excité par le désir de réunir sous sa puissance presque tous les états qu'A-
lexandre-le-Grand avoit possédés, et flatté de la perspective de finir ses
jours au sein de sa patrie , sur le trône de Macédoine, marcha contre Lysi-
maque. Les deux anciens compagnons d'armes, les seuls généraux d'Alexan-
dre qui existassent encore, se rencontrèrent dans les plaines de laPhrygie,
où, vingt ans auparavant, réunis ensemble, ils avoient détruit Antigonus.
Lysimaque périt dans le combat, percé d'un javelot, l'an 281 avant l'ère
chrétienne. Douze de ses fils y moururent avec lui; deux autres expirèrent
peu de temps après à Cassandrée , sous les coups de Ptolémée Céraunus
Ch. V.
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(l) Memnon, qui fait mourir Agathoclès par la ceau d'histoire avec plus de critique. Lucien paroit
main de Ptolémée Céraunus, ou la foudre (c'étoit croire cru1 Agathoclès avoit véritablement conspiré
le sobriquet donné à ce prince violent), se trompe contre son père : mais il faut rejeter cette tradition
sûrement, et il est en opposition avec Pausanias qui sur le cynisme du personnage qui en fait le récit,
paroit avoir puisé à de meilleures sources ce qu'il dans YIcaromenippus.
dit de Lysimaque, ou du moins avoir écrit ce mor-
J.2Ô