Bulletin du Musée National de Varsovie (21.1980)

La comparaison des esquisses a 1'huile et des tableaux acheves de Simmler pose encore
d'autres problemes. Toat comme les esąuisses de nombreux academiques, celles de Simmler
sont frappantes de fraicheur, touchant le spectateur actuel sensible a la facture et interesse
par faspect intime du processus createur, spectateur qui — malgre la facture lisse des ta-
bleaux surrealistes — reste hostile a la surface „lechee" de la majorite des tableaux du XIX"
siecle. Le probleme „esquisse et oeuvre finale" fut vivement discute par les critiques et artistes
du siecle passe31. Les esąuisses etaient appreciees depuis longtemps, mais surtout dans des
buts utilitaires: en tant qu'echantillon des possibilites pour un acheteur eventuel ou en tant
qu'indication pour les collaboratcurs. Plus tard on commenęa a remarquer les valeurs esthe-
tiąues de l'esquisse, sa spontaneite et la liberte laissee a Fimagination du spectateur. Or, en
accord avec 1'approche academique et intellectuel a la creation artistique, la spontaneite doit
etre soumise a la pensee de 1'artiste. Ainsi le processus pictural comprenait deux pbases inde-
pendantes: la conception et l'execution. La phase de conception, justement imagee par l'es-
quisse, etait le domaine du talent inne et de 1'originalite, la phase d'execution le domaine de
l'habilete et des capacites acquises. A partir du romantisme, le role de l'esquisse augmenta,
y voyant une possibilite de devoiler son originalite et de se Jiberer des rigueurs scolaires. L'es-
sence du conflit entre 1'acadćmie et de nombreuses tendances novatrices du XIXe siecle fut
le raport de 1'mteret de la phase d'exćcution a celle de conception et l'elevation de l'esquisse
au rang d'oeuvre autonome.

Dans ce conflit, Simmler penche nettement dans ses tableaux vers les „finisseurs", partisans
de l'ouvrage soigne, souvent compris comme un devoir envers le public, decoulant d'une con-
ception de l'ethique professionnelle. Son metier pictural beau et solide, cette „science techniąue
apportće d'Occident"32 le distingue dans Part polonais de ce temps. Les tableaux de Simmler
sont executes avec un soin immense de chaque fragment de la toile. II consacra autant de souci
au fond qu'aux visages, aux mains fameuses pour ce peintre, ou aux accessoires de premier plan.
Du point de vue technique, tout le tableau est uniforme, il n'y a pas de portions plus travail-
lees et d'autres negligees. L'exactitude, proche parfois de la pedanterie, est accompagnee d'un
gout reel pour le rendu des diverses matieres et factures: des velours, des damas, des soieries,
des baptistes, des dentelles, des bijoux, des carnations ou des cheveux. Souvent au premier
plan est place un objet minutieusement rendu, purement decoratif et non „eloquent", tel que
1'encensoir dans La mort de Barbara ou la peau d'ours avec la corne richement ornee dans
Catherina Jagellon. La finition precise du tableau permettait de developper une erudition ar-
chćologique, de presenter tous les details scrupuleusement choisis et analyses des costumes,
des meubles et des accessoires. Cet argument des partisans du „fini" dut etre d'importance
pour Simmler qui joignait l'execution habile avec une approche serieuse a la „documentation
historique" des scenes du passe. II faut aussi reconnaitre que Simmler parvenait dans la fini-
tion du tableau a eviter la secheresse si souvent reprochće aux „finisseurs" fervents aussi bien
que la surcharge en details, pouvant troubler l'equilibre du tableau.

La maitrise de Simmler dans l'execution se manifeste le mieux dans les portraits. Le fait
que justement le portrait fut le domaine de ses meilleures realisations est marquant pour son
type de talent et de temperament artistique. Des deux phases de creation — conception et

31. Une grandę partie du livre de Boime, The Academy..., est consacree h ce probleme.

32. Kociatkiewiczówna, op. cii., p. 43.

113