Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

L' art: revue hebdomadaire illustrée — 1.1875 (Teil 2)

DOI Artikel:
Leroi, Paul: Salon de 1875, [4]
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.16675#0089

DWork-Logo
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
78 L'ART.

Voici le sujet académique de Un instant seul1. Le fond du tableau laisse entrevoir le bas
d'un lit qui est en perspective comme la rue de l'Attente; à gauche, un pied de ce meuble doré
sur tranches porte le nom de M. Muller, en caractères plus qu'apparents, et, de peur que nul
n'en ignore, ce nom illustre resplendit aussi sur le cadre, cette fois en majuscules noires et
blanches, ornées d'arabesques rouges-, c'est du meilleur goût. Devant le lit, à terre sur le tapis, un
bébé, qui pourrait avoir des pieds et des jambes, a commencé par plonger dans une poêlée de bouillie
la tête de sa poupée, que l'on aperçoit les jambes en l'air ; voilà maintenant que le jeune et charmant
phénomène, après avoir enroulé autour d'une de ses mains la lourde chaîne de montre de son père,
a tout naturellement ouvert celle-ci et se paye le plaisir d'y verser de la bouillie à grande cuillerée!

Pour un joli sujet, c'est un bien joli sujet. Et c'est dessiné, grands dieux! et c'est peint!...

Le Roi Lear, —mais je vois que vous préférez que je ne vous parle point du Roi Lear, — et je vous
en remercie.

Descendons au jardin : le directeur de l'École des Beaux-Arts nous y dédommagera largement du
supplice que nous venons d'endurer, en nous arrêtant aux élucubrations de son confrère en Institut.
Le marbre du buste de Mgr Darboy 2 ajoutera encore à l'éclatant succès obtenu par le plâtre lorsque
l'artiste l'exposa en 1875 ; on ne se lasse pas d'admirer le grand caractère de cette œuvre d'une sim-
plicité si magistrale en dépit des vêtements sacerdotaux et de la mitre qui n'étaient pas précisément
des accessoires faits à souhait pour un sculpteur. Le modèle ne revit pas seulement de la vie exté-
rieure ; il pense d'austères pensées ; on les lit sur son visage. Œuvre complète qui honore au plus
haut degré celui qui Fa conçue, celui qui l'a exécutée ; œuvre du style le plus élevé qui marque
dans la vie de ce maître une date illustre.

Un Terme3 (modèle, plâtre) complète l'Exposition de M. Guillaume; le sujet n'est guère neuf,
mais un homme de goût rajeunit les thèmes les plus antiques, et c'est ce qu'a fort heureusement fait
l'auteur de cette œuvre distinguée; le vieux Faune couronné de pampres et retenant entre ses bras le
petit Amour, qui, de la main gauche, lui tire la barbe, est une aimable inspiration et forme un bon
motif de décoration. Le corps du Cupidon enfant manque un peu d'ampleur, mais il est évident que
le maître reverra toute la composition avant l'exécution définitive, et, s'il se décide, comme je le
crois, à diminuer légèrement la gaine dont la grande élévation contribue à rapetisser le corps du dieu
captif, l'ensemble y gagnera sous tous rapports.

Un groupe colossal, commandé à M. Perraud pour l'Avenue de l'Observatoire par la Préfecture
de la Seine, est l'objet des plus vives critiques. Il n'est malheureusement que trop vrai que cette
énorme machine est un composé d'emprunts à l'Hercule Farnèse, au Milon de Crotone et à la Vénus
de Milo. On chercherait difficilement composition plus lourde, plus énigmatique, associée à une exé-
cution plus pédantesque. Ce marbre est intitulé : Le Jour, et ce sujet est expliqué par ces lignes, qui
n'expliquent absolument rien :

a Un des compagnons d'Hercule se désaltère à la Source , après de rudes travaux et des
combats héroïques contre les brigands et les monstres qui épouvantaient la terre. »

Après avoir lu, on est plus perplexe que jamais ; on se demande vainement le mot du logogriphe,
et nul ne le trouve. En quoi cette virago aux traits si insignifiants personnifie-t-elle la Source? Est-ce
à cause de l'urne qu'elle semble cependant ignorer, bien qu'elle la soutienne ? Comment la réunion de
ce géant, dont tous les muscles sont tendus à éclater, uniquement pour boire une goutte d'eau, et de
cette très-forte femme profondément impassible, peut-elle nous représenter le Jour?

L'esprit le plus subtil ne .parviendrait pas à justifier cet étrange arrangement dépourvu de tout
caractère et qui silhouettera d'une façon lamentable à l'endroit réservé pour ce monument.

Les critiques réfléchis ne sauraient s'étonner de cet insuccès; la seule chose qui puisse surprendre,
c'est que la Préfecture de la Seine se soit adressée à M. Perraud après le complet échec de son
groupe de la façade du nouvel Opéra; son absence radicale de puissance créatrice avait été si bien
démontrée qu'il y avait témérité à en faire de nouveau l'expérience. Ce statuaire estimable sait tout ce

1. N° 1527.

2. N° 3138.

3. N" 3139.
 
Annotationen