Troisième année. — N° 106
LE NUMÉRO : 15 CENTIMES
1 Mai 1889
L'ART FRANÇAIS
JUrtistiquc J^ebiïtnnaîiairf
Texte par Firmin Javel
Illustrations de MM. SILVESTRE & C,e, par leur procédé de Glyptographie
Bureaux : 97, rue Oberkampf, à Paris
ABONNEMENTS. — Paris : un an, 9 francs; six mois, 5 lianes. — Départements : un an, ÎO francs; six mois, 6 francs.
PORTRAIT DE M. ANTONIN PROUST
Par Edouard Manet
L’œuvre qui figure à notre première page est doublement
intéressante , puis -
qu’elle représente
l’homme qui a présidé,
avec une habileté in-
comparable, à l’orga-
nisation de la section
des Beaux-Arts de l’Ex-
position universelle,
et puisqu’elle est si-
gnée du nom d’E-
douard Manet, le pein-
tre si longtemps
contesté et dont le
talent va s’affirmer,
demain, au Champ de
Mars, d’une façon dé-
finitive.
Ce portrait parut au
Salon de 1880 et, en
1881, Manet rempor-
tait une médaille de
deuxième classe mo-
tivée par les portraits
de M. H. Rochefort
et de M. Pertuiset,
mais, en réalité, appli-
cable à la superbe
page exposée un an
avant.
Dans la presse, les
critiques les plus har-
dis, les plus claivoyants,
se prononcèrent très
haut en sa faveur, et'
les lignes suivantes de
M. Philippe Burty ré-
sument assez fidèle-
ment l’opinion :
« De tous les per-
sonnages officiels ou
parlementaires,xM. An-
tonin Proust a eu la
main la plus heureuse :
son portrait par M.Ma-
net. un ancien camaraxL
ÉDOUARD MANET.
Portrait de 5VC ^Antonin Troust.
de l’atelier Couture, est frappant de
ressemblance et de vie active : M. Proust est debout, sanglé dans
sa redingote, la main sur la hanche, la face .en pleine lumière.
non pas avec une grave physionomie de rapporteur, mais avec le
sourire, qui va en s’éteignant, de l’homme d’esprit qui vient de
décocher une ironie. »
Homme d’esprit, M. Antonin Proust l’est plus que personne.
On n’a pas oublié l’un
de ses derniers
«mots», qui eut tant
de succès dans un ban-
quet d’artistes et que
nous avons rapporté
ici : « Il y a des morts
qui sont parfaitement
vivants, et des vivants
qui sont absolument
morts ! » Les traits de
cette finesse et de cette
portée lui sont fami-
liers. Il faudrait les
citer tous, ainsi que
ses discours dont la
collection sera un jour
aussi curieuse à relire
que scs notes de voya-
ges, connues des seuls
lettrés.
Mais, comme tou-
jours , nous nous
trouvons trop à l’étroit,
dans le cadre de ce
journal, pour étudier
une aussi intéressante
physionomie sous tou-
tes ses faces, avec tous
les développements
que cette étude com-
porterait.
Nous nous borne-
rons donc à en rappe-
ler, avec un de nos
confrères de la Revue
Illustrée, Jacques Vol-
ney, les traits les plus
caractéristiques :
« M. Antonin
Proust est député des
Deux-Sèvres, conser
vant à travers tous
les cahots de la poli-
tique et tous les soubresauts du suffrage universel, l’entière
confiance de ses électeurs. Il fut ministre, et il le fut avec Gam-
betta, ce qui double la valeur dit portefeuille. Son passage à
LE NUMÉRO : 15 CENTIMES
1 Mai 1889
L'ART FRANÇAIS
JUrtistiquc J^ebiïtnnaîiairf
Texte par Firmin Javel
Illustrations de MM. SILVESTRE & C,e, par leur procédé de Glyptographie
Bureaux : 97, rue Oberkampf, à Paris
ABONNEMENTS. — Paris : un an, 9 francs; six mois, 5 lianes. — Départements : un an, ÎO francs; six mois, 6 francs.
PORTRAIT DE M. ANTONIN PROUST
Par Edouard Manet
L’œuvre qui figure à notre première page est doublement
intéressante , puis -
qu’elle représente
l’homme qui a présidé,
avec une habileté in-
comparable, à l’orga-
nisation de la section
des Beaux-Arts de l’Ex-
position universelle,
et puisqu’elle est si-
gnée du nom d’E-
douard Manet, le pein-
tre si longtemps
contesté et dont le
talent va s’affirmer,
demain, au Champ de
Mars, d’une façon dé-
finitive.
Ce portrait parut au
Salon de 1880 et, en
1881, Manet rempor-
tait une médaille de
deuxième classe mo-
tivée par les portraits
de M. H. Rochefort
et de M. Pertuiset,
mais, en réalité, appli-
cable à la superbe
page exposée un an
avant.
Dans la presse, les
critiques les plus har-
dis, les plus claivoyants,
se prononcèrent très
haut en sa faveur, et'
les lignes suivantes de
M. Philippe Burty ré-
sument assez fidèle-
ment l’opinion :
« De tous les per-
sonnages officiels ou
parlementaires,xM. An-
tonin Proust a eu la
main la plus heureuse :
son portrait par M.Ma-
net. un ancien camaraxL
ÉDOUARD MANET.
Portrait de 5VC ^Antonin Troust.
de l’atelier Couture, est frappant de
ressemblance et de vie active : M. Proust est debout, sanglé dans
sa redingote, la main sur la hanche, la face .en pleine lumière.
non pas avec une grave physionomie de rapporteur, mais avec le
sourire, qui va en s’éteignant, de l’homme d’esprit qui vient de
décocher une ironie. »
Homme d’esprit, M. Antonin Proust l’est plus que personne.
On n’a pas oublié l’un
de ses derniers
«mots», qui eut tant
de succès dans un ban-
quet d’artistes et que
nous avons rapporté
ici : « Il y a des morts
qui sont parfaitement
vivants, et des vivants
qui sont absolument
morts ! » Les traits de
cette finesse et de cette
portée lui sont fami-
liers. Il faudrait les
citer tous, ainsi que
ses discours dont la
collection sera un jour
aussi curieuse à relire
que scs notes de voya-
ges, connues des seuls
lettrés.
Mais, comme tou-
jours , nous nous
trouvons trop à l’étroit,
dans le cadre de ce
journal, pour étudier
une aussi intéressante
physionomie sous tou-
tes ses faces, avec tous
les développements
que cette étude com-
porterait.
Nous nous borne-
rons donc à en rappe-
ler, avec un de nos
confrères de la Revue
Illustrée, Jacques Vol-
ney, les traits les plus
caractéristiques :
« M. Antonin
Proust est député des
Deux-Sèvres, conser
vant à travers tous
les cahots de la poli-
tique et tous les soubresauts du suffrage universel, l’entière
confiance de ses électeurs. Il fut ministre, et il le fut avec Gam-
betta, ce qui double la valeur dit portefeuille. Son passage à