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L' art décoratif: revue de lárt ancien et de la vie artistique moderne — 5,1.1903

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Thomas, Albert: Madame Berthe Girardet
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https://doi.org/10.11588/diglit.34207#0141

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L'ART DECORATIF

ioureuse. La tendresse de M"'e Girardet ne se
limite pas toutefois au cercle de ia famille,
elle se répand au dehors, sur les faibles et
les pauvres, sur tous les déshérités du sort.
La tète de vieille de l'Exposition universelle
de igoo, une statuette de paysanne bran-
lante et recroquevillée, l'afeule de la Aézzé-
hz'r?zozz prouvent une àme largement atten-
tive, pitoyable, aimante. Beaucoup de femmes

ont aujourd'hui cette admirable ouverture
de cœur. Et nous dont l'égoïste amour
n'embrasse que deux ou trois êtres choisis,
nous nous étonnons d'une telle faculté de
chérir. Philanthropes par esprit de justice,
nous ne savons donner aux hommes ni
notre émotion ni nos pleurs. Lequel d'entre
nous aurait conçu cette scène, le Atzz'zz <yzzo-
ïzhzezz, que M"^ Girardet exposera au pro-
chain Salon? Un talent masculin eût-il
exprimé de façon aussi touchante les sen-
timents des trois êtres réunis autour de la
chose nécessaire et sacrée? Le vieillard, face

longue et ravagée, épaules tombantes, croise
les mains devant la miche qu'il va rompre.
L'incertitude du repas de demain attriste ses
regards et sa bouche, mais il remercie Dieu
avec une ferveur bien humble pour la maigre
nourriture du jour. La femme, moins ré-
signée, verse des larmes amères et s'affaisse
sous le fardeau de son intolérable vie. La
hllette lève ses yeux confiants vers son
grand'père, si las, si faible,
si sujet, et qui cependant,
pour elle, personnifie la
Providence. Désespoir,
acceptation mélancolique,
confiance ingénue, quelle
émouvante trinité ! Je n'ai
vu le groupe qu'à l'état d'é-
bauche. Mais j'cn ai gardé
une impression profonde.
Je l'évoque, dans le clair
atelier du boulevard Inker-
mann, à Neuilly, dressant
ses pathétiques figures , et
j'entends le sculpteur, dame
jeune , élégante , parée,
m'entretenir simplement
de son rêve humanitaire,
me rapporter ce propos
du pauvre homme qui lui
servit de modèle pour le
Auz'zz ^zzuïz'hzezz: «J'ai le
contentement puisque le
Maître veut que je sois
misérable ! H
L'atelier de Neuillv,
coquet et discret, caché
aux yeux des passants par
un voile de verdure, por-
tant à son fronton une
saine image de maternité,
a vu naître d'autres
œuvres encore : le Dzqrur? Rzt jTr/zezz;*, inspiré
d'un roman célèbre de Loti, sentimental sans
aucune fadeur, une fh'argt? avec l'enfant tout
à fait exquise, auréolée de divin, le Suûoï
he AGé7 et des bustes nombreux, parmi les-
quels le jzoz'P'uzY ha Af. Gz'z'uz'heï, véridique
et familier, reproduisant les traits d'un
peintre aimable et d'un époux enthousiaste.
Tout cela fut mûri là, dans la tiède retraite,
ouverte si tendrement aux grâces et aux
tristesses de la vie ambiante. Un To/Atho/*,
nerveux et fier, rapporté de Séville, atteste
cependant que le sculpteur s'inquiète parfois


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