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Bégin, Émile Auguste Nicolas Jules; Rouargue, Émile [Ill.]; Rouargue, Adolphe [Ill.]
Voyage pittoresque en Espagne et en Portugal — Paris: Belin-Leprieur et Morizot, éditeurs, 1852

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https://doi.org/10.11588/diglit.70977#0316
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VOYAGE EN ESPAGNE.

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rend le complice du regard : une, deux, trois, dix intrigues commen-
cent, se nouent, se dénouent en même temps. Que de choses faites en
une heure!...
L'Angelus sonne : tous les promeneurs demeurent immobiles; toutes
les voitures s'arrêtent; la même.main qui donnait, à l'instant même, un
rendez-vous, fait le signe de la croix; la bouche qui disait à une créature
mortelle : Je t'aime, recommande à la Vierge les destinées de son
cœur. La prière terminée, chacun reprend sa promenade jusqu'à l'heure
du souper ou des tertulias. Les tertulias ne sont autre chose que nos
causeries de salon, avec cette différence qu'au-delà des Pyrénées les la-
rynx ne se dessèchent pas, car on n'y voit presque jamais apparaître le
verre d'eau sucrée; ce sont des causeries arides comme les campagnes
après l'été. Parfois cependant, surtout quand on veut fêter un étranger,
il paraît un ambigu dans lequel le xérès et le chocolat tiennent une place
fort distinguée; il arrive même qu'on serve un souper à la française. Dans
une terlulia de Séville, où, pendant deux heures, hommes et femmes
s'étaient boudés, d'une extrémité à l'autre du salon, deux jeunes per-
sonnes nous ont fait entendre des canciones andalouses terminées à la
dominante, et quelques seguidillas passablement originales; puis sont
arrivées des mozas, artistement costumées, qui nous ont offert, sur de
grands plateaux, la bebida de naranja helada, la boisson d'orange à la
glace, Yorchata de chufas, sorte d'orgeat à la neige, et des glaces appe-
lées sorbetes. Je me suis retiré vers minuit, plus flatté des rafraîchisse-
ments que de la musique indigène.
A minuit, tout le monde dort dans Séville, excepté néanmoins les pu-
pilles des Bariola modernes s'il en est encore; excepté les norias, amou-
reux non transis, qui, de neufheures à minuit, même plus tard, se tien-
nent debout, sous le balcon de leur noria, ou couchés le long de la grille
du patio, échangeant avec elle de tendres promesses. On cause ainsi plu-
sieurs mois, plusieurs années avant le mariage; et l'on appelle celape/ar
el pabo, plumer le dinde. Les pères n'y mettent aucune opposition.
Bien plus, àla promenade, le norio, si la noria le permet, peut l'aborder,
l'accompagner, en présence de sa mère, ou de sa duègne, sans que ni
la duègne, ni la mère le trouvent mauvais; et quand le jour d'être
admis officiellement est arrivé, c'est encore la noria qui se charge de né-
 
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