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Bulletin du Musée National de Varsovie — 25.1984

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Nr. 3-4
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Michałkowa, Janina: Patience
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https://doi.org/10.11588/diglit.18900#0100
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Obedientia — l’Obéissance et un homme non identifié montrant de la main le champ. LajPatien-
ce, avec son attribut fréquent — l’enclume, mène cet attellage curieux composé d’un cheval
et d’un boeuf26. Les animaux sont chargés de façon ridicule d’ustensiles agricoles : faux, rateau,
fourche, fléau, pelle, scie. Sut un outil difficile à identifier est inscrit Perseverantia — la Persévé-
rance. Au dessus de l’attelage se tiouve une inscription Labor — le Travail. Cet attelage pauvre
mais prêt au travail avance à travers les champs où des semeurs, des moissonneurs et des labou-
reurs remplissent leurs tâches avec zèle. C’est comme une illustration de l’idée, toujours
populaire en temps de catastrophes, du travail organique; le seul moyen de la libération
de l’esclavage est le Travail, la Persévérance, la Patience.

Remarquons que toutes les images de Patientia citées remontent à la fin du XVIe ou début
du XVIIe siècle et proviennent des Pays Bas. C’était un sujet d’actualité politique et sociale!

Revenons au tableau du Musée National de Varsovie, à notre Patientia (fig. 1). La femme
enchaînée au rocher, à peine recouverte d’un tissu, les yeux levés, crucifix à la main. Contrair-
ement à la majorité des Patientiae citées, la nôtre est à demi-nue. Cela la rapproche
d’Andromède attendant la délivrance; on y voit cette parenté italienne, cette „manière
florentino-romaine” dont parlent les spécjalistes de Backer. On pourrait citer le commentaire
que Vasari a ajouté â sa propre représentation de Patientia. Il écrit que Patientia devait être
seulement à demi vêtue, pour montrer l’êqulibre antre la richesse et la pauvreté: elle devait
avoir les pieds enchaînés pour ne pas abimer les parties nobles du corps...Enchaînée au rocher,
elle attend que les gouttes d’eau tombant d’une clepsydre détruisent le rocher27.

Le répertoire des signes et symboles utilisés dans notre tableau sont du domaine traditionnelles
de Patientia Christiana : le rocher-soutien, car il faut adopter un tel sens chrétien et „néerlandais”
dans notre tableau28, les yeux levés vers Dieu, l’agneau, l’ange, le crucifix. Il y a pourtant un
élément nouveau: Chronos — le Temps qui, semble-t-il, brise les chaînes de Patientia. Il est
incarné par un vieillard ailé avec la clepsydre et un instrument rappelant la faucille; des attributs
sont trop évidents pour les exepliquer29. Mais ce n’est pas le Temps tragique qui signifie la mort.
Ce n’est pas le Temps donnant le coup de grâce, détruisant peu à peu ou rendant vaines
toutes les plus magnifiques créations de l’esprit et des mains de l’homme: les livres, les vases, les
joyaux- comme le suggèrent de manière voilée les tableaux hollandais. Ce n’est pas non plus le
Temps détruisant de sa „dent” les sculptures antiques, les plus solides constructions, comme le
montrent les gravures de François Perrier et Willem Swidden. Ce n’est pas, enfin, le Temps —
— Saturne dévorant ses enfants, comme le montra Goya30.

Sur notre tableau, le Temps semble bienveillant. C’est le Temps — Libérateur, défenseur
des plus hautes idées. Le Temps aide sa fille la Vérité à sortir des ténèbres, comme dans la

26. Le boeuf était le plus souvent associé à un labeur lourd, plein de sacrifice. Il était aussi une victime d’offrande. Joachim
Camerarius, Symbolorum et emblernatum ex animalibus ... II, Nuremberg, 1595, n° 24, écrit: „Soutenir le joug et présenter
le cou à la lame du couteau —■ le boeuf est destiné à ces deux choses”. Dans Gabriel Rollenhagen, Selectorum emblernatum
centuria secunda, Arnh., 1613, n° 39, est représenté un boeuf lent et lourd, mais, comme écrit Rollenhagen: „Allant pas
à pas, lentement, on arrive loin”, d’après Henkel, Schône (éd.), op. cit., cols 529—530, 528

.27. Ce commentaire est cité par Wittkower, op. cit., p. 172.

28. Pour les Néerlandais, le rocher auquel est enchainée Patientia est la roche-soutien du Christ. P. ex. Patientia de Cornelis
Anthonisz est debout sur un bloc de pierre avec l’inscription Christus; Boon, op. cit., pp. 12—13, fig. 7.

29. Cf. surtout F. Saxl, „Veritas Filia Temporis”, Philosophy and History, Essays presented to Ernst Cassirer, Oxford, 1936,
pp. 197—222 ; R. Wittkower, „Chance, Time and Virtue”, Journal ofthe Warburg Institute, I, 1937, pp. 312—-321 ; E. Panof-
sky, „Father Time”, dans: Studies in Iconology, New-York and Evanston, 1962, pp. 69—93; Held, op. cit.; Chew, op. cit.
Cela n’épuise évidemment pas la liste des nombreuses études sur le Temps, les nombreuses fonctions et contextes en lesquels
il apparaît dans la littérature et l’art.

30. Frontispice de Perrier pour Segmenta noblium signorum et statuarum ... 1638, reproduit entre autres par Panofsky, op. cit.,
fig. 60; page de titre de Voor namste gebouwen vande tegenwoordige stadt Romen (XVIIe siècle), Chew, op. cit., fig. 17. L’*u-
vrage de Goya, au Prado, fut souvent reproduit.

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