LA SCULPTURE ÉGYPTIENNE. 187
donner de meilleur exemple de ses effets, que les bordures de nos trottoirs. Mais, outre que
la boucharde est d'une fabrication compliquée, nous ne la voyons figurée sur aucun monument
égyptien, parmi les représentations analogues. Aussi doutons-nous fort qu'elle ait été connue
jadis en Egypte. Il n'en devait pas être de même de la marteline, sorte de bâche à deux tranchants.
On s'en sert toujours comme d'un marteau en frappant à plat 5 la matière éclate en morceaux plus ou
moins petits, suivant la grandeur et le poids de l'outil et la volonté du travailleur; l'on peut ainsi
arriver à préciser la forme assez vite et assez loin pour ne pas avoir besoin de ciseau. L'usage en a
dû être fréquent en Egypte, quoique sa forme ait pu varier;
la plus grande partie des monuments sont finis à l'aide de
ce seul instrument.
Le ciseau vient en dernier lieu. Il sert surtout à
obtenir ces arêtes vives et droites qui sont si rares dans
les monuments égyptiens. L'emploi en est du reste assez
lent, et demande, si l'on veut réellement couper la matière
et non la faire éclater, que l'instrument soit réaffûté et
retrempé continuellement. Nous n'avons pas malheureuse-
ment au Louvre de monuments en pierre dure de l'ancien
empire, mais nous doutons que le ciseau y fût en usage,
car nous ne constatons son emploi que très-rarement et
encore dans des monuments d'une époque peu reculée.
Lorsqu'on examine des parties creusées, des hiéro-
glyphes par exemple, dont l'intérieur n'est pas poli, faute
d'avoir été fouillé avec assez de patience, l'arête de la
lettre, regagnée par le poli de la surface, laisse voir une
série suivie de cercles ou entailles irrégulières, qui sont
produits par l'éclatement de la matière et qui montre bien
que c'est la pointe d'une substance plus dure qui a servi
à dessiner le contour. Sur le beau sarcophage en basalte,
du Louvre, la netteté des contours hiéroglyphiques démontre
clairement le découpage au ciseau ; mais les fonds des
lettres, ce qui est sans exception dans ce musée, dénotent
l'unique emploi de la marteline. En général tous les monu-
ments égyptiens attestent un travail assez grossier. Si l'on
regarde bien en effet les grandes surfaces, comme celle du
Sphinx en granit rose du Louvre, on voit que le poli n'a pas
pu, dans une grande quantité d'endroits, regagner les écla-
tements produits par la grosse pointe qui a suffi à l'ébauche.
A des époques plus avancées, de même que les Romains, les artistes égyptiens pousseront
plus loin la finesse d'exécution ; mais dans les anciennes époques, ils se sont généralement arrêtés à
une ébauche large et simplifiée le plus possible.
Avec des instruments tels que ceux que nous avons énumérés tout à l'heure, le polissage
était nécessaire, on le comprend, pour rattraper tous les éclatements de la matière ; il était
la terminaison forcée du travail ; aussi les Égyptiens polirent-ils toutes les surfaces des statues.
En même temps le polissage, par cela même qu'il augmentait l'intensité de couleur de la pierre et
qu'il offrait aux yeux des nuances de tons variés, quoique sévères, était en harmonie avec
le goût des Égyptiens pour la polychromie. Ce goût était tellement prononcé chez eux que, toutes les
fois qu'ils se servirent de pierre calcaire ou de terre cuite, ils prirent soin de les peindre
et de les émailler, et qu'ils firent de même pour les monuments de pierre dure, ayant de très-grandes
dimensions.
Parmi les sujets et scènes divers représentés à l'Abasse de Thèbes, on voit des sculpteurs montés
sur des échafaudages, autour des statues qu'ils sont en train de tailler et de polir. Les sculpteurs
La. déesse Ananké et Ramsès.
