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L' art décoratif: revue de lárt ancien et de la vie artistique moderne — 4,2.1902

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No. 44 (Mai 1902)
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Mauclair, Camille: L' ame d'Eugène Carrière: (à propos d'un livre sur lui)
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https://doi.org/10.11588/diglit.34269#0077

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MAI 1902

les synthétiser selon une géométrie per-
sonnelle : c'est l'art symboliste prémédité,
qui va du hiératisme des Primitifs aux
visions amorphes de Blake ou de Redon, à
l'intraduisible, à l'obscur, à l'autodestruction
par excès de complexité. Il y a la seconde
évasion, qui est de pénétrer les apparences
et les formes, de descendre en elles, de s'en-
foncer dans leurs méandres, et, à force de
contemplation, de les dissoudre en les com-
parant les unes aux autres, de les ramener à
quelques lois générales, à quelques arché-
types. C'est aussi un symbolisme. C'est celui
d'Hokusaï, l'exact par excellence qui, à la fin
de sa vie, découvrit l'identité des formes de
la faune, de la flore et du minéral avec le
génie d'un Cuvier, et se déclara « le vieil-
lard fou de dessins. Notre âme occidentale
traduira : « visionnaire par l'extrême pénétra-

tion du réel )). C'est le symbolisme qui a
guidé l'intuition de Rodin. C'est, enfin, ce-
lui d'Eugène Carrière.
Il y a entre l'esprit d'Eugène Carrière
et celui de Stéphane Mallarmé des affinités
qui m'ont toujours intéressé et que je n'ai
jamais vu dire. Mallarmé a été l'homme qui
a peut-être compris avec le plus saisissant
génie l'z'zz^zytézzéù'u^zozz des formes visibles
de la pensée — et c'est peut-être le dernier
secret de l'art que cette compréhension. On
cherche la fusion des arts, par exemple
dans les représentations wagnériennes : théori-
quement elle y est. et cependant nous sommes
choqués. Il y a accolement violent des divers
arts, et cela est, sur scène, disgracieux et
même ridicule. On s'en prend à l'insuffi-
sance de la machinerie, ou même au manque
de force physique des acteurs; on ne com-
prend pas que, plus on
recruterait de colosses et
plus on dépenserait pour
perfectionner la machine-
rie, plus la discordance
s'accentuerait, parce que
le principe initial est faux.
Pourtant les artistes réel-
lement valeureux sentent
bien qu'il y a une fusion
logique des arts, c'est-à-
dire une unification ou
tout au moins un parallé-
lisme des rythmes. D'où
vient l'erreur? De ce qu'on
s'acharne à faire dans le
domaine visuel ou auditif
ce qui ne peut être fait
que dans la conscience, à
rendre visible et tangible
une opération de synthèse
qui doit rester individuelle
et abstraite. 11 existe entre
toutes les formes de la
sensibilité et de la pensée
qui en résulte non pas un
accolement extérieur, mais
une z'zzfezyézzé/z'zt/zozz psy-
chologique. Et lorsqu'un
homme a compris cette
mystérieuse faculté natu-
relle, il atteint à un degré
d'art supérieur, où il n'y a
plus précisément ni mots, ni
couleurs, ni sons, ni plans,


EUGÈNE CARRIÈRE ENFANT A LA SOUPIÈRE

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