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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 1.1875 (Teil 2)

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Decamps, Louis: La vente de l'atelier de Millet et l'exposition de ses pastels, [1]
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https://doi.org/10.11588/diglit.16675#0080

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7o h'i

juste dans l'appréciation de son génie : « Une collection de tableaux
ou de dessins, à laquelle l'amateur a apporté tout le goût et le
soin dont il est capable, qu'il a formée en y mettant tout le temps
et toute la patience nécessaires, offre sans contredit au public un
puissant intérêt ; cependant nous croyons qu'un recueil de-
tableaux, d'esquisses et de dessins tels que l'artiste les laisse après
sa mort, tout inachevées et incomplètes que soient ces œuvres,
offre encore un attrait plus vit' et un intérêt plus puissant pour le
véritable amateur. Et cela est encore plus vrai quand cet artiste

est un homme de la valeur de J.-F. Millet, un des talents les
plus remarquables de notre époque, et nous ne craignons pas
d'ajouter une des plus grandes illustrations dont la France puisse
se glorifier depuis le Poussin et Claude Lorrain.

« Le style, c'est l'homme, » a dit Buffon; jamais ce mot n'a pu
mieux trouver son application. On peut dire hardiment de Millet :
« l'œuvre, c'est l'homme; et, en effet, éducation première, souve-
nirs d'enfance, toute une existence si pénible de labeur, d'espé-
rances et de déceptions, pour quiconque l'a connu, tout cela se

anes dans une plaine par la pluie.

Fac-similé d'un dessin de Théophile Chauvel, d'après le pastel de Millet.
(Collection de M. Emile Gavct.)

retrouve dans sa peinture. Il n'a si bien peint l'homme que
parce qu'il s'est peint lui-même. »

Rien n'est plus vrai; le futur grand artiste a été attaché à la
glèbe avant de prendre les pinceaux; il a connu les plus durs
travaux de la terre, cet homme qui portait en lui tout un monde
de hautes pensées; aussi y a-t-il une voix de son pas& qui fait
écho dans chacune de ses toiles ; on sent, à la fière tournure de
ses moindres compositions, qu'il a voulu faire comprendre tout
ce qu'il pouvait y avoir d'humain dans la plus noble acception,
— il n'en avait que trop l'expérience personnelle, — sous cette
enveloppe du paysan souvent en apparence presque bestiale à
force de pénibles labeurs de chaque jour et d'écrasement physique.

Ce côté grandiose, qui distingue au plus haut degré la manière

de Millet, nous a toujours semblé bien plus appréciable et plus
complètement réalisé dans la collection de pastels appartenant à
M. Emile Gavet que dans la plupart des tableaux les plus ache-
vés du maître; l'enveloppe souvent un peu molle de ces derniers, .
surtout dans ses œuvres récentes, nous paraît altérer le caractère
superbe de ses figures, et cette ampleur du geste, cette mimique
magistrale qui font immédiatement penser à Michel-Ange. Ces
admirables qualités, particulièrement accentuées, selon nous, dans
les dessins, nous les avons retrouvées avec bonheur aussi éner-
giques, aussi mâles dans ces magnifiques esquisses qui viennent
d'être vendues à l'hôtel Drouoc.

Louis Decamps.

(La suite au prochain numéro.)
 
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