Dessin de Maradan, gravure de Renard.
donner de meilleur exemple de ses effets, que les bordures de nos trottoirs. Mais, outre que
la boucharde est d'une fabrication compliquée, nous ne la voyons figurée sur aucun monument
égyptien, parmi les représentations analogues. Aussi doutons-nous fort qu'elle ait été connue
jadis en Egypte. Il n'en devait pas être de même de la marteline, sorte de bâche à deux tranchants.
On s'en sert toujours comme d'un marteau en frappant à plat 5 la matière éclate en morceaux plus ou
moins petits, suivant la grandeur et le poids de l'outil et la volonté du travailleur; l'on peut ainsi
arriver à préciser la forme assez vite et assez loin pour ne pas avoir besoin de ciseau. L'usage en a
dû être fréquent en Egypte, quoique sa forme ait pu varier;
la plus grande partie des monuments sont finis à l'aide de
ce seul instrument.
Le ciseau vient en dernier lieu. Il sert surtout à
obtenir ces arêtes vives et droites qui sont si rares dans
les monuments égyptiens. L'emploi en est du reste assez
lent, et demande, si l'on veut réellement couper la matière
et non la faire éclater, que l'instrument soit réaffûté et
retrempé continuellement. Nous n'avons pas malheureuse-
ment au Louvre de monuments en pierre dure de l'ancien
empire, mais nous doutons que le ciseau y fût en usage,
car nous ne constatons son emploi que très-rarement et
encore dans des monuments d'une époque peu reculée.
Lorsqu'on examine des parties creusées, des hiéro-
glyphes par exemple, dont l'intérieur n'est pas poli, faute
d'avoir été fouillé avec assez de patience, l'arête de la
lettre, regagnée par le poli de la surface, laisse voir une
série suivie de cercles ou entailles irrégulières, qui sont
produits par l'éclatement de la matière et qui montre bien
que c'est la pointe d'une substance plus dure qui a servi
à dessiner le contour. Sur le beau sarcophage en basalte,
du Louvre, la netteté des contours hiéroglyphiques démontre
clairement le découpage au ciseau ; mais les fonds des
lettres, ce qui est sans exception dans ce musée, dénotent
l'unique emploi de la marteline. En général tous les monu-
ments égyptiens attestent un travail assez grossier. Si l'on
regarde bien en effet les grandes surfaces, comme celle du
Sphinx en granit rose du Louvre, on voit que le poli n'a pas
pu, dans une grande quantité d'endroits, regagner les écla-
tements produits par la grosse pointe qui a suffi à l'ébauche.
A des époques plus avancées, de même que les Romains, les artistes égyptiens pousseront
plus loin la finesse d'exécution ; mais dans les anciennes époques, ils se sont généralement arrêtés à
une ébauche large et simplifiée le plus possible.
Avec des instruments tels que ceux que nous avons énumérés tout à l'heure, le polissage
était nécessaire, on le comprend, pour rattraper tous les éclatements de la matière ; il était
la terminaison forcée du travail ; aussi les Égyptiens polirent-ils toutes les surfaces des statues.
En même temps le polissage, par cela même qu'il augmentait l'intensité de couleur de la pierre et
qu'il offrait aux yeux des nuances de tons variés, quoique sévères, était en harmonie avec
le goût des Égyptiens pour la polychromie. Ce goût était tellement prononcé chez eux que, toutes les
fois qu'ils se servirent de pierre calcaire ou de terre cuite, ils prirent soin de les peindre
et de les émailler, et qu'ils firent de même pour les monuments de pierre dure, ayant de très-grandes
dimensions.
Parmi les sujets et scènes divers représentés à l'Abasse de Thèbes, on voit des sculpteurs montés
sur des échafaudages, autour des statues qu'ils sont en train de tailler et de polir. Les sculpteurs
La. déesse Ananké et Ramsès.
Dessin de Maradan, gravure de Renard.