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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 1.1875 (Teil 2)

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Puliga, Henrietta Consuleo Sansom: Le gout de l'art: chez un puritain du XVIIe siècle$nElektronische Ressource
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https://doi.org/10.11588/diglit.16675#0391

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352 L'ART.

famille et selon la règle la plus stricte de la foi puritaine. Mme Hutchinson, dans ses admirables
mémoires de la vie de son mari, a laissé de leur existence à Owthorpe une description minutieuse;
nous savons leurs gotits, leurs plaisirs, et rien n'est plus opposé à l'idée que l'on se fait des puritains
dont le nom n'évoque plus que des idées moroses et semble la négation de tout idéal. La vérité est
tout autre; nous voyons un gentilhomme puritain, élevé comme tel, et qui aime la musique, la danse,
l'escrime, qui a le. goût le plus cultivé pour l'art sous toutes ses formes. Cette maison d'Owthorpe,
détruite pendant la guerre civile, avait été rebâtie par le colonel Hutchinson et avec une entente parfaite
de tous les plaisirs nobles de la vie. A l'intérieur, les salles sont élevées, décorées avec soin et, comme
toute la maison, tapissées de tableaux, car à chacun de ses voyages à Londres, le colonel s'applique à
connaître les meilleurs artistes, peintres, graveurs, sculpteurs. Les plaisirs des yeux sont recherchés
en toutes choses, les beaux horizons sont ménagés avec soin; de cette fenêtre on aperçoit le château

de Belvoir, de celle-ci on jouit des splendeurs du soleil
couchant. La demeure de cette famille puritaine con-
tient une salle de bal, et dans la cage même de l'escalier
on a ménagé un emplacement pour l'orchestre, car la
musique est tout aussi en honneur à Owthorpe que la
peinture; Hutchinson l'aime et la cultive et y excelle;
lui-même l'enseigne à ses enfants, et trouve dans cet
art divin les plus grandes consolations de ses heures de
tristesse. Mme Hutchinson insiste avec une visible com-
plaisance sur les penchants artistiques de son mari, et,
tout exclusive que fut sa foi i-eligieuse et politique, elle
ne croit pas que l'une ou l'autre soit incompatible avec
le goût de l'art.

Il est évident que le sentiment religieux, quand il
se transforme en fanatisme, est essentiellement hostile
à tout développement artistique. Dès que Y élément
humain cesse d'exister dans la pensée humaine, il en
arrête l'essor, mais une certaine exaltation religieuse
raffinera pour ainsi dire les qualités auxquelles elle

imprimera un cachet plus élevé. Nul doute qu'un Hut-

Fortrait du colonel Hutchinson r 1

chinson ne pouvait accepter de l'art que ses incarna-

d'après une peinture du temps.

tions les plus pures, mais celles-là il les acceptait et les
aimait avec enthousiasme, comme l'art veut être aimé.
Le portrait devait plaire et plaisait à ces consciences Lin peu ombrageuses. Ceux du colonel et
de sa femme ont un intérêt très-vif comme étant caractéristiques de ce type puritain sans rudesse ni
exagération extérieure de costume. Le colonel est représenté couvert de son armure; sa femme, qui
s'élève totijoLirs avec une telle virulence contre toute indécence dans la parure, a pourtant le cou et
la gorge découverts, mais en même temps l'expression placide du visage fait songer à ces figures de
vierges flamandes, chez qui le reflet de la maternité se confond si harmonieusement avec celui de la
pureté la plus idéale, et la tête de l'enfant placé à ses côtés et levant vers sa mère un regard d'une
angélique candeur pourrait être celle d'un chérubin absorbé par une muette adoration. Ce portrait
a tout le charme, tout le repos de certaines scènes de famille peintes par les maîtres hollandais,
mais rendu plus attrayant par l'extrême distinction de la femme, dont les mains seules si fines et si
aristocratiques disent la race. L'arrangement, la pose, le geste ne révèlent point, dans leur tranquille
simplicité, les faCLiltés viriles, l'indomptable courage de celle qui fut une matrone presque romaine,
mais on comprend, en voyant cette image, ce mélange de goiits délicats et de sévérité puritaine qui
paraît d'abord singidier. Certes, un puritanisme aussi élevé que celui des Hutchinson, en devenant
plus général, n'etit pu exercer sur l'art qu'une heureuse influence et être favorable au libre épanouis-
sement dti génie, et cette influence n'est pas imaginaire. Nulle part l'art du portrait ne s'éleva plus
haut qLie dans la paisible Hollande. C'est que pour faire noble, l'artiste n'avait qu'à faire vrai et
 
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